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Procès Jean-Baptiste Rivoire contre l'hebdomadaire Français Marianne
« Une thèse défendue sans critique »
Publié dans El Watan le 26 - 01 - 2006

Le procès en diffamation avec constitution de partie civile intenté par le journaliste de Canal Plus, Jean-Baptiste Rivoire, au journal Marianne, représenté par son directeur Jean-François Kahn, devant la 17e chambre du tribunal correctionnel de Paris s'est déroulé en deux temps. Mardi 17 janvier, le tribunal a entendu la partie civile et la défense et leurs témoins au titre de la bonne foi et de la preuve.
La partie civile, représentée par maître Bourdon, a fait citer François Gèse, directeur des éditions La Découverte, Habib Souadia, ancien militaire auteur de La Sale Guerre (La Découverte), Nacéra Dutour (présidente de SOS Familles de disparus), Nicole Chevillard, journaliste. La défense de Jean-François Kahn, représentée par maîtres Jean-Yves Dupeu et Florence Bourg, a fait citer Saïd Sadi, président du RCD, Omar Belhouchet, directeur d'El Watan, Serge Fauvert, Cyril Drouet, journalistes, et Rina Chermann, la compagne de Didier Contant, journaliste qui s'est suicidé le 15 février 2004 au centre des débats. Ce mardi 27 janvier, le tribunal a entendu les réquisitions du ministère public et les plaidoiries des avocats des deux parties. Le tribunal rendra son verdict, mardi 28 février. La plainte de Jean-Baptiste Rivoire porte sur deux imputations, qu'il considère diffamatoires à son égard, contenues dans un article non signé de l'hebdomadaire Marianne du 4 mars 2004, intitulé « Un étrange suicide », faisant référence à un « lobby médiatique » et à « une campagne » contre le journaliste Didier Contant qui enquêtait sur l'assassinat des moines de Tibéhirine, il s'est suicidé le 15 février 2004. Les passages visés par la plainte de Rivoire sont les suivants : « Un certain lobby médiatique s'évertue à dédouaner les intégristes algériens de leurs crimes. Sa dernière campagne concerne l'assassinat de moines français du monastère de Tibéhirine, enlevés et égorgés par le GIA en mai 1996. Un très douteux ‘‘témoin'', le déserteur Abdelkader Tigha, abonde dans le sens de ceux qui veulent innocenter les ultra-islamistes. Ex-rédacteur en chef de l'agence Gamma, le journaliste Didier Contant a alors mené l'enquête en Algérie. Les faits qu'il rapporte établissent la culpabilité des extrémistes islamistes. Or il se trouve à Canal + un ancien journaliste, Jean-Baptiste Rivoire, qui, depuis longtemps, participe obsessionnellement à la campagne consistant à blanchir l'islamisme de ses forfaits... Les investigations de Contant le dérangent. On fait circuler le bruit que Contant est un agent des services secrets. On exerce des pressions sur Le Figaro Magazine qui refuse de publier la seconde partie du reportage de Contant. » Le premier à plaider, l'avocat du plaignant, maître Bourdon, dénonce un « sophisme auquel a succombé Marianne » et qui « est celui de la presse algérienne » qui serait : « Puisque vous stigmatisez, en partie, la responsabilité de l'armée algérienne dans la manipulation du terrorisme, vous êtes nécessairement dans l'exonération de l'islamisme armé. » Pour appuyer ses assertions, il cite abondamment le livre La Sale Guerre de Habib Souadia : « Tous les témoins de Souadia disent que c'est une sale guerre, ils condamnent tous l'islamisme armé. » L'avocat de Rivoire ironise, ensuite, sur « l'offre de preuve fournie par la presse algérienne. On n'a pas fini de se rendre service des deux côtés de la Méditerranée ». Et de citer un passage extrait de son contexte de l'interview de Saïd Sadi au Monde, selon lequel les services spéciaux algériens sont au cœur du terrorisme... « Trois officiers supérieurs algériens ont corroboré, ici, devant cette chambre, cette thèse de manipulation de l'islamisme armé pour fabriquer du terrorisme et pérenniser un régime... Le président algérien lui-même reconnaît que les services spéciaux manipulent l'islamisme armé »... « Tigha est un témoin central dans l'affaire de l'assassinat des moines », « il est dangereux pour l'image d'Alger », « il faut à tout prix le disqualifier ». Il traitera ensuite le journaliste de Liberté qui accompagnait Didier Contant chez l'épouse de Abdelkader Thiga de « véritable barbouze ». Et d'affirmer que le numéro de téléphone laissé à Mme Thiga est, selon des témoignages de la partie civile, celui des services algériens de Blida, pas moins ! Et, emporté dans son élan, il qualifiera d'« ignoble » l'article de Marianne, de « pâle copie de ce qui est écrit dans la presse algérienne sur Rivoire ». Et, catégorique : « Il n'y a pas d'articles sur les crimes de l'armée algérienne dans Marianne car il est dans la ligne de la presse algérienne. » Le ministère public dresse un réquisitoire très sévère, allant au-delà de la plaidoirie de la partie civile, contre Marianne et son article, écorchant dans la foulée la presse algérienne dont « la liberté pourrait donner lieu à un vaste débat ». Pour le ministère public, « les éléments de bonne foi ne sont pas réunis. La légitimité de l'information est le seul élément de la bonne foi à retenir. Les propos de l'article sont diffamatoires ». Et de considérer que « c'est un article violent dans la forme et dans le fond. Ce n'est pas seulement une polémique intellectuelle ». « La deuxième imputation est pire sans doute que de cautionner le terrorisme islamiste algérien... Accuser Rivoire d'avoir été une des causes du suicide de Didier Contant, c'est la plus impitoyable des imputations. »
« Une attitude élitiste manichéenne »
Maître Jean-Yves Dupeu, l'un des deux avocats de la défense, démontrera que le ton de l'article est modéré, qu'il existe un lobby médiatique. « Ce débat sur un lobby, ce n'est pas nouveau. C'est pourquoi il a été repris dans cet article. C'est un certain lobby médiatique. En France, et en France seulement, à l'initiative de certains, pour des raisons que j'ignore, est née une thèse selon laquelle les exactions commises par les intégristes étaient soit le fait de militaires déguisés en islamistes, soit le fait d'islamistes manipulés, orientés par les services spéciaux algériens. » « Rien n'est pire quand on est soi-même journaliste, analyste politique que de se heurter à cette thèse dialectique et de considérer qu'il y a d'un côté l'armée et de l'autre les islamistes. Voilà l'ambiguïté de ce débat. C'est un débat qui fait partie de la vie politique et médiatique française et qui infeste l'analyse en France sur la situation algérienne. » Maître Dupeu ajoute que cette thèse est « défendue sans la moindre distanciation, sans la moindre critique ». « Au moins, qu'on s'interroge, qu'on dise ce qu'ont été les crimes des islamistes. » L'avocat de Jean-François Kahn relève le témoignage de Mohamed Sifaoui, « un journaliste courageux », parce qu'« il n'était pas dans cette thèse, on lui a collé l'étiquette d'infiltré des services ». « Sifaoui dénonce de la part de Rivoire une démarche de militant et non de journaliste », « qui sélectionne les informations en fonction de son engagement ». Et il ajoute que « ce qui est dénoncé ici (dans l'article de Marianne), ce n'est pas une complicité de Rivoire, mais une forme d'aveuglement sur une thèse ». Maître Dupeu en veut pour exemple la transcription du documentaire « Attentats de Paris : on pouvait les empêcher » de Jean-Baptiste Rivoire. « La lecture de ce documentaire est édifiante, c'est une enquête à sens unique, à thèse unique, et tout ce qui se situe en dehors est une erreur. » « L'imputation ne repose pas seulement sur le documentaire versé au débat mais sur l'ensemble des documentaires réalisés par Rivoire sur l'Algérie... Peut-être les services algériens sont-ils mêlés à des coups tordus, mais, au moins, qu'on s'interroge... Et c'est de là que naît la légitimité de la critique de Marianne. C'est le rôle de cet hebdomadaire français de s'interroger sur cette manière univoque de traiter de l'Algérie. » L'avocat de Marianne souligne aussi que « le débat sur la bonne foi est important à raison de la nature de l'article lui-même, un article un peu coup de poing, fondé sur la connaissance que l'on a à Marianne des acteurs de la vie politique et médiatique de la scène algérienne ». « C'est un article volontairement polémique. Une polémique politique au bon sens du terme. Nous sommes face à une attitude médiatique et à la critique de cette attitude. Ce débat est nécessaire dans une société démocratique. » Maître Dupeu relève « une attitude élitiste concernant l'analyse de la situation de l'Algérie de quelques journalistes et intellectuels qui fait énormément de mal aux journalistes algériens qui se veulent les chiens de garde de la démocratie. Une fetwa a été prononcée contre eux. Contre les tracasseries du pouvoir en place, ces journaux (il cite El Watan) tentent de faire du journalisme, ils sont catalogués comme étant des suppôts du pouvoir. Cette attitude élitiste manichéenne de journalistes français ne peut pas durer, elle est contraire aux espoirs de vie démocratique en Algérie ».
Chronologie des faits
Maître Florence Bourg, deuxième avocate de Marianne et de Jean-François, sur l'imputation diffamatoire sur le suicide de Didier Contant, décrit le processus de déstabilisation de ce journaliste. « Huit heures de débat, la semaine dernière, ont confirmé en tous points les allégations qualifiées de diffamatoires : témoignages oraux et documents », souligne l'avocate. Elle dresse ensuite un rapide panorama chronologique situant le contexte : en avril 2002, Libération publie le témoignage de Abdelkader Tigha selon lequel l'enlèvement des moines de Tibeherine est l'œuvre de deux infiltrés du GIA. Le 1er décembre 2003, un documentaire de Rivoire dans lequel on découvre le visage de Tigha est diffusé à la télévision. Début décembre 2003, suite à ces révélations de Tigha, une plainte contre X est déposée au nom de la famille d'un des moines. C'est dans ce contexte que Didier Contant va se rendre en Algérie. Il retrouve le jardinier du monastère qui affirme que ce sont bien des terroristes islamistes qui ont enlevé les moines. Contant revient en France avec un premier article qui est publié par Le Figaro Magazine. Il retourne en Algérie. Accompagné du correspondant de Liberté à Blida, il va voir la femme et le frère de Abdelkader Tigha. De retour en France, « commence alors le processus de déstabilisation ». Le 5 février 2004, Didier Contant déjeune avec Serge Fauvert, un ami journaliste. Il reçoit un coup de fil de Rivoire, « le ton est inquisiteur, agressif ». Le 9 février, il est reçu à Canal Plus par Rivoire et son responsable hiérarchique, Paul Moréra, directeur du « 90 Minutes » sur une initiative de Serge Fauvert. L'entretien se passe mal. « C'est allé crescendo jusqu'au suicide de Contant le 15 février 2004. » Le journaliste Cyril Drouet déjeune avec Didier Contant le jour de son rendez-vous à Canal Plus. Didier Contant lui dit avoir été mis en accusation. « Mohamed Sifaoui est venu expliquer qu'il avait vécu la même chose : pressions et discrédit. » « Ces trois témoignages font le lien de la déstabilisation psychologique de Contant. » « Ils corroborent chacune des phrases de l'article. » Maître Florence Bourg cite trois documents écrits versés au dossier : un article d'El Watan reprenant les mails envoyés par Didier Contant à Chérifa Kheddar (présidente l'association des familles victimes du terrorisme), un article de L'Expression faisant référence à des coups de fil de Didier Contant à une journaliste d'El Watan et à un journaliste de Liberté et un article de France Soir le lendemain du suicide de Contant. Au titre de la bonne foi, l'avocate cite le témoignage de Macès Caron, directeur de la rédaction du Figaro Magazine et celui de la compagne de Didier Contant, Rina Chermann, qui a enquêté pendant deux ans. S'adressant au tribunal, maître Florence Bourg conclut : « Vous avez suffisamment de preuves et de témoignages pour accorder la bonne foi à Marianne. » Et de relever : « Aucun élément du dossier ne démontre que Rivoire a été contacté par Amnesty International de Londres. Il n'a pas pris contact avec Mme Tigha, il a agi sur la base du qu'en-dira-t-on. A aucun moment Tigha ne dit que sa femme a été menacée. » Le verdict sera rendu le 28 février prochain.


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