La gouvernance de Abdelmalek Sellal a été démontée en pièces durant cette semaine. Motif, le Premier ministre est inconsistant. Il revient facilement sur les décisions de son secteur. Les bonnes comme les mauvaises. Le dernier épisode, après celui de la mise en conformité de la vente de vin en gros, est bien sûr celui du cahier des charges des concessionnaires automobile. Le décret signé par Sellal en février dernier a provoqué une mini-crise diplomatique avec les principaux pays fournisseurs. Dont la France. Il n'y avait franchement pas de quoi. Les équipements de sécurité exigés par le cahier des charges étaient hors de propos pour une bonne partie. Texte bureaucratique inapplicable. La preuve, les importations d'automobiles allaient, de fait, cesser. Personne ne pouvant remplir toutes les conditions du cahier des charges. Abdelmalek Sellal devra bientôt avoir la possibilité de se distinguer positivement après l'interminable série de couacs qu'il a alignés depuis trois ans. L'obligation du chèque pour les transactions importantes lui en offre l'occasion. Le journal «El Khabar» a fait fuiter un projet du gouvernement de rendre le chèque obligatoire pour les transactions de plus de 1 million de dinars. A partir du 1er juillet prochain. Pas de communication politique sur le sujet. Trop risqué. Deux gouvernements, celui de Belkhadem en 2006, et celui de Ouyahia en 2011, ont dû ravaler leur date butoir pour faire rentrer une partie des flux financiers dans le pipe des banques. A priori, sur ce qu'il a montré en pusillanimité jusque-là, Sellal est encore moins «armé» que ses deux moelleux prédécesseurs pour affronter le continent informel de l'économie algérienne. Même si cette fois le seuil de l'obligation de l'usage du chèque est doublé par rapport à 2011. Chronique annoncée d'une nouvelle machine arrière ? Sans doute. Sauf si. Le gouvernement tient dans sa manche la mesure attractive par définition qui peut amadouer les réseaux de la distribution informelle. La suppression de la taxe sur l'activité professionnelle TAP. Assise sur le chiffre d'affaires dont elle prélève 2%, elle est décriée de toutes les organisations d'employeurs pour son caractère injuste. Le secteur d'activité qui en souffre le plus est justement celui de la distribution, où les marges bénéficiaires sont généralement confinées à moins de 5%. Les 2% de la TAP y sont une vraie invitation à travailler sans traces. Donc au cash. Le FCE espère obtenir dès 2016 un début de désarmement de la TAP avec transitoirement une baisse de son taux à 1% avant sa disparition l'année suivante. Suppression de la TAP contre acceptation du chèque obligatoire par les grossistes qui sous-déclarent. Il faudra faire preuve de beaucoup de créativité pour réussir ce petit pas vers l'économie moderne. Car dans le même temps, une réforme de la fiscalité locale s'impose. La TAP finance les collectivités locales. Un moment étourdissant dans le procès Khalifa l'autre samedi à Blida. C'est le président de la cour qui, arrivé à bout d'arguments face à l'ancien directeur général de la CNAC (assurance chômage), lui demande sur le ton du reproche : «Pourquoi n'avez-vous pas demandé les bilans d'activité de Khalifa Bank avant de faire des dépôts de trésorerie chez elle ?» Sidération dans la salle, chez les nombreux spécialistes du secteur bancaire présents. Le juge connaît-il le rôle du régulateur, ou l'a-t-il fait exprès ? Le prévenu prend donc la peine de, poliment, le lui rappeler. C'est la Banque d'Algérie qui en accordant un agrément bancaire à une institution financière donne un signal à tous les acteurs, selon lequel cette institution respecte les lois et règles prudentielles. Si Moumen Khalifa a réussi à ne pas se faire retirer son agrément entre mi-2000 et mi-2002, période où les dépôts filaient à toute allure vers le financement de ses autres activités, ce n'est pas un déposant, aussi important soit-il, qui allait pouvoir vérifier dans ses bilans que la banque faisait fuir les dépôts. Question aussi incongrue que politiquement orientée. Le juge veut effacer la responsabilité du régulateur dans la préservation des intérêts des déposants. Le procès Khalifa est enfin entré ce dimanche dans cette phase cruciale de son déroulement. Celle qui doit permettre de comprendre pourquoi la commission bancaire de la Banque d'Algérie n'a pas protégé la place en sévissant dès avant la fin de l'année 2001 et non une année plus tard. Or, la réponse est connue. La Banque d'Algérie sous le gouverneur Abdelouahab Keramane a saisi, par la personne de Ali Touati, vice-gouverneur en charge des changes, le ministre des Finances Mourad Medelci au sujet des infractions à la législation des changes commises par Khalifa Bank en 2000 et 2001. Le régulateur n'a fait son travail qu'à moitié. Il a enquêté, établi les infractions. Mais n'a pas pu sanctionner. Cette prérogative lui avait été retirée par un amendement de la loi sur la monnaie et le crédit de 1997 d'Ahmed Ouyahia qui déplaçait cette prérogative de la Banque d'Algérie vers le ministre des Finances. Tout le monde connaît la suite. La régulation passe du technique au politique, et donc de Ali Touati à Mourad Medeleci qui n'a pas «été suffisamment intelligent» pour évaluer le risque qui allait donner lui une année plus tard à la suspension de l'agrément de commerce extérieur à Khalifa Bank, l'arrêt des flux déposant, l'accélération des flux retraits et l'entrée en banqueroute de la banque. Mourad Medelci a-t-il décidé seul de donner un sursis à Khalifa Bank en 2001 ? C'est la seule question qui mérite réponse dans ce procès. Pour sa part, cette chronique — qui existait déjà à l'époque du premier procès en 2007 — a conduit sa propre investigation. Mourad Medelci a déposé le dossier de Touati à la présidence de la République. Sans suite. PSA – Peugeot Citroën - est sur le point de faire le choix du Maroc pour sa prochaine délocalisation industrielle. 100 000 véhicules par an en mode lancement. La nouvelle est de la semaine sur Blomberg. Elle est juste stridente alors que les zones franches du nord (Tanger) et de la façade Atlantique (Kenitra) se disputent déjà l'implantation du projet. Stridente pour qui ? Pour les officiels algériens bien sûr. Toujours plusieurs coups en retard dans le jeu régional de l'attractivité des investissements. La division territoriale se précise. Le Maroc est orienté production de biens à valeur ajoutée médiane ou haute. L'Algérie est positionnée consommation de ces biens. La source parisienne qui a évoqué l'imminence de cette annonce - on parle du mois de juin - a également ajouté que d'autres pays sont encore en lice pour cet investissement. L'Algérie s'est bloquée pour trois ans avec l'usine à minima de Renault à Oran. En vérité, elle s'est surtout bloquée avec la rigidité de son 51-49, qui fait du pays le dernier de la région MENA (Méditerranée Afrique du Nord) en attractivité des IDE si on rapporte les flux entrants au PIB. Le dernier ? Peut-être pas. La Libye fait pire en ce moment.