Frappée de plein fouet par l'attaque terroriste du vendredi 26 juin, qui a coûté la vie à 38 victimes, la Tunisie essaie de se redresser. Il y a lieu d'assumer la réalité de ce terrorisme dans la proximité et il y a besoin de trouver les mécanismes de riposte. Le Conseil supérieur de la sécurité nationale, tenu avant-hier, n'a pas confirmé les rumeurs parlant d'imminent état d'urgence. Le Président Béji Caïd Essebsi a vu dans une telle décision des conséquences négatives, notamment pour la venue des touristes et des investisseurs. «Une telle décision serait synonyme d'alerte maximale sommant les étrangers de détourner les yeux de la Tunisie en ce moment», aurait-il dit en l'occurrence, selon des sources proches de la présidence de la République. Le Conseil s'est donc limité à examiner les moyens d'appliquer les décisions prises vendredi soir par le chef du gouvernement, notamment, l'appel de l'armée de réserve, l'armement de la police touristique et la fermeture de 80 mosquées illégales, afin de contrer le terrorisme. Par ailleurs, la riposte ne s'est pas limitée au niveau local. L'attaque de Sousse a également poussé la communauté internationale à s'intéresser davantage à la Tunisie et aux moyens de l'aider à sauver sa transition démocratique contre les agissements de l'internationale terroriste. Soutien international Ainsi, les ministres de l'Intérieur de la France, de l'Allemagne et de la Grande-Bretagne se sont déplacés hier à Sousse, au lieu-même de l'attaque, pour exprimer leur soutien à la Tunisie et examiner les mesures à prendre pour aider la Tunisie à contrer le terrorisme. «Nous allons mettre au point une meilleure coopération en matière de renseignement, de sécurisation des frontières et des aéroports afin d'agir ensemble et de faire bénéficier la Tunisie de notre expertise en matière de lutte antiterroriste et ce à travers, notamment, des actions de formation », a déclaré le ministre français de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve. «La détermination est la clé du succès dans cette guerre contre le terrorisme et nous la gagnerons ensemble», a renchéri le ministre allemand de l'Intérieur, Thomas de Maizière, alors que la ministre britannique a souligné que «cette attaque terroriste a révélé beaucoup de bravoure de la part du personnel de l'hôtel, des citoyens tunisiens et des autorités du pays.» Pour sa part, le ministre tunisien de l'Intérieur, Nejem Gharsalli, a précisé que «la lutte contre le terrorisme ne se fera pas au détriment des principes et des valeurs démocratiques, mentionnées par la Constitution». Bilan et perspectives Des manifestations populaires ont eu lieu, notamment à Sousse et Monastir, pour condamner le terrorisme. Un couple anglais a fêté son mariage sur le rivage de Boujaâfar. 300 touristes allemands ont organisé une fête sur la plage de Djerba pour défier le terrorisme et dire leur attachement à la Tunisie. Mais, cette mobilisation n'a pas empêché un grand débat en Tunisie à propos des lacunes enregistrées et des décisions prises par le gouvernement après l'attaque. Ainsi, le ministre tunisien de l'Intérieur a critiqué les agissements de la sécurité intérieure de l'hôtel. «La directrice générale m'a appelé en personne, alors qu'elle aurait dû appeler les forces de sécurité, comme le dit le manuel de procédures sécuritaires et c'est une perte de temps monumentale en pareilles circonstances», a-t-il notamment relevé. Un autre manquement a été relevé suite à la non-réactivité des forces de la sécurité marine. «Une vedette est arrivée sur le rivage de l'hôtel, quelques minutes après le début de l'attaque. Mais, les deux agents n'étaient pas prêts à affronter le terroriste», a indiqué un témoin sur place dans une vidéo publiée sur les réseaux sociaux. Côté politique, la décision de fermer 80 mosquées illégales et d'interdire tout étendard, autre que le drapeau national, ne fait pas l'unanimité. «La fermeture des mosquées va encourager le terrorisme», selon l'ex-chef du gouvernement de la Troïka, Hamadi Jebali, qui a démissionné, en mars 2013, de son poste de Secrétaire général d'Ennahdha. Les décisions de serrer l'étau autour des jihadistes et de leurs réseaux de financement ont déjà fait couler beaucoup de bruit après l'attaque du Bardo, le 18 mars dernier. Elles étaient 198 mosquées illégales en mars et le gouvernement a subi des pressions, y compris d'Ennahdha, parti du pouvoir, pour assouplir les restrictions. Pourtant, les analystes et les experts sont unanimes sur leur danger. Qu'en sera-t-il cette fois ?