«L'engagement au cinéma, entre plaidoyers et défis du futur», tel est le thème débattu, mardi dernier à la Cinémathèque d'Alger, dans le cadre de la tenue du 7e Ficinema. Une problématique que quatre intervenants ont tenté de développer. L'auteur espagnol, Mireia Sentis Casablanca, a rappelé que son documentaire Les héros invisibles est un film engagé. Selon elle, la notion de film engagé, c'est réécrire l'histoire du côté de ceux qui ont perdu les guerres. «On peut le faire, dit-elle, avec des livres et avec le cinéma. De toutes les façons, on peut le faire également étant dans la rue et dans les programmes de télévision». Pour le cinéaste burkinabé Sékou Traoré, le cinéma engagé au Burkina Faso aborde des thèmes politiques, tels que la corruption, ainsi que des thèmes sociaux, dont l'excision et la traite des enfants. «Ce sont des thèmes qui sont traités jusqu'à aujourd'hui. Le thème de la traite des enfants revient à nouveau. Celui qui a été le porte-drapeau des thèmes anticorruption, c'est Pierre Yameogo. Il y a eu beaucoup de films sur l'exorcisme, à l'image du dernier film de Sembéne Osmane et Cheikh Omar Sissoko», éclaire-t-il. L'historien français, Michel Serceau, avertit qu'il n'est pas cinéaste mais quelqu'un qui écrit, réfléchit et analyse le cinéma. Il pense que le film engagé est un cinéma qui réplique et qui répond à une situation grave. L'engagement du cinéma remonte à loin. Parfois, il y a eu des réponses rapides et toutes faites. Il explique que «la réponse qu'apporte le cinéaste ne peut pas être une réponse simpliste, toute faite, ou basée sur une idéologie sommaire. Le cinéaste ne peut pas se contenter de donner une leçon, car il y a un spectateur dans cette affaire. Celui-ci doit être amené, par le film engagé, à avoir les moyens de constituer sa réponse. Le cinéaste est, en quelque sorte, un guide. Il ne peut pas se substituer au spectateur. Il peut donner des éléments de réflexion, bien examiner le problème posé dans tous ses aspects, y compris qu'on remette en perspective l'historique. Le cinéma engagé est uniquement crispé sur l'actualité». De son côté, le réalisateur algérien, Abdelkrim Behloul, a rappelé, lui aussi, qu'il n'était pas cinéaste, mais qu'il voulait juste porter sa propre parole. Il avoue que, parfois, l'engagement s'impose. Il prend comme exemple son film Thé à la menthe, réalisé dans les années 1980. De par la thématique abordée dans ce film, la presse française avait, à l'époque, estimé qu'il avait fait un film pour aider les Algériens à repartir chez eux. Selon lui, «un film peut être engagé ou ne pas l'être. Quand il y a un vrai problème qui se pose, on se dit comment je vais pouvoir parler de ce problème en évitant les censures et en trouvant un producteur ? Comment je vais raconter une histoire qui a l'air innocente mais dont le fond peut participer à l'engagement ? Quand on parle de film engagé, sont, tour à tour, engagés le producteur, le scénariste, le distributeur et le réalisateur. C'est un mouvement de fond. Ce qui compte au final, c'est le public. Quand on est financé par l'Etat, on tombe dans un film de propagande».