Deux pans de la mémoire collective sont partis la semaine dernière sans gémir ni crier gare. Une mort subite pour les deux hommes. Les deux ont su garder, même en partant vers un monde meilleur, cette discrétion et cette pudeur dont ils n'ont jamais pu se départir de leur vivant. Belgacem Nedhaf, l'un des pionniers des arts martiaux à Souk Ahras, est décédé, vendredi, à l'âge de 77ans, emportant avec lui une page de l'histoire du judo, mais aussi de la ville où il a vécu depuis sa naissance. L'homme tranquille qu'il était n'a jamais quitté le tatami, ni la famille sportive avec laquelle il a su chasser loin les effets de l'âge biologique. Sa carrière professionnelle, passée à la SNTF et couronnée par un court passage dans une autre entreprise publique, a été faite de sérieux et de dévouement. L'un de ses anciens collègues en est témoin. «Le nom de Nedhaf était synonyme de correction et rares étaient les occasions où l'on pouvait le voir sans activité, même quand tout le travail demandé était réalisé», a attesté un ancien cheminot. Son visage expressif, ses propos courtois et mesurés, le respect de l'autre, sa disponibilité pour la chose sportive, l'intérêt qu'il portait à l'éducation des générations montantes et toutes ces qualités intrinsèques qu'il préservait, n'a pas démérité le respect que lui voue la population locale. Ali Zerrougui, à quelques jours d'intervalle, a tiré sa révérence à l'âge de 78 ans. Un officier de l'état civil comme la ville de Souk Ahras n'en a jamais connu. Rappelé à deux reprises par l'administration locale alors que l'homme devait partir à la retraite l'année 1998, il répondra favorablement afin de préparer une relève fiable. Une parfaite maîtrise des lois et une connaissance approfondie des rouages de la gestion administrative ont hissé Zerrougui au rang d'homme-référence. «Aussi exagéré que cela pourrait paraître, Ali Zerrougui n'a jamais commis de faute professionnelle pour une carrière qui s'étale sur près de cinquante ans. Il était le seul à maîtriser toutes les techniques de rectification des erreurs des autres», a reconnu un ancien maire. Pour les deux hommes, les officiels, le DJS et le P/APC ont brillé par leur absence.