Moins de 20 jours avant l'Aïd El Kébir, les premiers signes de l'anarchie commencent à se faire voir à Alger. Des moutons attachés dans des jardins publics pour paître tranquillement, d'autres installés à la sortie d'immeubles ou carrément à proximité de la voie automobile, s'incrustent «doucement mais sûrement» dans le paysage urbain. Certes, de nombreux citoyens patientent encore, caressant l'espoir de voir les prix baisser un peu dans les prochains jours, mais certains ont déjà acheté. Faute d'endroits indiqués et d'espaces, on n'hésite pas à les laisser n'importe où, profitant de l'indulgence des autorités publiques à l'occasion de cette fête religieuse. En fait, les autorités de la wilaya d'Alger ont déjà désigné les points de vente autorisés dans le but d'éviter l'anarchie des années précédentes, mais elles ne peuvent interdire aux habitants de faire entrer leurs moutons en ville. Du foin et des excréments de mouton sont visibles sur les routes et de nombreuses ruelles du centre d'Alger. «Mon voisin a déjà acheté un mouton, il l'a attaché à la sortie du bâtiment. Ça pue le mouton, mais personne ne peut lui faire le reproche, d'autant que sa présence est devenue une distraction pour les enfants», raconte un habitant du Télémly. A Souachet, dans la commune de Bordj El Bahri, et à Bab El Oued, des moutons sont abandonnés au niveau des espaces verts des jardins publics. «D'ici le jour du sacrifice, toutes les plantes soigneusement entretenues et protégées seront arrachées», relève un habitant. Selon lui, l'ambiance de l'Aïd fait oublier aux habitants la nécessité de veiller sur la propreté de leurs quartiers et la préservation de leur cadre de vie. Pis encore, certains ferment les yeux sur les instructions des autorités publiques. Sinon comment expliquer le fait que des commerces commencent à changer d'activité pour accueillir des moutons l'espace de quelques jours. «Certains citoyens ont cette opportunité de pouvoir acheter le mouton et de le laisser chez les vendeurs jusqu'à la veille ou le matin même de l'Aïd, mais bien d'autres sont obligés de le ramener avec eux», explique un père de famille. «Les responsables de la capitale ont intérêt à bien réfléchir sur ce point et à s'entendre avec les éleveurs et autres vendeurs qui se déplacent à Alger sur la possibilité de garder les moutons à leur niveau jusqu'au jour de l'Aïd», propose notre interlocuteur. Une mesure que l'on ne peut généraliser, sachant que la plupart des citoyens, pour faire plaisir à leurs enfants, trouvent du bonheur en la présence du mouton à la maison, malgré tous les désagréments. Il est par ailleurs à relever qu'elles sont nombreuses les familles à ne pas acheter le sacrifice de l'Aïd en raison de sa cherté. Cette année, un mouton acceptable ne coûte pas moins de 38 000 DA. «En dessous de ce tarif, l'on ne peut prétendre acheter qu'un chat…», ricane un citoyen. Tout compte fait, rien ne peut changer l'ambiance de l'Aïd malgré ses excès et ses inconvénients. A la charge des autorités publiques d'améliorer l'organisation de cette fête religieuse pour qu'elle se déroule sans trop d'incommodités.