La majorité des responsables d'entreprises et organismes publics qui ont « défilé », jeudi dernier, à la barre au tribunal criminel de Blida comme témoins, ont remis en cause le rôle « irresponsable » des conseils d'administration et des holdings. Ils expliquent qu'ils ont été contraints de placeer des fonds à la banque Khalifa, suite à une instruction du conseil d'administration. « On nous a même félicités pour avoir réalisé un bénéfice après de tels placements », diront certains. Après le retrait de l'agrément de Khalifa Banque par la banque d'Algérie, la majorité de ces cadres ont perdu leurs postes. Ce fut le cas de Yaïssi Djebar, directeur de l'office Avicole de Béjaia. Il explique avoir effectué un placement de 50 millions de dinars pour une durée d'une année. « Nous avons réalisé un bénéfice de 600 millions de centimes qui a permis de couvrir plus de six mois de salaires du personnel », se rappelle-t-il. Il dit avoir reçu les félicitations du conseil d'administration, l'encourageant à faire un second placement de 30 millions de dinars. Ce montant sera englouti suite au scandale Khalifa Bank. « On m'a marginalisé pendant trois années avant de me démettre de mes fonctions. Nous étions les dindons de la farce de cette affaire », s'est-il exclamé. C'est la même amertume qui avait empreint la déposition de l'ex-DG de l'entreprise ABICAT, filiale du groupe Gema. « Nous avons déposé l'argent dans la banque Khalifa suite à une circulaire du holding », dit-il « Ne pensez-vous pas que c'est une négligence de la part des responsables qui déposent de l'argent au moment où la banque Khalifa était en difficulté de liquidité ? », interroge le procureur général.« Non », réplique-t-il. Saâdi Nadir, DG de l'Institut national de cartographie, fut admis à la retraite pour avoir fait un placement de 240 millions en 2002. « Comment avez-vous décidé tout seul de placer l'argent sans l'avis du conseil d'administration ou de votre tutelle ? », demanda le président du tribunal. Le témoin explique qu'il a adressé plusieurs correspondances à la tutelle dans lesquelles, il a demandé l'autorisation sans préciser le nom de la banque. « C'est après que nous avons opté pour la banque Khalifa ». Kacemi Azzeddine, DG de l'entreprise nationale des services et des forages pétroliers, filiale de Sonatrach, paraît dans une meilleure posture. Il est le seul responsable qui a pu récupérer les 500 millions de dinars placés en 2002 à la banque Khalifa. Lakhdari Mesbah était le directeur de l'agence foncière de Tajnant. Il a proposé à des bénéficiaires de lots de terrain, de verser leur agent dans un compte domicilié à l'agence de Sétif de Khalifa Bank. Hadj Madani Sid Ahmed, poursuivi pour association de malfaiteurs lors du premier procès, était caissier manipulateur à l'agence Didouche Mourad à Alger. Il affirmé qu'en avril 2003, deux personnes se sont présentées à l'agence avec des sacs contenant 500 millions de centimes expédiés par la caisse principale. « J'ai signé l'accusé de réception avant de compter l'argent. Il manquai 200.000 dinars », avoue-t-il. Boumediene Maâmar, DG de l'OPGI de Dar El-Beida, a placé 116 milliards à la banque Khalifa. « Nous étions domiciliés à la BNA, mais suite à la chute du taux d'intérêt qui passa de 19% à 6%, nous avons déposé notre argent par devant des commissaires aux comptes et personnes ne nous en a dissuadés », justifie le témoin. Sadmi Ali, président de la commission d'organisation de la Bourse d'Alger, explique que lors de son installation à la tête de la commission, il a trouvé qu'un placement de 32 millions de dinars a été effectué par son prédécesseur Boukrami. « L'alerte fut le retrait par la banque d'Algérie de l'agrément pour le commerce extérieur à la banque Khalifa. Nous avons alors retiré tout l'argent », explique-t-il.