Avril 1972. Le lieutenant Arthur Brian prend ses fonctions au commissariat de police de Tallahassee, la capitale de la Floride. A vingt-huit ans, le lieutenant Brian est le type même du jeune policier plein de dynamisme et, pour peu qu'il ne commette pas d'impair, plein d'avenir... Ses débuts dans la police ont été extrêmement prometteurs. Il vient de l'Etat voisin de l'Alabama, où il a été précédé par une réputation flatteuse. Aussi, le chef de la police de Tallahassee, quand il l'accueille, a des projets bien précis en ce qui le concerne. — Lieutenant, j'ai une mission pour vous. Et si vous vous en acquittez, je vous promets un bel avancement... Il marque un temps avant de poursuivre : — Vous devrez mettre fin aux activités du gang deDick Bertolino. Le jeune policier reste un instant silencieux. C'est un gros morceau. Le gang de Dick Bertolino, lié à la Mafia, est une des plus importantes organisations de malfaiteurs des Etats-Unis. Ses effectifs sont estimés à cent cinquante hommes. Il est spécialisé dans le trafic de drogue et opère le long des côtes de Floride, mais il ne dédaigne pas les autres formes de criminalité : vol à main armée, racket, prostitution. On lui impute au moins une dizaine de meurtres restés impunis. Car, bien que son chef et ses principaux lieutenants soient parfaitement connus, depuis que le gang existe aucun de ses membres n'a passé un seul jour en prison. A cela, une seule raison : la peur. Même en Alabama, la bande de Bertolino terrorise les braves gens. Alors on peut imaginer ce que cela doit être en Floride... La voix du chef de la police de Tallahassee tire Brian de ses pensées. — Vous allez pouvoir vous mettre tout de suite au travail, lieutenant. Un viol a été commis hier soir : une jeune femme enlevée dans une boîte de nuit par trois hommes. D'après un témoin, qui est l'un de nos indics, il s'agissait de Bertolino et de deux de ses hommes. Seulement son témoignage n'a aucune valeur. II nous faut celui de la jeune femme... Elle est à l'hôpital municipal. Je compte sur vous... Tandis qu'Arthur Brian se prépare à partir, son chef le retient. — Euh, lieutenant.., si jamais la femme se décide à parler, vous devrez vous occuper personnellement de sa sécurité. Cela aussi fait partie de votre mission, et ce n'est sans doute pas le plus facile... Le lieutenant Arthur Brian acquiesce d'un hochement de tête, l'air parfaitement sûr de lui. Il doit montrer une attitude énergique devant son chef. Pourtant, il mesure toutes ses responsabilités. Il sait dans quel état ont été retrouvées les victimes qu'on impute au gang Bertolino. La plupart ont été torturées et affreusement mutilées. Il ne s'agit pas seulement d'arrêter un criminel ; il sent que son enquête va faire courir beaucoup de risques à tous ceux qu'il va approcher. Le lieutenant Brian se penche au-dessus du lit que l'infirmière lui a indiqué... Une jeune femme blonde d'une vingtaine d'années a un sursaut apeuré en le voyant. Il lui parle d'une voix douce. — Ne craignez rien, mademoiselle. Je suis lieutenant de police. Je suis là pour vous aider. Etes-vous en état de répondre à mes questions ? La jeune femme prononce un petit oui. Arthur Brian sort alors de sa poche plusieurs photos d'hommes. Elle les regarde et pousse immédiatement un cri — Celui-là ! C'était l'un des trois... Je le reconnais... Le lieutenant Brian sourit intérieurement. Elle vient de désigner la photo de Dick Bertolino... Sa mission n'est finalement pas aussi difficile qu'il paraissait... — Eh bien, mademoiselle, dès que vous serez remise, je vous demanderai de venir signer votre déposition. Quinze jours plus tard, la jeune femme se présente à son bureau. Le lieutenant l'accueille avec amabilité, mais il se rend compte immédiatement qu'il y a quelque chose de changé dans son attitude. — Asseyez-vous, je vous en prie. Si vous voulezbien confirmer la déposition que vous m'avez faite à l'hôpital... A suivre
