Il se passe dans les vicissitudes du monde contemporain comme s'il ne peut pas se trouver un conflit, meurtrier surtout, voire génocidaire, sans qu'il n'y ait derrière un intérêt énergétique, dans les gisements de pétrole et de gaz. Depuis la fin des années soixante-dix, sous l'administration de Jimmy Carter, une inquiétude particulière, disons carrément une hantise, avait saisi l'environnement présidentiel autour du bureau ovale après la lecture du rapport des services du renseignement conjugués, qui alertait sur le «devoir des responsables politiques et économiques» sur les besoins yankees en matière d'énergie, allant alors extraordinairement croissant. Ils n'hésitèrent pas -ces services- à poser des questions aux grands commis de Washington sur des cibles précises, en pointant du doigt les pays du tiers-monde possédant du pétrole et du gaz en quantité inestimable, dont leurs économies respectives n'avaient pas besoin, mais dont leur grande importance sera d'un apport décisif pour la continuité de l'essor américain, et pourrait, a contrario, attirer une attention active de la part des puissances concurrentes. Ronald Reagan ne s'installe pas confortablement sur son fauteuil qu'une guerre féroce est déclenchée entre deux grands pays voisins, détenant presque la moitié des réserves d'énergie fossile dans le monde. L'Iran, sous la bannière de la jeune révolution islamique, menée victorieusement par l'ayatollah Khomeiny, contre le régime monarchique du Shah Réza Pahlavi et l'Irak, sous la houlette de Saddam Hussein, contrôleur en chef de la version mésopotamienne du Baath -les deux Etats flanqués derrières de puissantes armées conventionnelles, payées rubis sur ongle au moyen de dizaines de milliards de dollars, ramassés dans le commerce des hydrocarbures. Une arithmétique se fut certainement gourée dans les estimations finales, ne parvenant pas à évaluer l'issue par rapport au pendant traditionnel de la guerre froide : Téhéran se transforme en problème géopolitique au lieu d'un «simple» enjeu énergétique, ce qui conduisit Washington à fixer ses desseins exclusivement sur Baghdad. L'administration de Ronald Reagan joue à fond le fameux scénario de la «Guerre des étoiles», histoire de détourner l'attention de l'opinion mondiale et de diriger l'attention de Moscou -aux prises, alors, avec les prémices de la pérestroïka de Gorbatchev. Georges Bush (père) succède à Reagan et aussitôt le pétrole de la Mésopotamie est à l'ordre du jour dans les grandes urgences de la Maison-Blanche. Saddam tombe dans le piège de l'ambassadrice américaine à propos du droit sur l'émirat du Koweït et il ne perd pas un instant pour l'envahir, en expliquant qu'il est la propriété de l'Irak depuis la nuit des temps. On ne revient pas ici sur cette histoire, narrée dans ses moindres détails, après la coalition occidentale -dans laquelle Israël détenait un rôle de choix- qui a permis la libération du Koweït, mais aussi de faire passer le leader irakien comme l'ennemi de l'humanité. Opération que Bush fils, vers l'entame du nouveau millénaire, va mener jusqu'au bout en envahissant les territoires irakiens, avec la fantastique mise en spectacle de la poursuite contre Saddam Hussein, son arrestation et son exécution. La première partie du plan a réussi : les gisements mésopotamiens sont sous contrôle yankee. Car le chemin n'est pas encore fini et il va passer par la Libye et ses réserves faramineuses. Avec pour cette variante que l'Europe, cette fois, ne laisse pas les Américains faire seuls. L'Union européenne veut sa part du gâteau. Nicolas Sarkozy en sera le porte flambeau. Il va marcher héroïquement sur Benghazi, quelques heures avant la promesse des chefs yankee sur un droit de regard sur certains gisements de la Tripolitaine, de Ghadamès, de Merzouk ou de la Cyrénaïque, moins d'une journée après le lynchage de Mouammar Kadhafi, poursuivi dans les sentiers d'une banlieue cahoteuse par une foule acharnée, en son sein un homme chargé de lui tirer une balle dans la tête. Comme Saddam, le commun des citoyens et des Etats en termine une fois pour toute de son «péril en tant que dictateur et chef terroriste universel». Si les gisements de l'Irak et de la Libye sont aujourd'hui en sécurité, bien emmitouflés entres les mains surarmées de l'Occident, l'ordre de la vie commune dans ces deux pays appartient à la débandade totale, dans laquelle les populations se mettent à sérieusement regretter leur existence vécue du temps des leaders disparus. Le Soudan et le Mali, a un degré moindre, ne sont pas demeurés en laisse dans l'immense offensive pour le contrôle des hydrocarbures, le premier a été scindé et le second l'a échappé belle, «grâce» à la France qui n'entend pas perdre un iota stratégique sur ses anciennes colonies de l'Afrique subsaharienne. Et aussi la peur s'installe dans l'avancée de la Chine en Afrique et soudain le pétrole du Nigéria et dans tout le bassin du delta du Niger, est ressenti en danger de déperdition. Il faut trouver, comme pour le reste, un scénario crédible pour cette partie du monde. Parce qu'il faut intervenir physiquement - comme toujours, comme indiqué dans les programmes d'accaparement. Du jour au lendemain, il est créé, comme sorti du néant, une menace funeste du nom de Boko Haram. Qui va commencer par commettre des attentats, allant, ici et là, faire parler de lui parmi la masse des groupuscules fondamentalistes qui empêchent la liberté et entravent les démarches vers la démocratie, jusqu'au jour où ce groupe va kidnapper des dizaines d'innocentes lycéennes, qui s'ensuivra immédiatement par une demande d'intervention américaine de la part des autorités nigérianes. Voici alors, dans ce schéma perfide, de la danse de la mort, du carnage et du génocide, qu'Israël se met de la partie, frontalement en son nom propre, mais sous la garantie des puissances alliées classiques, au moins les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France. La situation israélo-palestinienne était plus au moins calme au moment des négociations avec les compagnies britanniques pour l'exploitation des gisements à Ghaza, mais au lendemain de la nouvelle officielle sur une future coopération palestinienne avec les sociétés russes Gazprom et Technopromexport, le ton a été donné pour le retour au carnage et à l'extermination, avant, sans aucun doute, la réoccupation, militaire, au moins. En attendant que les chefs palestiniens, responsables dans les décisions relatives à l'exploitation des gisements dans le conclave et ses eaux territoriales, daignent «remettre de l'ordre» dans les contrats de partenariat. La présence physique russe en Syrie constitue déjà un grand malaise, un empêchement magistral, pour la consécration définitive de I'hégémonie israélo-sioniste et les puissances occidentales de l'Otan dans la région. Et cette chorégraphie macabre sur les dépouilles des enfants palestiniens à travers les échanges de tirs de roquettes et de missiles tentant de sérier dans les incriminations, fait hisser dans les opinions la morale des bannières humanistes, ethniques et religieuses, alors que l'intérêt à la base, le mandant essentiel, consiste à ne pas laisser les filons hydrocarbures palestiniens sortir du contrôle «rassérénant» des puissances occidentales, acquises à Israël. On ne sait pas, actuellement, si la question a été discutée -ou dans les esprits elle doit être traitée- entre les leaders palestiniens, en vérité entre Mahmoud Abbas et Hamas, mais en tout cas l'enjeu ne semble pas facile à déterminer, tandis que le problème fondamental de la Palestine demeure son occupation, quand le monde entier réclame la paix et que, pour le malheur supplémentaire de la Palestine, certains de ses territoires «libérés» regorgent d'hydrocarbures. N. B.