Décédé le 25 avril 2014, Tito Vilanova a laissé un immense héritage au Barça, aussi bien d'un point de vue humain que footballistique. Lors de la toute première saison de Tito Vilanova au Barça, le coach catalan s'était adressé au Camp Nou lors du trophée Gamper comme le veut la tradition pour tout nouveau coach. Il s'est tourné vers Eric Abidal devant des milliers de supporters blaugrana et lui a dit : "Ta force est ton combat". C'était en août 2012. Abidal avait reçu une transplantation de foie en avril de cette année-là après son cancer et personne au monde ne savait mieux sa souffrance que Tito Vilanova, souffrant du même mal au niveau de la glande parotide depuis novembre 2011. "Si tu es fort et que tu as de la volonté, nous t'attendrons. Aussi longtemps qu'il le faudra", avait-il ajouté. Un destin facétieux et tristement ironique voudra qu'Abidal soit remis d'aplomb et de retour sur les terrains du centre d'entraînement Sant Joan Despí quelques mois plus tard alors que le même jour, l'entourage de Tito Vilanova annonçait une rechute de son cancer qui lui vaudra de finalement quitter son poste et de décéder à l'âge de 45 ans, après des mois de combat contre la maladie. Si un homme devait incarner toute la philosophie du Barça, ce serait lui. Arrivé à l'âge de 14 ans dans les murs de cette ancienne bâtisse administrative construite en 1702 qu'est La Masía, le jeune Tito s'est vite trouvé un ami avec qui admire Bernd Schuster à l'entrainement des A : Pep Guardiola. Deux jeunes hommes, deux milieux de terrain doués techniquement pour une amitié qui durera jusqu'à la mort. Né à Bellcaire d'Empordà, un village de moins de 500 âmes profondément ancré dans la tradition rurale catalane, Vilanova aurait pu être le moule sur lequel fondre les nouveaux talents de La Masia. Comme beaucoup d'entre eux, il n'aura pas réussi en équipe première et aura décidé de partir chercher fortune et temps de jeu sous d'autres cieux. A Figueres, au Celta de Vigo, à Badajoz, Majorque, Elche et Gramenet, avant de revenir à la maison entraîner la Cadete B, une formation de joueurs de 13 ans qui comptait en son sein Gerard Piqué, Cesc Fábregas ou encore Lionel Messi.
Guardiola était l'inspiration, Vilanova, la réflexion Quand Guardiola est devenu le coach du Barça B en 2007, il a immédiatement fait appel à celui qui avait entre-temps œuvré comme directeur sportif à Figueres et Terrasa et comme coach à Palafrugell. Pour donner corps au football féérique du grand Barça de Messi, Iniesta et Xavi, il fallait quelqu'un qui connaisse bien le football catalan et ses valeurs. Une éminence grise nommée Tito Vilanova : "Nous sommes différents. Gagner n'est pas suffisant. Nous avons un idéal de jeunes joueurs d'équipe et d'un football offensif comme l'exige la culture du Barça. Nous avons nos défauts, mais la couardise n'en fait pas partie", avait dit Vilanova à El País à l'époque. De la couardise, ils n'en montreront pas au moment de remporter le titre de troisième division et de prendre les rênes de l'équipe première des mains de coachs au pédigrée plus prestigieux, pour faire vivre au Barçasa période la plus riche, en remportant un triplé unique dans l'histoire du football espagnol. Quand Guardiola a douté, au moment de s'asseoir sur l'un des bancs les plus prestigieux au monde, il demandait à Tito : "sommes-nous prêts ?", et celui-ci lui répondait : "Tu es prêt". On comprend mieux pourquoi Pep lui avait dédié son Ballon d'Or d'entraîneur, le remerciant en catalan. Si Guardiola était l'inspiration derrière les plus folles expérimentations, Vilanova était la réflexion, l'intelligence et le pragmatisme. Tous deux étaient essentiels à la création de l'une des formations les plus belles et les plus abouties de l'Histoire. L'héritage de Tito Vilanova ce n'est pas une Liga remportée avec plus de 100 points alors que sur la fin, il manageait l'équipe en vidéo-chat depuis sa chambre d'hôpital à New York, avec une écharpe autour du cou. Une écharpe du Barça. Ce ne sont pas les titres (14 sur 19 possibles en 4 ans), les records, le beau jeu et la philosophie ludique qu'il a imprégné au plus profond de ses pupilles, des Cesc, Piqué et Messi, qui sous sa férule, a marqué 91 buts en une année calendaire. Son héritage, c'est aussi son fils Adrià qu'il allait voir en Juvenil B, de moins en moins, pour ne pas accaparer l'attention. Pour que La Masia continue son œuvre et que le Barça, ce Barça là qui ne voulait pas de lui comme joueur, mais dont il a contribué à faire l'une des formations les plus révérées de l'histoire, continue de grandir. L'héritage de Tito Vilanova est surtout incomplet. Et malheureusement pour les fans de football que nous sommes, nous n'aurons jamais le loisir de découvrir l'étendue de ce merveilleux legs. Le jour où le club avait annoncé la rechute de Vilanova, Andoni Zubizarreta, alors directeur sportif du Barça, avait été interrogé par un journaliste soucieux de savoir si les maladies de Vilanova et d'Abidal renforçaient le mythe autour du club catalan. "Non", avait répondu Zubizarreta, avant d'ajouter : "Cela montre que nous sommes humains."
