L'ancienne présidente de l'Association marocaine des droits humains (AMDH), Khadija Ryadi, a soutenu que "le Maroc est en pleine régression sur le plan des droits de l'Homme", affirmant que de nouveaux modes de répression sont utilisés par les autorités, notamment les attaques et la diffamation des activistes qui se développent d'une façon inquiétante. "Il est difficile d'exposer rapidement la situation des droits humains au Maroc. Mais pour rester sur les tendances principales et les indicateurs les plus parlants, on peut dire sans hésitation que nous sommes dans une période de régression", a indiqué la militante Khadija Ryadi dans une interview à un média local. "Il faut dire aussi que la situation des libertés au Maroc n'a jamais été stable", a-t-elle ajouté, notant qu'"à partir de 2003, suite aux événements terroristes de Casablanca, la répression s'est de nouveau installée. D'abord sous le prétexte inacceptable de lutte contre le terrorisme, puis ouvertement." "Cette régression touchera progressivement tous les espaces de la vie publique", a-t-elle déploré. "Actuellement, cinq ans après la mise en place de la nouvelle constitution, malgré les quelques aspects positifs qu'elle contient (...), elle reste une constitution qui centralise les pouvoirs entre les mains de la monarchie et ne respecte pas les fondements d'un Etat de droit, à savoir la séparation des pouvoirs et la souveraineté du peuple", a souligné la militante marocaine. "Mais ce qui est encore plus problématique, ajoute-elle, c'est qu'au Maroc les lois ne sont pas appliquées, à commencer par la constitution", expliquant que "les quelques garanties qu'elle comprend sont quotidiennement bafouées". "L'impunité demeure la règle. La corruption et la fraude se répandent dans toutes les sphères de la société, du sommet jusqu'à la base. Les libertés sont réprimées et la dissidence est visée par une dure répression. La presse indépendante a été muselée, et plusieurs journalistes indépendants ont été contraints de quitter le pays", a-t-elle relevé. "De nouveaux modes de répression sont utilisés, notamment des attaques et la diffamation contre des activistes dans la presse mercenaire qui se développe d'une façon inquiétante", selon Mme Ryadi, indiquant que "ladite presse détient des moyens énormes et est protégée contre la justice qui elle aussi demeure dominée et instrumentalisée par l'Etat." "Il est difficile d'exprimer son indépendance et son autonomie par rapport au régime, que vous soyez un intellectuel, journaliste, ONG, parti politique, artiste ou alors blogueur", a déploré Khadija Ryadi, notant à cet égard: "quand on s'exprime librement et surtout quand on est critique envers l'Etat, que vous soyez de gauche, laïque, ou islamiste, vous êtes visés, votre vie privée surveillée, vous êtes diffamé dans la presse, voire arrêtés sinon poursuivi pour des accusations fallacieuses." "A moins que vous soyez soutenu ou votre cause médiatisée, surtout au niveau international, vous risquez de passer en prison suite à un procès monté de toutes pièces. Depuis 2014, le ministre de l'Intérieur est passé à une vitesse supérieure en menant une campagne de répression directe contre des ONG indépendantes", a-t-elle affirmé. Concernant l'AMDH, "la plus grande au Maroc, que j'ai présidé de 2007 à 2013, n'a plus le droit actuellement d'utiliser les salles publiques et privées de tout le pays. Plus de 110 de ses activités ont été interdites arbitrairement", a ajouté la militante, signalant que "plusieurs autres ONG sont cibles de cette répression." "Le Maroc, contrairement à l'image qu'il s'efforce de donner à l'extérieur, n'arrive pas à améliorer les indicateurs en matière des droits et libertés, il figure parmi les pays les moins bien classés dans l'indice de développement humain publié par le PNUD et dans le classement sur la liberté de la presse publié par RSF", a conclu Mme Ryadi.