Un artiste a particulièrement fait l'événement durant cette première quinzaine du mois de Ramadhan 2015 : Lounis Aït Menguellet. Le poète et chanteur kabyle revient de loin, après une longue période de convalescence, suite à une opération à cœur ouvert. Le come-back sur scène a commencé par deux concerts en juin à Tizi Ouzou, l'un accompagné par son fils Djaâffar et l'autre en solo. C'est le coup de départ d'une tournée nationale avec des concerts à El-Tarf, à Alger (3 juin dernier), à Tipasa (le 6 juillet), à Saïda (8 juillet) et à Boumerdès où il est attendu le 11 juillet prochain. Lounis Aït Menguellet, dont la carrière artistique a commencé dans les années 1960, est l'un des plus grands et plus populaires artistes algériens, lui dont le style est si peu commercial et avec un orchestre qui ne dépasse pas quatre membres sur scène : deux percussionnistes, un guitariste et son fils qui joue au synthétiseur et à la flûte. Lui, le sage, a dit un jour : «L'artiste ne fait qu'attirer l'attention des gens sur leur vécu et interpeller leur conscience. C'est déjà une mission et je ne me crois pas capable d'apporter les solutions aux problèmes.» Mais ses textes souvent intemporels se bonifient avec le temps et ne perdent rien de leur pertinence et de leur force. «La paix demande la parole : je suis contrainte de t'abandonner, pays pour qui j'ai l'âme en peine / Ils m'aiment en me comparant à une perdrix / Belle quand je leur sers de festin...», clame-t-il dans un de ses textes. Dans un autre texte il dit : «Nous avons chanté les étoiles, elles sont hors de notre portée / Nous avons chanté la liberté, elle s'avère aussi loin que les étoiles.» Lounis Aït Menguellet s'interdit, dans ses chansons (tout comme dans la vie), de donner des leçons aux autres. «Je ne fais que de l'observation. Elle peut être juste ou fausse. Mes mots ne sont pas des vérités générales. Mais, quand je les dis, ça me fait du bien.» Cet «homme ordinaire, plus ordinaire que les ordinaires», a ses passages à vide, comme les cinq années passées entre la sortie de l'album «Yenna-d wemγar» (2005) et Tawriqt Tacebḥant (2010). Mais, c'est souvent pour mieux rebondir. Au plan musical, Lounis Aït Menguellet a en quelque sorte et en douce procédé à certains changements dans la continuité. Ainsi, il a apprécié les arrangements musicaux de Djaâffar apportés à certaines de ses chansons. Lounis Menguellet va sans cesse à la source pour puiser «une prose littéraire orale, cette prose amazighe traditionnelle dans ses différentes formes d'expression autour desquelles a évolué la mémoire collective de la société», fait remarquer Mohammed Djellaoui, auteur d'un essai sur la poésie d'Aït Menguellet. Il ajoute que le poète «met la légende et la vertu au service d'une cause». Le poète, malgré sa modestie et sa simplicité montagnardes, est devenu une légende vivante, malgré lui.