«Le mariage ne dure qu'une nuit mais sa réflexion une année.» Un adage algérien qui résume à lui seul les tracasseries liées aux dépenses de la fête, laquelle ne dure que quelques heures. Aujourd'hui le marché de l'emballage des gâteaux, puisque c'est le sujet de notre enquête, est de plus en plus florissant et les modèles de plus en plus innovants.Pas facile de faire son choix. Des organisateurs en parlent. Ghania, maman de six enfants : «C'est jeter son argent par les fenêtres» «J'ai marié mes six enfants. El hamdoullah. Par contre, au fil des cérémonies, j'ai eu du mal à résister à la vague des nouveaux emballages. On n'arrêve pas d'innover. Les gens en font une véritable fixation. Cela devient aberrant», explique Ghania, sexagénaire. «Pour moi, c'est comme si je prenais une liasse de billets pour les mettre directement dans une poubelle. Je considère cela comme un non-sens et un gâchis. C'est du gaspillage», renchérit-elle. «Lorsque je faisais mes achats pour les mariages et entamais les préparatifs, j'avais trois critères importants : solidité de la boîte, qu'elle ne prenne pas beaucoup de place et qu'elle soit facile à manier. Pour le reste, la couleur, les rubans, c'était du superflu. Maintenant, il n'y a plus de critères visiblement. Pour eux, le plus important est que ce soit cher et clinquant. Je trouve que c'est désolant. Je le redis encore une fois, du gâchis.» Ghania plaide pour le retour aux sources et encourage les mariés à minimiser leurs frais : «le plus important que les gens gardent des boîtes avec vos initiales mais c'est d'être heureux, d'avoir sa famille autour de soi, et que les gens qui vous aiment soient contents pour vous. Dans tous les cas de figure, il y aura toujours des gens qui critiqueront votre fête. Alors ne vous arrêtez pas aux détails et allez à l'essentiel.» Nouha, maman de deux enfants : «Une année, uniquement pour les préparatifs» «Ma fille voulait quelque chose de simple au départ pour son mariage. Mais pour ma part, dès que nous avons célébré ses fiançailles, j'ai tout pris en main. Pour moi, il était exclu et hors de question qu'elle se marie sans l'organisation d'une grande fête. Et je sais que chaque détail compte. Alors pour les emballages des gâteaux, je ne vous dis pas ! J'ai passé pratiquement tout une année à choisir le modèle parfait. Je n'ai raté aucun mariage auquel j'étais invitée, juste pour connaître les tendances, les nouveautés et être in. Et à force de passer dans les magasins spécialisés et chez les grossistes, je sais quand c'est fait à la main, comment doivent être écrites les initiales et plein d'autres astuces. On peut dire que je suis devenue spécialiste en la matière», explique Nouha en riant. «A la fin, j'ai choisi des assiettes en céramique avec leur couvercle. C'est comme des tadjine. C'est vrai que c'est un peu cher, mais je ne les ai distribuées qu'aux femmes. Je sais qu'elles seront gardées et qu'elles trôneront dans leur cuisine une année après et peut-être même utilisées. Je me dis qu'elles pensent à ma fille. Ses initiales et celles de son mari sont inscrites au fond de l'assiette. J'ai aussi distribué des sachets de lavande dans de petits sacs de la même couleur sur lesquels étaient inscrites les initiales. Pour les hommes, j'ai opté pour des assiettes simples que j'ai mise à l'intérieur de bourses en satin. C'était aussi beau mais moins chères», précise cette maman. Et de continuer : «C'est vrai que je pouvais me permettre de telles folies. Je n'ai que deux filles à marier. Avec leur père, nous avons travaillé toute notre vie pour qu'elles ne manquent de rien. Et, grâce à Dieu, nous avons réussi. Nous voulions que le monde entier sache que nous étions fières d'elles. Je me suis beaucoup investie pour que ce soit une réussite totale et que personne ne trouve à redire. Et je ne le regrette pas. Mais j'avoue que ce n'est pas le plus important.» Ghada, maman de deux enfants : «J'ai marié mes enfants en France et j'achète les emballages en Algérie» «J'ai deux garçons. Le premier s'est marié sans grande fête, juste un dîner en famille. Le second, c'est tout le contraire. Il voulait une fête totale comme en Algérie. Nous venions pratiquement chaque été au pays pour assister à des cérémonies. Et mon fils voulait célébrer son mariage de la même façon», raconte Ghada, établie en France depuis 1993. «Il s'est marié il y a de cela quelques mois. Et comme je voulais bien faire les choses, j'ai demandé conseil à mes cousines en Algérie. J'ai fait des recherches sur internet et trouvé plein de modèles de boîtes, de napperons, de gâteaux, de dragées et bien d'autres choses. Sauf, qu'en France, la quantité n'y est pas et c'est cher. Donc, j'ai décidé de tout faire dans mon pays..., sauf la fête», explique-t-elle en riant. Après avoir pris un congé à son travail, Ghada, aidée par ses cousines, commande les habits traditionnels. Mais pas seulement. «J'ai acheté les boîtes ici. Elles étaient belles et pratiques : carrées et en bois. J'ai tout acheminé par avion. Bien sûr, cela m'a coûté cher mais cela valait la peine. Les gâteaux ont été confectionnés en Algérie. Je ne regrette pas du tout mon choix. J'ai fait sensation, notamment auprès des Français. Ils n'avaient jamais goûté des pâtisseries aussi succulentes. Les boîtes, les dragées et les napperons ont épaté tout le monde. C'est simple, ils ne pourront pas faire comme moi, parce qu'il n'y en a pas en France», conclut-elle tout sourire. Souhil, jeune marié : «un mariage sans chichis» «Mes parents voulaient faire une fête grandiose. Comme je suis l'aîné de la fratrie, c'était important pour eux de faire tout à la perfection. je m'étais renseigné sur les prix et j'ai constaté l'exagération, j'ai alors décidé de prendre les choses en main. J'ai convaincu mes parents de me donner une partie du budget consacré au mariage. Cela devait servir à l'achat de tout l'emballage et des gâteaux. J'ai acheté les boîtes les plus simples possibles et trois sortes de gâteaux, pas plus. Le reste du budget, je l'ai réservé à un voyage de noces sublime. Pour moi, c'était plus important. Construire des souvenirs avec ma moitié. Mes parents ont un peu boudé, mais au fond ils étaient contents pour nous.»