Abdelaziz Bouteflika a présidé, hier mardi, dans l'après-midi, au siège de la présidence de la République à El Mouradia, une réunion du Conseil des ministres, la dernière avant la rentrée sociale. Comme lors des derniers Conseils du genre, Bouteflika n'a pas manqué de souligner la gravité de la situation financière du pays , persistant depuis l'été 2014 à la suite de la chute libre des prix des hydrocarbures. Kamel Amarni - Alger (Le Soir) - Dans le communiqué de la présidence, on peut lire d'ailleurs que : «Le président de la République a également invité les responsables nationaux et locaux à redoubler d'efforts pour informer l'opinion publique nationale sur les conditions financières difficiles que traverse le pays ainsi que sur les perspectives de croissance et d'emplois que l'Algérie est capable de réaliser à moyen terme.» Ce n'est pas la première fois que Bouteflika recadre, en effet, le gouvernement sur cette question : oui, la situation est difficile et il faut que cela soit clairement expliqué aux Algériens qu'il ne faut surtout pas «berner» par un discours faussement optimiste. Bouteflika dira sèchement que «Mieux informés, les citoyens seront moins exposés aux discours nihilistes et seront également davantage mobilisés pour l'effort et la solidarité en vue de faire face à la conjoncture financière difficile actuelle». Autrement dit, il faut préparer l'opinion à accepter des réformes dont la majorité sont destinées à mettre fin au populisme ambiant ! C'est notamment le cas de la réforme du système des retraites. «Cette révision est destinée à sauvegarder la Caisse nationale de retraite, qui fait face à une forte augmentation des départs à la retraite sans conditions d'âge ou à la retraite proportionnelle, deux dispositifs mis en place dans les années quatre-vingt-dix, à titre exceptionnel et transitoire alors que le pays était confronté à d'importantes vagues de dissolutions d'entreprises et de compression des salariés», lit-on dans le communiqué de la présidence. Désormais, il sera donc mis fin à ce «provisoire qui dure» pour revenir à des normes universelles en la matière. Ce projet de loi, «dont l'entrée en vigueur est fixé au 1er janvier 2017, prévoit notamment le rétablissement de l'obligation d'un âge minimal de 60 ans (55 ans pour la femme) avec un minimum de 15 ans de travail». Mieux, il y est introduit également «la possibilité pour le travailleur d'exercer cinq années supplémentaires avec l'accord de l'employeur (ainsi que) la possibilité pour les travailleurs dans des métiers hautement qualifiés ou déficitaires d'exercer au-delà de l'âge de la retraite». Par ailleurs et dans ce même sillage le retour vers des normes de fonctionnement universelles de l'économie, le Conseil des ministres a eu à examiner et à approuver deux importantes lois. La première concerne la petite et moyenne entreprise, un immense gisement de richesse et de création d'emplois, jusque-là carrément négligé en Algérie ! «Cette mise à jour législative reflète l'importance grandissante des petites et moyennes entreprises pour la réalisation dans notre pays de croissance, la création d'emplois et la diversification de l'économie nationale », précise le communiqué. L'accent sera prioritairement mis sur des filières stratégiques comme la recherche, l'innovation et la sous-traitance. Le second texte de loi ne sera autre que la fameux «nouveau modèle de croissance économique » annoncé par Abdelmalek Sellal. En gros, il consiste, finalement, en un nouveau modèle en matière de fiscalité, l'objectif étant de hisser la fiscalité ordinaire, c'est-à-dire hors hydrocarbures, à un niveau tel qu'elle puisse couvrir, à l'horizon 2019, le budget de fonctionnement et même de l'équipement, un fardeau supporté, depuis l'indépendance, par la seule rente pétrolière. Sur un tout autre plan, le Conseil des ministres a eu à adopter un avant-projet de loi «fixant la liste des hautes responsabilités de l'Etat ainsi que des fonctions publiques dont l'accès requiert la nationalité algérienne exclusive ». En soi, déjà, l'adoption de ce texte de loi par le Conseil des ministres, c'est-à-dire par Bouteflika, est un vrai camouflet pour le secrétaire général du FLN, Ammar Saâdani. Ce dernier avait, pour rappel, mené une campagne d'une rare férocité contre ce projet de loi et son «origine», un article de la Constitution de février 2016 qu'il voulait, insidieusement, imputer au seul Ahmed Ouyahia ! Et la liste des postes retenus par le Conseil des ministres, comme interdit désormais aux binationaux, est très large : «Au titre des responsabilités et des fonctions politiques, les dispositions du projet de loi concernent les présidents des deux Chambres du Parlement, le président du Conseil constitutionnel, le Premier ministre et les membres du gouvernement, les présidents de la Cour suprême et du conseil d'Etat, le gouverneur de la Banque d'Algérie, les responsables des organes de sécurité, ainsi que le président de la Haute instance indépendante de surveillance des élections». De même qu'«au titre du ministère de la Défense nationale, le projet de loi englobe les principales responsabilités au sein de l'armée et prévoit également que celles-ci soient élargies à toute autre responsabilités militaire qui sera décidée par décret présidentiel ». Il y a lieu, enfin, de signaler que le Conseil des ministres s'est penché également sur d'autres points importants, à la tête desquels, la sécurité routière. Il est ainsi décidé, via un texte de loi, de durcir davantage les sanctions en la matière.