«Quand on évoque devant moi les lendemains des printemps arabes, je ne peux qu'avoir devant les yeux et dans mon cœur les lendemains d'octobre 1988 en Algérie». C'est Karim Tabbou, 1er secrétaire national du front des forces socialistes (FFS) qui débute ainsi son intervention à l'université d'été du parti socialiste français (PS), affirmant en analysant les révoltes arabes que ce sont des mouvements populaires ayant toutes les apparences de l'autonomie avec des objectifs politiques précis et limités.» Pour explorer les lendemains des printemps arabes, le cas de l'Algérie qui n'a pas été touché par ce mouvement de démocratisation présente un intérêt certain pour évaluer les conditions qui doivent être réunies pour une vraie transition démocratique , pour identifier les obstacles qui peuvent se dresser contre les transitions dans les pays qui nous intéressent aujourd'hui ", estimera Tabbou non sans affirmer que l'Algérie qui a cru accéder à la liberté et à la démocratie depuis 20 ans déjà a vu «la restauration et la consolidation d'un régime autoritaire avec la bénédiction et le soutien des puissances étrangères». «Sommes-nous en présence de révoltes ou de révolutions ou simplement une transformation et un toilettage des régimes en place dans ces pays ?» s'est-il interrogé en se questionnant sur «les véritables enjeux, les différents acteurs, les stratégies suivies, les rapports de force à la fois sur le plan international et sur le plan interne dans ces différents pays». Affirmant que sur le plan géographique, «il n'y a pas de continuité territoriale qui peut expliquer la contagion démocratique», les régimes autoritaires qui ont été renversés présentent pour lui «des caractères communs mais aussi des différences notables». Chaque peuple, chaque société ayant son vécu historique propre, les peuples n'ont pas connu, constate Tabbou qui reconnaît que «nous sommes en présence de mouvements populaires ayant toutes les apparences de l'autonomie avec des objectifs politiques précis et limités». Qualifiant les révoltes arabes de «fighting spirit, le génie des peuples qui a créé cette rupture», Tabbou reconnaîtra aussi que l'initiative populaire a permis de suppléer la faiblesse des oppositions et le manque de solidarité internationale. «J'estime que dans des pays otages de régimes de dictature pendant près d'un demi-siècle où il y a une extinction de la vie publique, il peut paraître irréel de parler de partis forts et organisés», a-t-il jugé, allant même jusqu'à dire que «dans ces conditions, il n'y a plus de partis forts et organisés dans l'opposition. les partis du pouvoir sans ancrage réel dans la société sont de simples appareils hypertrophiés», relèvera-t-il encore dans le même registre non sans affirmer que «l'opposition islamiste possède certes des capacités de mobilisation et d'agitation mais souffre d'un déficit programmatique et de dissensions idéologiques». Les mouvements de contestation menés par la classe moyenne et la jeunesse sont sortis selon lui de l'émeute et de la violence.