Le comité de village d'Ibouyisfène, dans la commune de Bouzeguène, à une soixantaine de kilomètres à l'est de Tizi Ouzou, a organisé, avant-hier, à l'occasion de la célébration du 20 Août, journée du Moudjahid, une grande cérémonie en hommage aux martyrs du village. Au programme de cette journée que les villageois n'oublieront pas de si tôt, un rassemblement de tous les habitants au lieudit Habchi, situé face au nouveau monument du village pavoisé aux couleurs nationales, soit un bijou architectural entièrement financé par les fonds du village et par de nombreux bienfaiteurs qui n'ont pas hésité à mettre la main à la poche pour réaliser cet édifice qui fait désormais la fierté de toute la région. Les femmes du village,vêtues de robes traditionnelles étaient les premières à occuper les lieux dès les premières heures de la matinée. Elles ont réussi à créer une véritable ambiance de fête en entonnant des chants patriotiques entrecoupés de youyous en hommage aux valeureux combattants de l'Armée de libération nationale qui ont donné du fil à retordre aux blindés de l'armée française. Il faut rappeler que les montagnes environnantes ont été le théâtre de sanglants accrochages entre les moudjahidine de l'ALN et les contingents français lourdement armés. C'est à dix heures que débute finalement la cérémonie avec le rituel dépôt de gerbes de fleurs devant deux immenses plaques commémoratives en marbre sur lesquelles ont été gravés, en trois langues (française, amazighe et arabe), les noms des chouhada du village le tout suivi d'une minute de silence ponctuée de la lecture de la Fatiha. Le moment le plus attendu fut certainement celui consacré aux prises de parole et aux nombreux témoignages réservés aux acteurs de la lutte armée. Des témoignages émouvants de moudjahidine de la région et de compagnons de lutte venus de régions éloignées de l'Algérie profonde. La contrée des Ath Yedjar qui englobe de nombreux villages, de Mehagga jusqu'à Houra, a énormément souffert de la terreur de l'armée française qui n'a pas hésité à utiliser tout son arsenal de guerre pour tenter de mater la rébellion. En vain. Les différents témoignages ont été surtout centrés sur les hauts faits de guerre auxquels ont pris part les moudjahidine du village d'Ibouyisfène et qui se sont déroulés, dans le périmètre de cette contrée de la Wilaya III historique comme Azaghar, Loudha, Assif-Ousserdoun, Ibouyisfène et Aït Saïd comme l'ont rappelé d'ailleurs les intervenants. Les nombreux orateurs ont tenu à souligner que le Congrès de la Soummam n'était pas une simple réunion de guerriers de l'ALN mais il s'agissait d'une étape hautement historique dans la vie du peuple algérien, las d'être foulé aux pieds et d'être humilié par une puissance militaire et politique décidée à tout massacrer sur son passage. Et dans un tel registre, le village d'Ibouyisfène a justement payé un lourd tribut avec 26 martyrs qui sont tombés vaillamment au champ d'honneur pour que le pays retrouve finalement son indépendance et sa liberté. Pour clôturer cette journée, l'ensemble des invités a été convié à une grande waâda populaire offerte par le village dont les habitants sont bien connus pour leur sens de l'hospitalité et du sacrifice. KAMEL NATH OUKACI