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Le «maquis culturel» des intellectuels algériens
Un numéro spécial Algérie de la revue Entretiens sur les Lettres et les Arts (1957) réédité par Dahlab
Publié dans El Watan le 03 - 11 - 2018

Mohammed Harbi, Kateb Yacine, Mostefa Lacheraf, Malek Haddad, Jean Sénac, Mouloud Mammeri, Mohammed Dib, Henri Kréa, M'hamed Issiakhem, Mohammed Khadda, Mustapha Kateb, Khaled Benmiloud… pour ne citer que ceux-là.
Autant dire la crème de nos intellectuels et l'avant-garde littéraire et artistique algérienne des années 1950. Ces noms clinquants ont été réunis dans un numéro spécial de la revue Entretiens sur les Lettres et les Arts daté de février 1957 et publié par l'éditeur anticolonialiste Jean Subervie.
Ce numéro propose ainsi une précieuse collection de textes mêlant histoire, théâtre, poésie, ainsi que des études sur la musique algérienne, sur la création dramatique ou encore la production picturale, à quoi s'ajoutent des morceaux choisi de la poésie populaire traduite en français (Mohamed Ben Azzouz El Boussaâdi, Cheikh Smati, Ben Kerriou). On y trouve également une précieuse analyse critique de Nedjma de Kateb Yacine, le roman étant paru un an auparavant au Seuil. L'article est signé Jean Sénac sous le titre : «Kateb Yacine et la littérature nord-africaine».
Ce numéro spécial s'impose comme un document rare. Une pépite. Il est resté longtemps confiné dans les bibliothèques. L'apanage des spécialistes. La bonne nouvelle, c'est qu'il vient d'être réédité par la maison Dahlab, à Alger.
Et ce n'est pas tout. En plus de cette précieuse trouvaille, on pourra se procurer un exemplaire, rare là aussi, des quatre numéros du Chameau Prolétaire, supplément réalisé par Kateb Yacine et M'hamed Issiakhem en 1967, lors de leur éphémère collaboration avec Algérie-Actualité, avec la complicité de son fondateur Youcef Ferh,i qui a dirigé le prestigieux hebdomadaire depuis sa création en octobre 1965 jusqu'en 1972.
Justement, il faut savoir que c'est Youcef Ferhi, véritable mémoire vivante de la presse algérienne, qui est l'artisan de cette heureuse réédition. Hier, il s'est présenté à la rédaction d'El Watan avec, dans sa main, des exemplaires de la revue Entretiens sur les Lettres et les Arts ainsi que le Chameau Prolétaire dont El Watan, a-t-il tenu à préciser, a assuré l'impression sur ses rotatives.
Tout a commencé un jour de 1967, révèle Youcef Ferhi. «J'ai découvert ce livre par hasard chez un bouquiniste à Paris», confie-t-il. Il en saisit d'emblée l'importance. «Ce livre est un état des lieux de la culture algérienne à l'époque», explique-t-il. Il s'est mis tout de suite en tête «d'en faire profiter nos concitoyens».
Mais il en a perdu la trace, et ne voilà-t-il pas qu'il le retrouve «incidemment» dans ses archives personnelles il y a de cela quelques semaines seulement. Tout est allé très vite par la suite. En ouverture du livre réédité, il écrit : «En farfouillant dans mes archives, j'ai retrouvé un numéro de la revue Entretiens sur les Lettres et les Arts paru en février 1957, sur l'état des Lettres et des Arts en Algérie, que j'avais envisagé de republier dans notre hebdomadaire Algérie-Actualité.
Avec le concours d'amis, notamment Mohamed Chegnene des éditions Dahlab et Aïssa Malki, imprimeur, j'ai pris sur moi, après cinquante ans, de tenir mon engagement vis-à-vis de nos lecteurs encore vivants et donc de publier en un tirage limité et unique ce numéro sur l'état de la culture nationale en 1957.»
Sur la genèse éditoriale originale du projet dans les années 1950, M. Ferhi nous dit que «c'est une initiative que l'on doit à Aoufi Mahfoud qui était le président de la section de l'Ugema à Paris». Dans l'avant-propos de l'édition originale, Mohammed Harbi écrit : «La colonisation voulait garder sous son influence le développement intellectuel de la jeunesse algérienne, en diffusant certaines formes de la culture française et en la coupant de son passé national.
Elle n'y a pas réussi. L'élan des masses populaires était trop grand, il a entraîné la jeunesse dans son sillage, l'a poussée à faire son profit de la culture véritable du peuple français en s'opposant à toute assimilation mécanique des apports extérieurs, à utiliser la langue française comme instrument de libération sans renoncer à sa langue maternelle.
Cela ne s'est pas accompli sans drames, sans déchirements. Entre le dilemme d'une culture nationale archaïque et d'une culture étrangère moderne, les intellectuels algériens ont choisi le contact vivifiant des masses. Faisant la synthèse de l'ancien et du nouveau, ils se sont engagés dans l'action constructive et leur souci de la réalité, de la vérité, tranche avec les préoccupations des esthètes en quête de couleur locale. De cela, la nouvelle littérature algérienne porte témoignage.»
Les quatre numéros du Chameau Prolétaire réunis
Concernant la courte aventure de ce cahier expérimental qu'était Le Chameau prolétaire, Youcef Ferhi en a livré un témoignage saisissant dans son livre 10 ans de presse. 1962-1972 paru chez Dahlab en 2013. L'ancien directeur d'Algérie-Actualité y raconte comment il suggéra un jour à Mohamed Seddik Benyahia, alors ministre de l'Information, l'idée de lancer un «périodique illustré et satirique» qui distillerait des «vérités pas toujours bonnes à dire». Benyahia n'adhère pas tout de suite au projet.
Un jour, il appelle Youcef Ferhi et lui dit : «Tu connais Kateb Yacine ? Et M'hamed Issiakhem ?» Benyahia voulait simplement aider les deux monstres sacrés de la culture algérienne à «améliorer leur situation matérielle», faisant remarquer au passage que «Yacine et M'hamed étaient indociles et anticonformistes».
«Ils viendront te voir», lui lance Benyahia. Un accord est vite trouvé autour du fameux supplément, et le numéro zéro du Chameau Prolétaire paraît dans l'édition du 9 avril 1967. Dès le numéro suivant, les choses se corsent. Mohamed Seddik Benyahia est «agressé de coups de fil», rapporte Youcef Ferhi dans son livre.
Le ministre goûte peu l'humour iconoclaste des deux trublions, considérant qu'ils ont été «un peu fort, surtout avec la photo d'un minaret et d'une fusée au décollage et en ascension avec comme légende ‘Une fusée qui ne démarre pas'…» Le journal subira «une attaque en règle, une levée de boucliers comme nous n'en avions jamais vu», se souvient Youcef Ferhi. L'aventure s'arrête au bout du troisième numéro. Le quatrième numéro ne sera jamais imprimé. «Le Chameau prolétaire est une bonne expérience, mais les esprits ne sont pas mûrs» fera remarquer Mohamed Sedik Benyahia à Youcef Ferhi.
Pour notre plus grand bonheur donc, les quatre numéros de ce cahier unique dans les annales de la presse algérienne sont disponibles au SILA. On pourra se les procurer avec le numéro spécial de la revue de 1957 dès aujourd'hui au stand des éditions Dahlab. «Le livre a été tiré à 500 exemplaires seulement.
Le lecteur pourra acquérir le livre et les quatre numéros du Chameau Prolétaire pour la somme symbolique de 300 DA. Nous ne tirons aucun bénéfice des ventes. Pour nous, il s'agit d'un acte pédagogique», précise Youcef Ferhi. L'ancien directeur d'Algérie-Actualité souligne qu'il lui tenait à cœur de rendre publics ces documents en hommage à Kateb Yacine «dont nous nous apprêtons à commémorer le 30e anniversaire de sa disparition».
Ces mots de Mohammed Dib qui datent de 1950, et qui sont convoqués par Sénac dans son étude sur Kateb Yacine, résument sans doute parfaitement l'esprit qui animait notre élite de l'époque : «Toutes les forces de création de nos écrivains et artistes mises au service de leurs frères opprimés, feront de la culture et des œuvres qu'ils produiront autant d'armes de combat. Armes qui serviront à conquérir la liberté.»


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