Comme Mohamed, toute une génération d'Algériens ont été adeptes du camping. Une pratique qui abolissait les clivages sociaux et permettait à toutes les couches de la population de se côtoyer. «Il y avait des directeurs, des médecins mais également de simples employés qui passaient leurs vacances ensemble. Cela permettait à toutes les couches de la société algérienne de se retrouver et de se parler», juge Mohamed qui, pendant une vingtaine d'années, a planté sa tente du côté de la plage du Figuier, près de Boumerdès. Pour lui, le camping a permis de rapprocher les Algériens entre eux et de rappeler que, dans certaines régions, les villageois profitaient de la présence des campeurs pour commercer. «Notre présence permettait aux villageois de vendre leurs produits comme le pain traditionnel, le lait ou les figues.» Et d'affirmer : «On participait au développement du village !» Changement de décor avec les années de terrorisme où la pratique a connu un coup d'arrêt. Entre les groupes terroristes qui sévissaient dans les montagnes et les actions des forces de l'ordre, les familles ont été contraintes d'abandonner le camping pour se rabattre sur les camps familiaux qui offraient plus de sécurité. Une tendance qui ne plaît pas aux amoureux du bivouac, qui estiment que les camps de toile sont loin d'offrir la même ouverture sur la nature. «Ça n'à rien à voir avec l'esprit du bivouac, estime Mohamed. Un camp de vacances vous assure peut-être plus de commodités, mais vous y perdez le charme de la vie près de la nature. Cela se rapproche plus du tourisme de masse.» Surfant sur la vague, plusieurs camps de vacances privés ont vu le jour. Car à 7000 DA la semaine pour des tentes qui peuvent accueillir six estivants, le camp de toile reste le meilleur moyen de s'offrir des vacances pour une majorité d'Algériens. «Payer 15 000 DA pour deux semaines de vacances me paraît la meilleure formule que je puisse trouver avec mon budget, affirme Ali, joint par téléphone. A ce prix-là, il ne faut pas être trop regardant sur certaines incommodités, mais dans l'ensemble on a un minimum de confort.» En effet, avec une tente qui peut accueillir six personnes, un espace cuisine collectif, des sanitaires et quelques animations, le camp de vacances a supplanté les joies du bivouac pour beaucoup d'Algériens.