Ils étaient des milliers à converger, hier, vers le centre de la capitale depuis les localités et wilayas avoisinantes pour prendre part aux manifestations anti-5e mandat. De Boufarik, Zéralda, Staouéli, Aïn Benian ou Réghaïa, pour ne citer que celles-là, le flux des personnes ayant rejoint (ou tenter de le faire) la place du 1er Mai était impressionnant. Jusqu'à la fin de l'après-midi, hommes, femmes et enfants prenaient toujours part à la marche, au milieu de la foule, alors que les premiers arrivés, ceux ayant entamé la manifestation en début d'après-midi, commençaient à partir. Tous les parkings de la capitale étaient au complet. D'autres ont été improvisés. C'est le cas par exemple de la station de bus Aïssat Idir, occupé exclusivement par les voitures de ceux qui sont venus de loin pour manifester à Alger-Centre. Et il n'y avait pas seulement des immatriculations de la capitale, puisqu'il y avait des automobilistes venus de Sétif et Bordj Bou Arréridj qui, même s'il y avait des marches organisées dans leurs wilayas, ont voulu rejoindre Alger pour prendre part à la «grande manifestation». Si beaucoup se sont donc déplacés vers le centre de la capitale avec leurs véhicules, d'autres sont venus depuis les communes limitrophes à pied, parcourant plus de 20 kilomètres dans certains cas. «On est venu de Aïn Benian. On a démarré vers 13h pour arriver à la Grande-Poste à 16h. On est resté près d'une heure. Il nous était impossible d'avancer. Il y avait beaucoup de monde. Vers 17h, on a décidé de rentrer», nous dira l'un d'eux. Les manifestations d'Alger-Centre ont créé des bouchons monstres notamment sur les axes menant vers l'est d'Alger. C'était le cas sur la Moutonnière occupée par des milliers de manifestants qui n'avaient pas trouvé de moyen de transport pour rejoindre le centre d'Alger. Les trains et tramways étaient à l'arrêt depuis la matinée. Et la majorité des transporteurs privés n'ont pas travaillé. Une auto-organisation impeccable Même s'il n'y avait aucune structure partisane derrière ces manifestations, les nombreux Algériens qui ont décidé de marcher arrivaient quand même à s'auto-organiser. Venus de Boufarik, des manifestants étaient encadrés par certains d'entre eux qui veillaient au grain. «On était presque 6000 à démarrer de Boufarik très tôt le matin. On est venu à pied», nous dira l'un d'eux. D'autres ont préparé en groupe les banderoles et autres écriteaux qu'ils ont brandis durant la marche. Au niveau de certains points, notamment là où il y avait un cordon de sécurité qui interdisait des axes bien précis, il y avait toujours des jeunes qui faisaient en sorte qu'il n'y ait pas d'affrontements entre manifestants et policiers. Par ailleurs, des étudiants s'occupaient de ramasser les détritus laissés par les marcheurs, alors que certains médecins et infirmiers s'étaient chargés de l'assistance médicale. Jusqu'à 17h, rares ont été les incidents signalés. Au niveau de la place Audin, les policiers antiémeute avaient fermé le boulevard Mohammed V pendant un bon moment avant de céder le passage. Pendant ce temps-là, les manifestants n'ont pas tenté de forcer le barrage. «Je suis surpris par le caractère pacifique de ces marches. Ces jeunes, qui n'ont peut-être jamais pris part à une manifestation de la sorte, arrivent à s'organiser merveilleusement bien», dira un quinquagénaire venu manifester accompagné de ses deux enfants. Ainsi, globalement les manifestations de la capitale se sont déroulées dans le calme, hormis pour les échauffourées qui ont éclaté en fin de journée au niveau du Télémly ou du Palais du peuple lorsque des manifestants ont voulu forcer le passage vers El Mouradia. Plusieurs blessés ont été signalés. Jamais Alger n'a vécu un tel événement. La mobilisation était beaucoup plus importante que celle de vendredi dernier. Avant de quitter les lieux, des manifestants se sont donné rendez-vous pour vendredi prochain…