Dix ans après l'interdiction officielle d'extraire du sable prise par le ministère des Ressources en eau et le wali de Tizi Ouzou, la situation demeure inquiétante à oued Sebaou. La pollution par des déchets divers et l'extraction effrénée du sable continuent de provoquer des dégâts irréversibles à la nappe phréatique, alors que les eaux de surface encourent le risque de tarissement. En dépit de l'existence d'une batterie de textes protégeant cet écosystème, les pouvoirs publics s'avouent impuissants à mettre un terme à cette agression de l'environnement. Tout le long de ce fleuve qui s'étend sur une cinquantaine de kilomètres, des dégâts importants sont causés aux terres cultivables, aux ouvrages et aux installations des forages desservant la population. La direction locale de l'hydraulique met en avant le manque de moyens pour la protection et la surveillance de ce réceptacle d'eau qui alimente une grande partie de la population de la wilaya de Tizi Ouzou. On recense une soixantaine de forages hydrauliques, ainsi que des ouvrages électriques détruits suite aux trous profonds provoqués dans le lit de l'oued par les pelleteuses et autres machines utilisées par les pilleurs de sable. Les agents de la police des eaux se contentent de dresser des procès-verbaux à l'encontre des contrevenants pris en flagrant-délit d'extraction, mais ceux-ci renouent avec leur activité lucrative dès que les conditions le permettent. La police des eaux ne peut pas lutter efficacement contre la dégradation de l'oued Sebaou sans l'implication effective des autorités locales et des différentes directions de la wilaya, ont relevé des intervenants lors d'une rencontre sur les ressources hydriques organisée récemment à l'APW. Outre le pillage de sable et les eaux usées provenant de villages situés en amont, l'oued Sebaou est devenu depuis quelques années une immense décharge à ciel ouvert, entraînant ainsi un vrai risque pour la santé publique, en raison de la pollution qui peut affecter les stations de pompage existantes et la nappe phréatique. Selon des témoignages, de nombreuses communes se débarrassent de leurs ordures et de leurs eaux usées dans les affluents qui vont eux-mêmes se déverser dans l'oued Sebaou. Il y a lieu de noter aussi que la wilaya de Tizi Ouzou comptabilise 105 unités industrielles polluantes, dont les rejets, épurés ou non, atterrissent dans le Sebaou. Les espèces vivantes qui évoluent dans cette principale rivière de Kabylie sont menacées également d'extinction à cause de la détérioration de l'environnement immédiat. «Plusieurs espèces animales et végétales vivant dans ou à proximité de cette rivière ont disparu», alertent des militants écologistes. L'année dernière, une importante quantité de poissons morts flottant sur les eaux de la rivière de Sebaou ont été découverts à hauteur de Tadmait. Une catastrophe écologique n'est pas à écarter si rien n'est fait pour stopper cette pollution galopante qui fragilisera davantage ce milieu naturel, estiment des défenseurs de l'environnement.