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L'épouse de Me Serge Moureaux, responsable du collectif des avocats belges du FLN, nous a quittés : Hommage à Henriette Moureaux, «combattante pour l'indépendance de l'Algérie»
Henriette Moureaux, épouse de l'avocat Serge Moureaux, chef de file du Collectif des avocats belges du FLN durant la Guerre de Libération, nous a quittés vendredi 28 juin, avons-nous appris auprès de l'historien Paul-Emmanuel Babin, spécialiste du front belge de soutien à la cause algérienne et proche de la famille Moureaux. Henriette rejoint ainsi son époux deux mois à peine après la disparition de ce dernier, maître Serge Moureaux étant décédé le 25 avril dernier. Dans une annonce nécrologique émouvante, parue sur les colonnes du journal belge Le Soir, la famille de la défunte écrit : «Les familles apparentées et les proches ont la profonde tristesse de vous faire part du décès de Madame Henriette François, veuve de Monsieur Serge Moureaux, combattante pour l'indépendance de l'Algérie, secrétaire et soutien indéfectible, associée aux nombreux engagements de son mari. Femme d'amour, de lumière et de tendresse.» La même annonce indique qu'Henriette est «née à Etterbeek le 24 juin 1932, et décédée à Strud le 28 juin 2019». Les funérailles de Mme Moureaux ont eu lieu mercredi 3 juillet, au crématorium de Ciney, là même où avaient été célébrées celles de son compagnon de vie et de combat, le 30 avril 2019. Le couple Moureaux, faut-il le souligner, a apporté un précieux soutien à la cause algérienne durant la Guerre de Libération nationale. Henriette et Serge étaient très liés aux militants indépendantistes algériens, notamment Omar Boudaoud et Ali Haroun, deux figures de proue de la Fédération de France du FLN. Ils accueilleront même une réunion, chez eux, à Bruxelles, du Comité fédéral de la Fédération de France. Henriette était d'ailleurs très émue de retrouver Omar Boudaoud et Ali Haroun, à Alger, il y a deux ans. C'était à l'occasion du colloque international organisé à l'initiative de l'ambassade de Belgique le 29 octobre 2017 à la Bibliothèque nationale sous le titre : «Le Front du Nord. Des Belges et la Guerre d'Algérie (1954-1962)». En prenant la parole, Henriette confiait : «Pendant cinq ans, l'Algérie était au centre de notre vie de jeune couple», en parlant de son engagement et celui de son mari pour l'indépendance de notre pays. Henriette était manifestement aux anges d'avoir pu effectuer ce dernier «pèlerinage» à Alger, sa ville de cœur. Dans le message qu'il nous a envoyé pour nous annoncer la triste nouvelle, M. Babin nous dit : «Elle avait été touchée de revenir à Alger en 2017, où elle avait revu une dernière fois Ali Haroun, Omar Boudaoud et Arab Ainouz (ancien condamné à mort ; elle était la marraine de son fils Hakim).» «Elle a assuré des missions essentielles» Dans une note biographique établie par Paul-Emmanuel Babin pour les besoins du colloque d'Alger, on apprend qu'Henriette a grandi dans une famille de résistants. «Sa mère et sa sœur aînée ont été membres de la Résistance active pendant la Seconde Guerre mondiale», écrit l'historien. Il poursuit : «En 1956, elle se marie avec Serge Moureaux, alors jeune avocat. Son beau-frère, Marc De Kock, est le premier avocat en Belgique à prendre la défense des militants algériens.» «Henriette Moureaux a apporté un soutien indispensable à son mari alors qu'il animait le collectif des avocats de Bruxelles. Elle assurera des missions essentielles, comme la mise en place de la logistique de réunions des avocats des collectifs parisien et belge et même du Comité fédéral du FLN à leur domicile, le 26 août 1960, mais aussi l'hébergement clandestin de Titouche Abdelmajid (responsable du FLN pour la Belgique). Henriette Moureaux assiste son mari dans la prise en notes des dossiers au greffe, le port de plis du FLN en Allemagne, le transport de cadres au-delà des frontières et en Belgique vers les différents hébergements, tout comme elle véhicule plus exceptionnellement Jacques Vergès», détaille Paul-Emmanuel Babin. Et d'ajouter : «Lorsque le collectif des avocats se trouve menacé par des internements administratifs et que Maurice Courregé, Michel Zavrian et Jacques Vergès trouvent refuge en Suisse, les avocats algériens Mourad Oussedik et Abdessamad Benabdallah, venant d'être libérés des camps du Larzac et de Thol le 22 février 1960, sont hébergés par Henriette Moureaux, alors qu'ils sont toujours poursuivis pour »atteinte à la sûreté de l'Etat ».» Autre fait marquant : Henriette Moureaux «contribue à la préparation des colloques internationaux de Bruxelles, puis de Rome, avec l'avocat André Merchie». Ces colloques, organisés en mars 1961 (Bruxelles) et en février 1962 (Rome), vont peser dans la «reconnaissance juridique de la nation algérienne». Dans le message qu'il nous a adressé, l'historien assure en parlant du dernier séjour algérois d'Henriette Moureaux : «Quand elle est revenue d'Alger, elle a dit qu'elle avait eu tant de bonheur qu'elle pouvait partir tranquille.» Paul-Emmanuel Babin nous apprend également que parmi les dernières volontés exprimées par maître Serge Moureaux, «un bouquet de fleurs aux couleurs de l'Algérie». Les enfants d'Henriette et Serge ont fait en sorte qu'un autre bouquet, aux couleurs de notre pays, accompagne leur maman. Un geste qui témoigne, si besoin est, du profond attachement du couple Moureaux à l'Algérie jusqu'à leur dernier souffle. Henriette était certainement attentive, avec son cœur algérien, à l'immense espérance soulevée par le souffle du 22 février. Elle est d'ailleurs partie un vendredi, au 19e chapitre du hirak, à une semaine de la célébration du 57e anniversaire de l'Indépendance de son autre pays. Puisse-t-elle reposer en paix. Pensées reconnaissantes et nos sincères condoléances à ses enfants, Marianne et Pierre, et à toute sa famille.