Entamée le 17 novembre, la campagne électorale pour la présidentielle du 12 décembre ne semble guère susciter l'enthousiasme chez une grande partie de la population de la wilaya de Mascara. Les membres des directions de campagne des cinq candidats mènent, dans la discrétion la plus totale et dans des salles clairsemées, pour ne pas dire quasi-désertes, une campagne vidée de tout contenu. Sous un impressionnant dispositif sécuritaire, ce sont toujours les mêmes personnes qui assistent, certains d'un air timide, aux rares meetings et autres rencontres de proximité organisés dans une discrétion absolue, ici et là. Les discours politiques des uns et des autres n'intéressent nullement le public, comme si aucun événement électoral n'était prévu ! Les animateurs des meetings, dont des députés et autres élus des assemblées locales, parlent de tout et de n'importe quoi pour ne rien dire ! «Les candidats sont les résidus du système Bouteflika. C'est-à-dire qu'ils se ressemblent tous politiquement et ne vont pas nous apporter quelque chose de nouveau. C'est la raison pour laquelle de nombreux citoyens des localités de la wilaya n'accordent pas d'intérêt ni à aux discours vides et fades des candidats ni à la prochaine élection», nous confie Madani, un commerçant en électroménager à Mascara. Et d'ajouter : «Les gens veulent une justice libre pour rendre au peuple ses droits.» Par ailleurs, l'entourage des candidats à la présidentielle à Mascara encourage fortement la réticence d'une grande majorité de la population à adhérer à la démarche de réussir la campagne électorale pour le scrutin du 12 décembre. Les résidus du clan Bouteflika font fuir le citoyen quant à une éventuelle participation aux joutes électorales. «Depuis dix mois, les appels au changement radical d'un système politique qui a ruiné le pays et asservi le peuple n'ont pas cessé ! Mais les serviteurs du système refusent de s'éloigner et s'accrochent aux gens du pouvoir pour protéger leurs intérêts personnels. A Mascara, comme partout dans le pays, les mêmes individus et autres laudateurs, qui ont applaudi Bouteflika et ses collaborateurs durant deux décennies, ont fait leur apparition dans les directions de campagne des cinq candidats !» a déclaré Nasreddine, un activiste du hirak. Tant que les mêmes figures honnies sont toujours présentes sur la scène politique, il est impossible de convaincre la majorité de prendre part au processus électoral. «Les partisans des partis et autres organisations satellites du régime, qui ont mangé à tous les râteliers du pouvoir, doivent quitter la scène politique et nous laisser construire notre Algérie nouvelle», affirme un enseignant de l'université de Mascara. Depuis le début de la campagne électorale, le rejet de l'élection présidentielle du 12 décembre est un mot d'ordre qui fait l'unanimité à travers toutes les communes de la cité de l'Emir Abdelkader. «Les Mascaréens, à l'instar des millions d'Algériens, rejettent purement et simplement une élection organisée par les symboles d'un pouvoir frauduleux qui a pillé le pays», relate Benyamina, un homme d'affaires. Les panneaux censés accueillir les affiches des candidats sont, pour la plupart, vides. Rares sont les portraits des candidats qui y sont plaqués. Au chef-lieu de la wilaya, sur le boulevard Larbi Tounsi, une seule photo, celle de Azzedine Mihoubi, est collée sur l'unique panneau. Au quartier 936 Logements, les portraits de Ali Benflis et Abdelmadjid Tebboune sont présents sur le panneau. A la cité Benamara Abdelkader, le seul poster de Tebboune qui y était collé a été déchiré. Dans les quartiers populaires de la ville de Mascara et de Mohammadia, les affiches des candidats ne sont pas restées intactes plus de 24 heures ; elles sont vite déchirées ou hachurées, a-t-on constaté. A moins de dix jours du 12/12, rien n'est clair. Ce qui est sûr, c'est qu'une grande partie de la population est déterminée à aller jusqu'au bout de sa révolution pacifique contre le pouvoir.