L'armée arabe syrienne a, après d'âpres combats ayant duré deux mois, repris, au groupe terroriste autoproclamé Etat islamique, (EI) Deir Ezzor. «L'armée annonce avoir pris le contrôle total de la ville de Deir Ezzor», a indiqué hier la télévision d'Etat, citant des sources présentes dans cette cité. La veille, l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), une ONG proche de l'opposition, avait déjà annoncé la reprise de la ville par l'armée. L'agence de presse officielle Sana a rapporté, pour sa part, que la ville a été «entièrement libérée». D'après la télévision d'Etat, les unités d'ingénierie au sein de l'armée s'employaient hier à désamorcer les mines et autres engins explosifs dans les quartiers repris à l'EI. Avec la perte de cette importante ville, Daech est désormais privé de toutes les grandes villes qu'il contrôlait autrefois en Irak et en Syrie. Deir Ezzor est le chef-lieu de la province du même nom, riche en pétrole et frontalière de l'Irak, la dernière en Syrie où les éléments de Daech maintiennent une présence importante. Le groupe terroriste assiégeait depuis 2015 les forces gouvernementales et des civils dans le centre de la ville, ainsi qu'un aéroport militaire stratégique dans sa périphérie. A la suite de combats, les forces syriennes avaient pu conserver des quartiers dans deux enclaves de la cité, dans l'ouest et dans le sud. Les estimations de la population de Deir Ezzor, qui comptait 300 000 habitants avant la guerre, varient, mais les sources s'accordent pour dire qu'elle a sensiblement diminué. Selon l'ONU, plus de 90 000 personnes étaient autrefois assiégées par Daech dans les zones contrôlées par Damas. Le siège imposé par l'organisation terroriste a provoqué d'importantes pénuries alimentaires, une flambée des prix et limité l'accès aux soins. Les largages de vivres par le régime et l'ONU ont été également perturbés. Des militants signalent également des conditions humanitaires catastrophiques dans les secteurs tenus par l'EI, notamment depuis l'avancée de l'armée syrienne, qui a compliqué l'approvisionnement. Nourriture et matériel médical se sont raréfiés. Pénuries d'eau et coupures de courant. La province de Deir Ezzor fait actuellement l'objet de deux offensives distinctes visant l'EI. L'une est menée par l'Armée syrienne, appuyée par l'aviation russe, l'autre par les combattants kurdes et arabes des Forces démocratiques syriennes (FDS), soutenus par la coalition internationale dirigée par les Etats-Unis. Face à ces offensives, le groupe terroriste ne tient plus aujourd'hui qu'un peu plus de 35% de la province, selon l'OSDH. Ses éléments se sont retranchés dans une ville de moindre importance, Boukamal, à la frontière irakienne. L'armée syrienne, qui contrôle 32% de la province, est désormais à 40 km de Boukamal. L'EI contrôle encore des villages et localités et au moins un champ pétrolier dans la Syrie en guerre, selon l'OSDH. Est-ce maintenant la fin de Daech ? Sa perte de Deir Ezzor ne signifie ni sa défaite définitive ni son éradication, préviennent experts et officiels. Ces derniers estiment que la conquête par l'armée syrienne, annoncée hier, de son dernier centre urbain va pousser l'EI à redevenir un mouvement terroriste clandestin après avoir échoué à tenir et gouverner ce qu'il a appelé son «califat». Le plus probable est que le groupe va se transformer à la fois en guérilla sur le terrain, dans les zones peuplées de musulmans sunnites que ni Baghdad ni Damas ne parviendront jamais à totalement contrôler, en foyers insurrectionnels dans d'autres pays et en «cyber-califat» qui continuera par sa propagande, comme ce fut le cas mardi à New York, à inspirer des attentats dans le monde entier. Aniss Z.
