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Cinéma : La promesse de l'aube Le cinéma renaît malgré la disparition progressive des salles, l'absence d'une véritable industrie et d'une formation adéquate
Le constat est triste, alarmant, enrageant. La disparition progressive des salles de cinéma fait souvent les choux gras des gazettes vouées à jouer les Cassandre (l'auteure de ces lignes compris) ainsi que des adeptes du «c'était mieux avant» qui pleurent tout au long des fils d'actualité des réseaux sociaux. Néanmoins, à trop regretter le temps révolu et le cinéma de «la belle époque», nous risquons néanmoins de rater les convulsions de ce cadavre exquis qui pourrait revenir à la vie, défiant toutes les logiques. Bien sûr, les transformations des anciennes salles obscures (en salle de sport à Tizi Ouzou, en annexe administrative à Koléa ou en échoppe de laine de mouton à Souk Ahras), sont des plus malencontreuses. Evidemment, l'absence d'une véritable industrie cinématographique (ainsi que de toutes les industries, par ailleurs), de réseaux de distribution et d'une véritable école représentent un frein à l'évolution du secteur. Bien entendu, il y a là tous les ingrédients d'un grand gâchis ou d'un mauvais film où le héros déçoit par tant de désengagements. C'est que dès les premières années d'indépendance, et pour gérer les 458 salles de cinéma, un Centre national du cinéma algérien (CNCA) était créé, dans l'espoir de renflouer les caisses des collectivités locales grâce aux recettes de l'exploitation cinématographique. Les choses ne se sont pas déroulées ainsi et la situation a été aggravée par la dissolution des entreprises publiques de cinéma. Les années de violence ont fini par y apporter le coup de grâce. Mais à trop vouloir rabâcher tout cela, nous n'aurions pas vu les efforts consentis par une nouvelle génération de cinéphiles, qui eux n'ont pas connu les années fastes des Cinémathèques mais qui pourtant, au sein de quelques cinés-clubs et dotés d'une belle énergie, se réunissaient autour d'une œuvre pour en décortiquer les images, les sons et les poésies qui s'en dégageaient. De nombreux ciné-clubs résistent malgré toutes les difficultés pour faire partager la passion du grand écran, à l'exemple de Cinuvers à Alger, de l'association Project'heurts à Béjaïa, Cinéfeel à Sétif, ou le dynamique ciné-club de Mascara. Aussi est-il important de saluer le courage de deux jeunes réalisateurs (Aïssa Ben Saïd et Mohamed Slimani) qui viennent de créer un festival du court métrage à Souk Ahras, dont la première édition, tenue il y a quelques jours fut un succès. Non, nous ne pleurerons pas la mort du cinéma algérien, car bien que celui-ci n'a pas – pour l'instant – d'identité propre, des réalisateurs algériens s'affirment, entretenant les braises d'un renouveau cinématographique. Compte tenu du contexte, chaque film relève sinon du miracle, du moins d'une victoire. C'est que les mécanismes algériens ont parfois des logiques économiques que la logique elle-même a du mal à suivre. La situation est telle que des films algériens existent sans les salles censées les projeter. Et que, dans une énième incohérence administrative, ce sont ces salles moribondes qui sont censées financer le cinéma par le biais du Fdatic. Qu'à cela ne tienne, nous pouvons néanmoins compter sur une chose : l'amour fou des Algériens pour le cinéma. Car même si les salles ont été désertées, il y a une vitalité cinéphage incroyable chez les Algériens, consommant des films à travers le téléchargement, le DVD, le streaming. Plus que jamais, il est essentiel de venir en aide à ce grand patient, qui fait preuve d'une incroyable résistance, malgré de visibles signes de souffrance. Il faut agir vite, avant qu'il ne soit trop tard.