Le tribunal de Tokyo a approuvé vendredi la détention de Carlos Ghosn pendant dix jours, au lendemain de la nouvelle arrestation de l'ancien président de Nissan pour des soupçons d'enrichissement personnel au détriment du constructeur automobile japonais. Carlos Ghosn sera ainsi détenu jusqu'au 14 avril, son appel contre cette nouvelle incarcération ayant été rejeté. Les procureurs pourront ensuite demander une détention supplémentaire de 10 jours, après quoi ils devront l'inculper ou le libérer. Le parquet de Tokyo soupçonne l'ancien PDG de Renault d'avoir violé ses obligations professionnelles et d'avoir causé à Nissan des pertes financières de cinq millions de dollars (4,45 millions d'euros) entre décembre 2015 et juillet 2018. Carlos Ghosn a qualifié jeudi son arrestation de "révoltante et arbitraire" et a demandé l'aide du gouvernement français. Un responsable du bureau des procureurs de Tokyo a justifié cette arrestation par le souci d'éviter des destructions de preuves. L'ancien dirigeant avait été remis en liberté le 6 mars contre le versement d'une caution de neuf millions de dollars après 108 jours passés en détention. Sa nouvelle arrestation, décrite par la télévision publique NHK comme très inhabituelle pour une personne remise en liberté sous caution près d'un mois auparavant, serait en lien avec des paiements suspects effectués à un partenaire commercial de l'alliance Renault-Nissan à Oman, au Moyen-Orient. Le groupe Renault examine également les paiements effectués par Carlos Ghosn à cette même société dans le sultanat d'Oman. Reuters a appris lundi auprès de deux sources proches du dossier que Renault avait alerté la justice française après avoir découvert l'existence de paiements suspects à ce distributeur commercial local. Nissan avait établi dès janvier que sa propre filiale régionale avait versé au distributeur omanais des paiements douteux de plus de 30 millions de dollars. Carlos Ghosn fait jusqu'ici l'objet de poursuites au pénal pour avoir omis de déclarer environ 82 millions de dollars (environ 73 millions d'euros) de salaire et pour avoir transféré temporairement à Nissan des pertes financières personnelles durant la crise financière mondiale. Il nie ces accusations, pour lesquelles il encourt une peine maximale de 10 ans de prison et une amende de 10 millions de yens (79.783 euros).
Ghosn demande l'aide du gouvernement français Carlos Ghosn a réaffirmé son innocence et a appelé à l'aide le gouvernement français après avoir été de nouveau arrêté par la justice japonaise qui l'accuse de malversations lorsqu'il était à la tête du constructeur automobile japonais Nissan. "Je suis combatif, je suis innocent, c'est dur, il faut le savoir et je fais appel au gouvernement français pour me défendre, pour préserver mes droits en tant que citoyen pris dans un engrenage incroyable" a-t-il déclaré dans un entretien diffusé jeudi par TF1 et LCI. "Il y a beaucoup de mensonges dans ce qui a été dit et ces mensonges sont en train de se répéter les uns après les autres. (...) Il y a un acharnement qui n'est pas récent, qui a démarré le jour de mon arrestation, c'est-à-dire le 19 novembre 2018, il ne s'est jamais arrêté", a-t-il ajouté. "Il y a eu une démolition systématique et on sait très bien quelle en est l'origine. Il y a quelques personnes à l'intérieur de Nissan qui sont à l'origine de ça. Ils bénéficient de complicités aussi à l'extérieur de Nissan", a-t-il affirmé. L'ancien président de Nissan et ex-PDG de Renault a de nouveau été arrêté jeudi matin par les procureurs de Tokyo, qui l'accusent d'avoir violé ses obligations professionnelles et cherché à s'enrichir personnellement au détriment du constructeur japonais. Selon Renault, une enquête interne a par ailleurs mis en lumière des pratiques contestables et dissimulées de la part de Carlos Ghosn, qui ont conduit le conseil d'administration à préconiser la suppression du salaire variable de l'ex-PDG. Lors d'une conférence de presse, l'avocat de Carlos Ghosn a déclaré que son arrestation était inattendue et qu'il ferait appel de cette nouvelle arrestation. Il a précisé que le parquet de Tokyo avait confisqué à cette occasion des documents dont Carlos Ghosn avait besoin pour préparer son procès. "L'épouse de Ghosn se trouvait avec lui lorsqu'il a été arrêté, et ils lui ont confisqué son passeport et son téléphone portable. Sa femme n'est pas une suspecte, cela est impardonnable", a ajouté l'avocat devant le club japonais des journalistes étrangers. Junichiro Hironaka a également estimé que cette nouvelle mise en détention était destinée à empêcher son client de s'exprimer librement. Dans un message diffusé mercredi sur un compte Twitter identifié comme appartenant à Carlos Ghosn, ce dernier annonçait qu'il allait faire une déclaration publique le jeudi 11 avril. Son avocat a déclaré qu'il allait publier une vidéo de la déclaration que son client envisageait de faire à cette occasion. Interrogé sur BFM TV, le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire s'est borné à déclarer que Carlos Ghosn bénéficiait de la présomption d'innocence et de la protection consulaire. Il a ajouté que l'essentiel pour le gouvernement français était de garantir l'avenir de Renault, estimant que le constructeur était entre de bonnes mains depuis la nomination de Jean-Dominique Senard, ex-président de Michelin) à sa tête, en tandem avec Thierry Bolloré, le directeur général.
L'enquête interne dénonce les pratiques de Ghosn La mission de vérification de la direction de l'éthique de Renault a mis en lumière des pratiques contestables et dissimulées de la part de Carlos Ghosn, qui ont conduit le conseil d'administration à préconiser la suppression du salaire variable de l'ex-P-DG. "Des dépenses engagées par l'ancien Président-Directeur Général sont source de questionnements, en raison des pratiques contestables et dissimulées dont elles procèdent et des atteintes aux principes éthiques du groupe qu'elles impliquent, notamment dans la gestion des conflits d'intérêts et la protection des actifs du groupe", ont déclaré les administrateurs de Renault, réunis mercredi, dans un communiqué. Fort de ce constat, le conseil va proposer à l'assemblée générale des actionnaires de supprimer le reliquat de 224.000 euros de salaire variable de Carlos Ghosn au titre de 2018. Le groupe avait déjà décidé en février de ne verser à son ancien PDG ni d'indemnité liée à sa clause de non-concurrence de deux ans, ni les actions qui lui avaient été attribuées de 2015 à 2018 car il n'avait pu exercer ses fonctions à partir de novembre à cause de son arrestation au Japon sur des présomptions de malversations financières chez Nissan, qu'il dément. Concernant la retraite chapeau de Carlos Ghosn - 770.000 euros par an jusqu'à son décès - les administrateurs ont estimé qu'aucune rente ne pourra lui être versée car les conditions de départ du P-DG ne correspondent à aucun des deux cas d'ouverture de ce régime. Le conseil d'administration a également confirmé avoir porté à la connaissance de la justice française des éléments d'alerte relatifs à des versements relatifs effectués au profit de l'un des distributeurs de Renault au Moyen-Orient. Reuters avait rapporté lundi ce signalement au parquet après la découverte par le constructeur de paiements suspects à un partenaire commercial de Renault-Nissan à Oman, au Moyen-Orient.
Ghosn promet de "dire la vérité" Selon le conseil, l'audit conjoint de Renault et Nissan sur l'entité néerlandaise de l'alliance, Renault-Nissan BV, a lui aussi fait apparaître des dépenses, susceptibles d'atteindre plusieurs millions d'euros depuis 2010, qui soulèvent "de sérieux questionnements" quant à leur conformité. Il demande aux vérificateurs d'achever leur travail dans les meilleurs délais et à la direction de Renault de se rapprocher de Nissan pour remédier aux déficiences découvertes par l'audit. Après l'éclatement de l'affaire Ghosn, Renault avait cherché dans un premier temps à rester en dehors de l'enquête lancée par Nissan, qui avait démis son président dans la semaine qui a suivi son arrestation. Mais la détention du P-DG au Japon ne cessant de se prolonger, le groupe au losange avait fini par le remplacer en janvier par un président - Jean-Dominique Senard, également président de Michelin - et un directeur général. Jean-Dominique Senard s'est vu confié comme mission première de restaurer la confiance au sein du groupe et d'en améliorer la gouvernance pour tourner la page de l'ère Ghosn. Le conseil d'administration de Renault a lui aussi tourné une page importante mercredi en prenant acte de la décision de Carlos Ghosn de démissionner de son mandat d'administrateur à l'AG du 12 juin. Deux autres membres - Philippe Lagayette et Cherie Blair, dont les mandats arrivent à échéance - ne seront pas renouvelés. Le conseil, qu'Annette Winkler, ancienne directrice de Smart, devrait pour sa part rejoindre, ne comptera donc plus que 18 membres, contre 20 jusqu'à présent. Depuis le Japon, où il a été libéré sous caution début mars après plus de 100 jours de détention, Carlos Ghosn a posté mercredi un message sur un compte Twitter qui vient d'être créé pour annoncer qu'il allait "dire la vérité" lors d'une conférence de presse le 11 avril. Plusieurs médias japonais rapportent de leur côté que la justice nippone prépare un nouveau dossier d'accusation contre l'ancien dirigeant de Renault et de Nissan. L'avocat de Carlos Ghosn a précisé n'avoir reçu aucune nouvelle demande de la part du parquet de Tokyo.
Le conseil veut annuler la retraite et le variable de Ghosn Le conseil d'administration de Renault a décidé mercredi de supprimer la retraite annuelle de 770.000 euros à laquelle son ex-PDG Carlos Ghosn a fait valoir ses droits et de recommander aux actionnaires de rejeter la partie en numéraire de son salaire variable de 2018, ont dit à Reuters trois sources au fait du dossier. Renault avait déjà décidé en février de ne verser à Carlos Ghosn ni d'indemnité liée à sa clause de non-concurrence de deux ans, ni les actions qui lui avaient été attribuées de 2015 à 2018, le P-DG n'ayant pu exercer ses fonctions à partir de novembre à cause de son arrestation au Japon sur des présomptions de malversations financières. Le conseil, qui s'est réuni mercredi, va aussi recommander aux actionnaires de voter, à l'assemblée générale du 12 juin, contre le reliquat en numéraire du salaire variable de Carlos Ghosn au titre de 2018, soit 224.000 euros, ont ajouté deux sources. Les administrateurs ont également approuvé plusieurs changements dans la composition du conseil et la réduction du nombre de sièges de 20 à 18.
L'avocat dit n'avoir reçu aucune nouvelle demande du parquet L'avocat de Carlos Ghosn a déclaré mercredi n'avoir reçu aucune nouvelle demande de la part du parquet de Tokyo, après des informations du journal Yomiuri et d'autres médias selon lesquelles la justice japonaise prépare un nouveau dossier d'accusation contre l'ancien dirigeant de Nissan et de Renault. Junichiro Hironaka a également dit à la presse qu'un tweet mercredi sur le compte Twitter de Carlos Ghosn nouvellement créé ne contrevenait pas aux termes de la libération sous caution de son client, qui excluent l'utilisation d'internet. Carlos Ghosn s'est engagé à "dire la vérité" lors d'une conférence de presse qui sera organisée la semaine prochaine, dans un message posté en anglais et en japonais sur le compte Twitter @carlosghosn créé ce mois-ci. Ce message a été posté quelques heures après les informations du Yomiuri.