Samsung Electronics devrait annoncer vendredi un bénéfice divisé par deux au deuxième trimestre en raison notamment du recul des ventes de puces mémoire à Huawei, qui accentue les pressions sur les prix. Lors de la publication de ses résultats préliminaires, le géant sud-coréen devrait faire état de son plus faible bénéfice d'exploitation trimestriel en près de trois ans, sans perspective de reprise immédiate, alors que le secteur continue à pâtir d'une offre excédentaire sur fond de ralentissement des entreprises technologiques, estiment des analystes. Le bénéfice d'exploitation sur la période avril-juin devrait ainsi avoir chuté de 60% sur un an à 6.000 milliards de wons (4,5 milliards d'euros), selon le consensus Refinitiv SmartEstimate, basé sur les estimations de 29 analystes. Le premier fournisseur mondial de mémoires DRAM et NAND est également le numéro un des Smartphones, marché où il est confronté à la concurrence de son client Huawei, deuxième acteur du secteur. Les entreprises internationales ont été contraintes de limiter leurs relations avec Huawei en raison des sanctions imposées par Washington, qui soupçonne les produits du groupe chinois de représenter une menace en termes de sécurité. "La quantité de puces dont Huawei aura besoin à l'avenir est un facteur décisif pour l'évolution des prix", souligne Jay Kim, analyste chez Sangsangin Investment & Securities. "Comme peu d'acteurs peuvent se substituer à Huawei pour acheter des puces, Samsung est contraint de baisser les prix."
Samsung pourrait aussi profiter des déboires de Huawei Si la contraction des livraisons de puces mémoire à Huawei a pesé sur le bénéfice de Samsung, son activité de Smartphones devrait en revanche avoir profité de la chute des ventes de combinés du groupe chinois à l'étranger. En dépit de cette baisse, qui pourrait atteindre jusqu'à 40%, Huawei conserve sa place de numéro deux grâce à son marché intérieur. Si les Etats-Unis maintiennent leurs sanctions, Samsung pourrait vendre 37 millions de Smartphones supplémentaires par an, selon Song Myung-sup, analyste chez HI Investment & Securities Néanmoins, les puces représentent plus de deux tiers des bénéfices de Samsung et la saturation du marché des Smartphones et le recul de la demande des centres de données ont entraîné une baisse des prix. Les prix des DRAM ont peu de chance de rebondir au second semestre, relève Avril Wu, analyste chez Trend Force. En outre, ajoute-t-elle, Samsung aura des difficultés à écouler ses stocks avant le premier semestre 2020. Comme les grands groupes technologiques, Samsung est également une victime collatérale de la guerre commerciale que se livrent Washington et Pékin. Il pourrait également pâtir des restrictions japonaises sur les exportations vers la Corée du Sud de composants de haute technologie utilisés dans les puces et les Smartphones, une mesure de représailles contre les demandes sud-coréennes d'indemnisation relatives à la Seconde Guerre mondiale, qui, selon Tokyo, ont été réglées il y a plusieurs décennies. En avril, Samsung a déclaré s'attendre à une reprise des ventes de Smartphones et de puces au second semestre. Son concurrent américain, Micron Technology a dit également anticiper une reprise de la demande plus tard cette année. "Les bénéfices des fabricants de puces mémoire se redresseront, mais la reprise ne sera ni rapide ni spectaculaire", prédit Song Myung-sup. Samsung publiera ses résultats définitifs dans le courant du mois de juillet.
Mise en examen en France pour pratiques trompeuses La filiale française du géant coréen de l'électronique grand public Samsung, Samsung Electronics France(SEF), a récemment été mise en examen à Paris pour pratiques commerciales trompeuses, a déclaré mercredi l'ONG Sherpa. Sherpa et une autre organisation non gouvernementale, Action Aid France-Peuples solidaires, avaient déposé plainte avec constitution de partie civile le 25 juin 2018 auprès du tribunal de Paris contre SEF et sa maison-mère en Corée. Elles demandent que soit sanctionné un "écart inacceptable" entre les engagements éthiques dont Samsung a fait un argument commercial et des violations présumées, dénoncées par d'autres ONG, dont China Labor Watch (CLW), des droits des travailleurs dans ses usines de Chine, du Vietnam et de Corée. Après le classement sans suite de deux précédentes plaintes, Sherpa et Action Aid France, qui se donnent pour objectif la défense des victimes de crimes économiques, ont finalement obtenu la mise en examen de SEF le 17 avril dernier, précise Sherpa dans un communiqué publié mercredi. "C'est la première fois en France qu'il est reconnu par un magistrat instructeur que les engagements éthiques pris par une entreprise sont susceptibles de constituer des pratiques commerciales qui engagent, à ce titre, leur émetteur", déclare cette ONG dans ce communiqué. Contacté, le parquet n'a pas confirmé dans l'immédiat. "A l'heure où les grandes multinationales s'affirment de plus en plus co-responsables du sort de la planète (...), il est essentiel que puissent être sanctionnées les communications éthiques quand elles n'ont pas d'autre ambition que de séduire le consommateur" tout en tolérant des comportements "absolument contraires" à ces engagements, renchérit le fondateur de Sherpa et avocat William Bourdon. Dans un communiqué, Samsung s'est défendu d'avoir des pratiques commerciales trompeuses. "Nous considérons qu'il est de notre responsabilité de veiller à ce que Samsung Electronics, ses fournisseurs et sous-traitants suivent les meilleures pratiques relatives aux conditions de travail et à la protection de l'environnement ainsi qu'au respect des règlementations locales", dit l'entreprise. "Ainsi, lorsqu'un problème potentiel est identifié, nous menons une enquête et, s'il est avéré, nous prenons les mesures nécessaires pour corriger la situation." "S'agissant de la plainte déposée contre Samsung Electronics en France, nous en contestons le bien-fondé, mais nous ne pouvons faire aucun autre commentaire dans le cadre d'une procédure en cours", ajoute le communiqué. Selon CLW, basée à New York, et des ONG coréennes, les principes proclamés par Samsung sont battus en brèche par les pratiques du groupe - emploi de jeunes de moins de 16 ans, conditions de travail "incompatibles avec la dignité humaine" et horaires abusifs dans des usines où sont notamment fabriqués des Smartphones. L'ONG coréenne Sharps (Supporters for the health and rightsof people in the semiconductor industry) évoque pour sa part des cas d'empoisonnement par des substances toxiques utilisées dans ces usines, comme le benzène et le méthanol. Selon Sherpa, Sharps aurait répertorié au moins 465 cas de maladies incurables causées par ces produits chez des ouvrières et des ouvriers et 135 morts suspectes.