Souk Ahras: le ministre de la Justice insiste sur la fourniture de services de qualité aux citoyens    Médiature de la République: de nouvelles plateformes pour une meilleure prise en charge des préoccupations des citoyens    Plus de 50 % des périmètres agricoles du pays raccordés au réseau électrique    35 nouveaux bus au profit d'Adrar    De profondes réformes s'imposent pour devenir un pays émergent    L'Algérienne des eaux à Mostaganem Perturbation dans l'alimentation en eau potable dans les 32 communes    Boughali rencontre à Mascate le Vice-Premier ministre omanais chargé des relations et de la coopération internationale    Génocide à Ghaza : Manifestation en République Tchèque    « L'Occident s'est engagé sur la voie du suicide collectif »    « C'est Israël qui a attaqué l'Iran avec son consulat à Damas, il y a eu 16 morts dans la frappe aérienne »    La provocation de plus !    A force de jouer avec le feu, le pyromane de Rabat se brûle les doigts...    Des opérations d'aménagement et de réalisation de routes à Souaflia    Moutons importés de Roumanie    1.785 comprimés de Prégabaline interceptés et deux suspects arrêtés    Réception en l'honneur des artistes    Une affluence remarquable    Mouloudji préside le lancement d'une formation pour les cadres de la DGSN    L'amphithéâtre du ministère de la Santé baptisé du nom du défunt moudjahid Pierre Chaulet    Le président de la République regagne Alger    L'Algérie participe au 38e Salon international du livre de Tunis    Nécessité d'avoir des médias forts pour relever les défis auxquels fait face l'Algérie    Le président de la République quitte Tunis après sa participation à la Réunion consultative regroupant les dirigeants de l'Algérie, de la Tunisie et de la Libye    Championnat d'Afrique ITF U16: un bilan en deçà des attentes pour les sélections algériennes    Championnat d'Afrique des clubs de handball : la JSE Skikda bat l'OM Annaba et se rapproche du dernier carré    Oualid examine avec le DG de l'OIT les moyens de renforcer la coopération bilatérale    Conseil de la nation: publication spéciale dédiée au discours du président de la République devant le Parlement le 25 décembre 2023    Témoignage. Printemps Amazigh. Avril 80    Les statuts des corps médical et paramédical permettront au secteur de recouvrer sa place pionnière    Tizi-Ouzou : arrêt momentané de l'exploitation de la télécabine pour maintenance    La classe politique bouge    Les plans subversifs du mouvement terroriste ''Rachad'' et ses liens avec le terrorisme international dévoilés    Coupe d'Algérie Mobilis 2024 : Désignation des arbitres des demi-finales    Accidents de la route: 36 morts et 1654 blessés en une semaine    L'entité sioniste empêche la rapporteuse de l'ONU Francesca Albanese d'entrer en Palestine    Tournoi international ITF de tennis juniors: coup d'envoi de la 15e édition à Tlemcen    Assurer un climat d'affaires sain, serein et stable        L'ORDRE INTERNATIONAL OU CE MECANISME DE DOMINATION PERVERSE DES PEUPLES ?    Le Président Tebboune va-t-il briguer un second mandat ?    L'imagination au pouvoir.    Le diktat des autodidactes    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    El Tarf: Des agriculteurs demandent l'aménagement de pistes    Ils revendiquent la régularisation de la Pension complémentaire de retraite: Sit-in des mutualistes de la Sonatrach devant le siège Aval    Coupe d'afrique des nations - Equipe Nationale : L'Angola en ligne de mire    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Ces «harragas» qui vous empêchent de dormir !
Publié dans Le Soir d'Algérie le 24 - 01 - 2019

La «harga» ou émigration clandestine par la mer, je connais ! Et pas d'aujourd'hui ! Cela fait des années que j'alterne billets d'humeur, articles, reportages, chroniques et même roman (Le rêve sarde - 2008) sur ce qui n'était pas encore un phénomène social majeur. Cela fait des années que j'anime des conférences sur ce thème et, à chaque fois, j'essaye d'aller à contre-courant des idées reçues, des fausses certitudes gouvernementales et des propagandes mensongères d'une partie de l'opposition. Chacun voit les faits en fonction de son positionnement sur l'échiquier politique et non pour appréhender la complexité du sujet et lui trouver des solutions appropriées.
S'ils voulaient réellement travailler dans leur pays et si la recherche d'un boulot était leur objectif premier, les jeunes «harragas» accepteraient n'importe quelle tâche. Or, et à titre d'exemple, durant la campagne des moissons-battages, il n'est pas aisé de recruter des ouvriers agricoles et quand vous les trouvez, il faut casquer cher et offrir un repas royal par jour de travail ! Le grand problème de notre agriculture est la main-d'œuvre et cela est connu et visible partout. Dans les villes, les jeunes fuient les tâches pénibles ! Un chômeur sans aucune qualification sauterait sur la première occasion pour gagner de l'argent honnêtement.
J'ai connu beaucoup de «harragas» et je les ai bien observés. Ils ne ressemblent pas à l'image que l'on se fait du jeune homme famélique et en haillons qui va là-bas pour se nourrir et approvisionner les siens. Leur condition sociale n'a rien à envier à celle des autres Algériens et il y en a même, depuis un certain temps, qui se recrutent dans la classe aisée. J'ai cité récemment l'exemple de tous ces jeunes de mon quartier qui habitent des villas et des promotions huppées et dont le niveau de vie ferait pâlir un... gilet jaune et qui se sont retrouvés entassés dans une petite barque, au grand dam de leurs parents qui ne savaient plus à quel saint se vouer. Aujourd'hui, le quartier est triste car tous ces visages juvéniles qui l'habillaient de joie et de vie ont disparu ! Alors, pourquoi émigrent-ils ?
Je crois que les vieux qui gouvernent ce pays font toujours l'erreur de croire qu'il suffit d'offrir des logements et des crédits aux chômeurs pour colorer la vie des Algériens d'insouciance et d'espoir. Non, il nous manque un grand projet en lequel chacun se reconnaîtrait, qui serait motivant pour la majorité et mobilisateur pour tous car à la mesure de la grandeur de ce pays. Cette grandeur ne se calcule pas seulement en kilomètres carrés mais se mesure aussi par les immenses richesses matérielles et humaines de l'Algérie. Les jeunes fuient le pays parce qu'il refuse de s'assumer dans ce qu'il a de superbe et qu'il tourne le dos à son destin majeur, fuyant les grands boulevards de la puissance et de l'élégance pour s'engouffrer dans les petites ruelles de l'impuissance et de la banalité.
L'autre raison est que l'on oblige ces jeunes à vivre comme des vieux ! La religiosité outrancière et expansive qui fait ressembler certaines de nos régions aux territoires de Daesh (j'y vis !) assombrit les horizons de ces jeunes, inhibe leur potentiel de créativité et obscurcit leur existence. Le poids des rites importés tels que la soumission au salafisme et que l'on confond avec l'Islam, écrase littéralement nos propres traditions et étouffe nos us et coutumes, nous imposant un style de vie qui, parce qu'il n'est pas à nous, nous enferme dans un carcan morbide fait de renoncements, de déni de soi et d'inconstance intellectuelle.
Les musulmans américains portent des jean's et écoutent du rock alors que les Bosniaques s'habillent comme leurs aïeuls et continuent de danser au rythme de leur musique ancestrale. On peut en dire autant de tous les peuples musulmans de la planète, sauf pour le peuple algérien qui abandonne ses habits, ses arts, ses langues régionales, ses musiques, ses us et coutumes au profit d'un style de vie importé ! Heureusement, pas partout !
Les jeunes ont besoin de vivre comme des jeunes. Ce n'est pas normal qu'ils soient, dans une grande partie du territoire national, au même niveau que les habitants vivant sous le règne des Talibans ou de Daesh ! Ils n'ont plus de cinémas, plus de concerts de musique (interdits par les prieurs de 20 heures qui occupent les espaces dédiés aux concerts), plus de théâtre, plus de discothèque, plus d'espaces de liberté... L'Algérie a fermé les maisons closes et la majorité des lieux de loisirs et l'ordre intégriste y règne un peu partout, sauf en quelques îlots épargnés par la vague obscurantiste qui a tout tari sur son passage. Les gendarmes cherchent des bouteilles de bière dans les barrages ! Les jeunes partent ailleurs non pas pour se nourrir mais pour vivre comme des jeunes. Tout simplement. La religion est un choix personnel libre et volontaire. On ne peut l'imposer par la force !
Une autre raison fait que les jeunes veulent partir coûte que coûte : c'est la grande injustice qui règne dans notre pays. Tout est fait sur mesure pour les enfants des nantis et de la nomenklatura. Par le jeu des connaissances, de la puissance de l'argent ou du pouvoir, par la corruption aussi, des privilégiés vivent comme des pachas et bénéficient de tous les avantages alors que la grande masse des jeunes est écrasée par l'arbitraire et la répression. Et puis, pourquoi parler seulement de cette «harga»-là et occulter toutes les autres ? Nos dirigeants se soignent à l'étranger aux frais de la princesse, alors que nous mourons dans les hôpitaux de la misère. J'évoque souvent des situations qui me concernent personnellement ! Pourquoi je cite ces exemples ? Je ne suis pas un éditorialiste qui parle dans le vide. Je suis un chroniqueur qui a pris pour habitude d'évoquer des faits vécus, réels et palpables pour livrer au lecteur les fragments d'une vie algérienne pas toujours rose, faite aussi de douleurs et de larmes. Ce qui n'empêche pas, malgré tout, l'espoir de continuer à pousser dans ma tête rebelle !
Quand je parle de «harga», je ne le fais pas en me basant sur les rapports et les graphiques ; je n'écoute pas les politiques mythomanes, ni les économistes enfermés dans leurs théories, ni les autres experts englués dans le magma d'un verbiage qui les place toujours d'un côté ou de l'autre de la vérité. Et je le dis comme je l'ai entendu de la bouche de cette mère éplorée qui, un jour, est venue me supplier pour l'aider à sauver son second enfant qui s'apprêtait à suivre le chemin de l'aîné... «Sauvez-le de la barque de la mort, je vous en supplie !» Que demandait ce jeune ? Un stage exigé par le centre de formation professionnelle de Oued Kouba et qui devrait être un droit et non un privilège via des connaissances ! Un ami sénateur m'a aidé à le faire embaucher au port de Annaba. A la fin du stage, il fut chassé de son poste et il lorgne de nouveau vers la mer... Le port s'en fout des enfants qui se jettent dans la Méditerranée !
Je parle de la «harga» comme j'ai entendu parler un jeune que j'avais présenté à l'envoyé spécial du Wall Street Journal venu me voir à Annaba pour en savoir plus sur le phénomène. J'en parle comme j'entends parler ces dizaines de jeunes que je rencontre sur les lieux de départ et qui me supplient de ne pas les vendre à la "Houkouma" ! Je n'ai rien d'autre à faire que de leur souhaiter bonne chance et de lever les yeux vers le ciel pour qu'il calme les vagues et adoucisse le climat, notamment au moment de l'accès aux eaux internationales, théâtre des tempêtes les plus violentes.
Enfin, pourquoi ne pas parler de la harga des enfants de nos responsables qui vivent, étudient ou travaillent à l'étranger ? Faut-il en vouloir à tous ces jeunes qui veulent suivre l'exemple de ces braves fils de famille, ces privilégiés haut de gamme qui ne reviendront ici que pour grossir les fortunes de leurs clans ou succéder à papa dans les arcanes du pouvoir ? Dites-nous aussi un mot sur la harga de tous ces ministres une fois déchargés de leurs tâches gouvernementales. Pourquoi ne restent-ils pas avec nous ? Et qui nous dit que, demain, ces belles têtes qui discourent à la télévision sur leur amour de l'Algérie n'abandonneront-ils pas, eux aussi, l'Algérie pour ce là-bas couru par les harragas ?
Non, ce n'est pas une histoire de chansons et de réseaux sociaux. Vous vivez un cauchemar qui est l'expression la plus significative de vos échecs. Cet exode ne s'arrêtera pas. Cette jeunesse qui saute dans la première barque veut simplement donner du sens à une vie qui a n'a plus de sens ici...
M. F.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.