Pour avoir osé se prononcer en faveur de l'interdiction de la prière à l'heure des cours et dans les enceintes scolaires, Nouria Benghabrit se trouve aujourd'hui face à une croisade ravivant de bien tristes souvenirs. Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Tout a commencé il y a quelques jours lorsqu'une nouvelle affaire liée aux pratiques religieuses éclate à Paris. Cette fois, elle concerne cependant l'Ecole algérienne de Paris où une lycéenne a été suspendue pour avoir quitté le cours et accompli la prière dans l'enceinte de l'établissement. Une polémique éclate poussant Benghabrit à réagir. «Les élèves vont à l'école pour étudier, apprendre, dans cette affaire, l'élève qui avait été avisée est sortie dans la cour découverte de l'école et a prié de manière très ostentatoire (...) les pratiques religieuses s'accomplissent à la maison, il est normal que l'école ait pris cette décision.» Les réactions ne se sont pas faite attendre longtemps. Le plus grave est que la situation a pris des airs de provocations entreprises par des professeurs des cycles moyen et terminale. Dans certaines écoles, ces derniers ont accompli et dirigé la prière dans la cour. Des vidéos montrant des garçons et des filles priant sous la conduite de leur enseignant ont été postées sous le titre de «réponse à Benghabrit». D'autres scènes encore plus provocatrices se sont déroulées dans des classes d'établissement. Il s'agissait d'images montrant des enfants du cycle primaire tous vêtus de kamis blanc et de hidjab pour les filles accomplissant le rite religieux sur des tapis de prière. Des syndicats ont appuyé la démarche, dit-on. D'une manière ou d'une autre, les enseignants ayant demandé à ces jeunes écoliers d'agir ainsi ont aussi reçu l'aval des directeurs d'établissements qui relèvent directement du ministère de l'Education. Doit-on s'attendre à l'ouverture d'enquêtes ? Des sanctions ? Doivent-ils émaner uniquement de ce secteur ? La question se pose en effet dans la mesure où ces lieux où évolue l'enfance se doivent en principe de rester à l'abri de toute surenchère politique. Or, inciter des écoliers à braver la loi dans un conflit qui les dépasse n'a d'autre nom que l'embrigadement. De la manipulation chez ces jeunes esprits privés d'un enseignement porté sur le débat et la réflexion. Et l'on comprend mieux dès lors les raisons pour lesquelles les manifestants de Ouargla, Tebessa et bien d'autres régions d'Algérie accomplissent la prière dans les places publiques pour revendiquer des droits. En prenant courageusement cette décision, Nouria Benghabrit n'ignorait pas qu'elle appelait ainsi la tempête. Il se trouve qu'elle y résiste sans que des soutiens à la mesure de l'événement se soient manifestés. Sur les ondes de la Chaîne 3, son conseillé a défendu la ministre et dénoncé l'exploitation de ses déclarations «par des lobbies idéologiques». «Pour former les futurs cadres de cette nation, il ne faut pas impliquer l'école dans des conflits idéologiques, nous sommes pour une école moderne, de qualité, nous travaillons pour.» «Les prières se font à la maison, les enfants vont à l'école pour étudier.» Ces déclarations ont été interprétées comme étant le maintien de la décision d'interdire la prière à l'école. La confrontation est totale. Les soutiens et solidarité autour de Benghabrit vont-ils se manifester ? Tout silence restera coupable de laisser les jeunes écoliers otages d'une idéologie qui a fait des milliers de morts durant la décennie noire. A. C.