On a beau vouloir garder ses distances avec ce qui nous est ponctuellement infligé, on n'y arrive pas. La nature de l'agression étant ce qu'elle est et cette dernière évoluant comme elle le fait, il est impossible de rester froid face à la situation. Alger est transformée en immense parking. Tous les gros engins bleus du pays y ont été dépêchés, puis stationnés là, pour casser l'itinéraire emprunté habituellement par les marcheurs. Depuis plusieurs jours, on ne prend plus la peine de les bouger de là. Peu importe ce qui se passe ailleurs, l'essentiel étant que tout se concentre sur la capitale de façon à empêcher les Algériens de s'y exprimer. J'ai lu, en même temps qu'étaient filmés par les réseaux sociaux les affrontements entre marcheurs et forces de l'ordre, que des femmes vêtues de robes kabyles, en tenues traditionnelles donc, étaient embarquées sans ménagement. Je n'ai pas eu grand mal à imaginer ce qu'elles pourraient subir dans les commissariats durant leur garde à vue, jusqu'à leur probable comparution devant les magistrats en exercice. Je ne veux pas faire montre de mauvaise foi, mais comment faire autrement, quand on se souvient du sort fait aux jeunes filles injustement arrêtées il y a quelques semaines à Alger et aussitôt transférées vers un commissariat de banlieue pour y être malmenées, à loisir, par des concitoyennes en tenue ? L'affaire, pourtant fortement médiatisée, n'a hélas pas été suivie d'effet. Cela peut, en partie, se comprendre. A l'allure où vont les choses, tout nouvel évènement chasse celui qui l'aura précédé. La DGSN n'avait pas nié qu'on les avaient déshabillées. Elle avait cependant défendu la légalité d'une fouille corporelle. Le tout s'était déroulé avec l'approbation de collègues masculins dont on se demande, encore aujourd'hui, comment ils auraient réagi s'il s'était agi de leur sœur, de leur épouse, de leurs mère, fille, cousine, fiancée ou même voisine ? J'ai parlé un peu plus haut d'arrestations de femmes en tenue traditionnelle. Je raconterai plus tard comment des policiers déconseillent, discrètement, d'aller vers telle direction où certains de leurs collègues font la chasse aux manifestants. M. B.