Mentors de la lutte internationale contre le terrorisme, les Etats-Unis, comme chaque année à cette période, ont publié le rapport annuel sur la lutte antiterroriste à travers le monde. Un rapport qui vient, cette fois, après le haut fait qu'a constitué la publication par la Maison Blanche de sa National Strategy for Counterterrorism (Stratégie nationale de lutte contre le terrorisme), la première du genre depuis 2011. Le rapport publié il y a quelques jours, comme les précédents, passe en revue tout ce qui a trait à l'activité terroriste recensée à travers le monde et la stratégie mise au point par tous les pays, dont l'Algérie qui a toujours reçu les louanges des Américains sur ce plan. Bien que des activités terroristes importantes et des menaces certaines aient persisté au Moyen-Orient et en Afrique du Nord en 2018, la coalition mondiale pour se défaire de l'Etat islamique et ses partenaires locaux a franchi une étape importante dans la lutte contre ces derniers, a affirmé le Département d'Etat en guise de préambule de son rapport à travers lequel il est également revenu sur le contrôle par la coalition sur la quasi-totalité du territoire en Irak et en Syrie de la nébuleuse terroriste. « Toutefois, reconnaît le Département d'Etat, l'Etat islamique a de plus en plus recours à la tactique clandestine (…) Au-delà de l'Irak et de la Syrie, les branches, les réseaux et les sympathisants de l'Etat islamique au Moyen-Orient et en Afrique du Nord sont restés actifs en 2018, notamment en Libye, au Maroc, en Arabie Saoudite, dans la péninsule du Sinaï, en Tunisie et au Yémen », ont relevé les rapporteurs américains qui, pour ce qui concerne le Maghreb, estiment « réduites » la présence et les capacités de l'Etat islamique, notamment suite aux frappes aériennes en Libye et des efforts antiterroristes des gouvernements algérien, marocain et tunisien. En Libye, le gouvernement d'entente nationale, soutenu par l'ONU et dirigé par le Premier ministre Fayez al Sarraj, est resté un partenaire proche des Etats-Unis dans la lutte antiterroriste, tandis que l'Armée nationale libyenne, stationnée dans l'est du pays, a détruit les refuges terroristes dans l'est de la Libye. Une série de frappes aériennes américaines, menées en coordination avec la GNA, a perturbé la sécurité d'Al-Qaïda dans le Maghreb islamique (Aqmi) en Libye, et a réduit la capacité de cette dernière de menacer ses intérêts et ceux de ses alliés américains. « La réconciliation politique qui aboutit à un gouvernement libyen unifié et capable de lutter contre le terrorisme reste la seule solution à long terme pour priver les terroristes du refuge en Libye », juge le Département d'Etat. De l'analyse de la situation sécuritaire dans le monde, particulièrement pour ce qui concerne la région et la sous-région auxquelles appartient l'Algérie, il est dit que, malgré les revers subis, Al-Qaïda a continué à faire preuve de résilience et a activement exploité l'attention que le monde accorde à l'Etat islamique pour reconstituer ses capacités et maintenir un climat sécuritaire fragile. Dans tous leurs précédents rapports, notamment ceux publiés aux moments où montait en puissance la terreur instaurée à travers le monde par l'Etat islamique, les Américains n'ont jamais manqué de louer la stratégie algérienne de lutte antiterroriste. Cet ultime Country Reports on Terrorism ne déroge pas à la règle, les Américains se faisant un point d'honneur de rappeler qu'avec l'Algérie, ils entretiennent une étroite coopération et dialoguent régulièrement pour « discuter et coordonner les efforts de lutte contre le terrorisme, échanger des compétences et renforcer le partenariat existant contre le terrorisme ». Ainsi, dans le rapport présenté par Nathan A. Sales, l'homme de loi, universitaire et fonctionnaire du gouvernement actuellement coordonnateur de la lutte contre le terrorisme au Département d'Etat des Etats-Unis, il est, encore une fois, relevé que « l'Algérie a poursuivi ses efforts importants pour empêcher les activités terroristes à l'intérieur de ses frontières. Les forces armées algériennes et les forces de sécurité intérieure ont publié des chiffres montrant la pression constante sur les groupes terroristes, révélée par l'augmentation considérable du nombre de terroristes qui se sont rendus par rapport à 2017, et par un nombre comparable de caches d'armes et de casemates détruites au cours d'opérations de grande envergure ». Et aux analystes officiels US de conforter les avis ayant estimé que les pertes continues des groupes terroristes encore en activité en Algérie ont considérablement perdu de leur capacité de nuisance, réduit la capacité des groupes terroristes d'opérer en Algérie, faisant ainsi que « Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), des groupes alliés à Aqmi et la branche algérienne de l'Etat islamique — comprenant des éléments du groupe local connu sous le nom de Jund al-Khilafah en Algérie (ou Soldats du califat en Algérie) — sont restés aux fins fonds du pays où ils sont soumis à forte pression. Les activités terroristes en Libye, au Mali et en Tunisie — ainsi que le trafic d'êtres humains, d'armes et de stupéfiants — ont contribué à la menace globale, en particulier dans les régions frontalières avec l'Algérie, analyse le Département d'Etat qui note, aussi, que l'Algérie a activement soutenu les efforts visant à lutter contre l'Etat islamique par le biais de programmes de contre-messagerie et de renforcement des capacités avec les Etats voisins, puis de rappeler que l'Algérie est membre du GCTF (Forum mondial de lutte contre le terrorisme) et a coprésidé, avec le Canada, en 2018, le Groupe de travail sur le renforcement des capacités de la région Afrique de l'Ouest. Au crédit des autorités algériennes, selon les officiels américains, le maintien d'une politique stricte de «non-concession» vis-à-vis des individus ou des groupes terroristes qui, toutefois, selon un relevé des actes terroristes établi par les Américains, ont été les auteurs d'attaques, le 14 février 2018, lorsque cinq soldats avaient été tués et d'autres grièvement blessés dans l'explosion d'un engin piégé au bord de la route à Ferkane, dans le nord-est de l'Algérie, près de la frontière tunisienne, puis quatre jours plus tard, lorsque Aqmi a revendiqué sur les médias sociaux la responsabilité de l'attaque en représailles des huit terroristes tués le 26 janvier par l'armée algérienne à Chechar, une petite ville du nord-est de l'Algérie. Puis une attaque, le 30 juillet 2018, suite à l'explosion d'un engin explosif artisanal, lors de laquelle sept soldats ont péri et 14 autres blessés alors qu'ils menaient une opération de grande envergure près de Skikda où quatre terroristes ont été tués et un capturé. Dans le chapitre du rapport consacré à « la législation, application de la loi et sécurité des frontières », le Département d'Etat signale que l'Algérie n'a apporté aucun changement significatif à son cadre juridique de lutte contre le terrorisme en 2018, alors que sur le terrain, la sécurité aux frontières est restée une priorité absolue avec le renforcement des mesures de sécurité le long de sa bande frontalière, notamment l'installation de clôtures et de tours d'observation, des équipements de surveillance et des drones. Il est également fait état de la coordination entre les douanes algériennes et tunisiennes le long de leur frontière commune et l'organisation d'un exercice maritime conjoint. Le gouvernement algérien a activement utilisé les bases de données Interpol, qui ont abouti à au moins 25 arrestations sur la base des notices rouges de la police internationale. Ceci, sans parler de la participation des forces de l'ordre algériennes aux formations et aux échanges proposés par le gouvernement américain et par d'autres pays, notamment dans le cadre du GCTF. L'autre volet du rapport auquel les Américains accordent une importance particulière : la lutte contre le financement du terrorisme. Sur ce plan, selon l'analyse de spécialistes du Département d'Etat, durant la période considérée « il n'y a eu aucun changement significatif en 2018 ». Rappelant que l'Algérie est membre du Groupe d'action financière sur le Moyen-Orient et l'Afrique du Nord (Menafatf), son organe chargé de l'investigation dans ce domaine, connu sous le nom de Unité de traitement des renseignements financiers, est membre du groupe Egmont, l'organe international de CRF qui s'emploie à partager des informations en toute sécurité pour lutter contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Quant à la lutte contre l'extrémisme violent (CVE), entre autres actions menées par le gouvernement algérien, les Américains ont relevé « la réglementation des mosquées pour veiller à ce qu'elles soient dépolitisées et désidéologisées constitue un aspect essentiel de l'approche algérienne » tout en soulignant la tradition d'un islam modéré du pays même si « il y a eu des plaintes selon lesquelles le gouvernement imposerait des restrictions à d'autres variantes de l'islam pour non-respect des procédures administratives imposées à toutes les institutions religieuses ». Pour les observateurs américains, l'Algérie a continué de soutenir les efforts de lutte contre le terrorisme par le biais d'organisations régionales et multilatérales et, en tant que coprésident du groupe de travail sur le renforcement des capacités de la région Afrique de l'Ouest du GCTF, c'est à ce titre que l'Algérie a accueilli la réunion plénière de ce groupe en novembre 2018 ainsi qu'un atelier de coopération policière. « L'Algérie a joué un rôle de premier plan dans Afripol, le mécanisme de coopération policière de l'Union africaine basé à Alger, qui a pour mandat de renforcer la coopération policière africaine et de prévenir la criminalité transnationale et le terrorisme. L'Algérie a accueilli l'assemblée générale d'Afripol, a fait don du système de communication et de données pour Afripol à tous les Etats membres et a piloté des protocoles d'entente avec d'autres organisations de police, par exemple Interpol et Europol. » Globalement, dans leur dernier rapport consacré au terrorisme dans le monde, les Etats-Unis ont, encore une fois, loué l'approche algérienne et soutiennent qu'Alger demeure un partenaire important dans la lutte antiterroriste. Synthèse Azedine Maktour