Le roi Mohammed ben Salmane invite Tebboune à Riyad. Avec escale au… … Consulat d'Arabie Saoudite à Istanbul ? L'actuel ministre de l'Energie a beau m'expliquer le 3 467e changement à la tête de Sonatrach en l'espace de quelques mois, j'accroche modérément à ses arguments. Cette histoire de valse des P-dg prend des allures de « cassettes de Hasni ». Les plus jeunes ne connaissent pas. Les moins jeunes et les très vieux comme moi se souviennent de la blague à deux sous que nous faisions sur les tubes de feu Hasni, artiste très prolifique : « T'as entendu le dernier album de Hasni ? » Ce à quoi l'interlocuteur répondait : « Lequel ? Celui de ce matin, du midi ou de l'après-midi ? » Sonatrach en mode raï ? J'exagère peut-être un peu. Si peu pour qui a conscience de l'importance de Sonatrach et de sa stabilité managériale. J'avoue que cette prise de conscience, chez moi, s'est accrue, s'est grandement accrue, s'est énormément accrue depuis la lecture d'un livre, ces dernières heures. Il traînait depuis un long moment sur une étagère de ma bibliothèque. Et ma main s'en est saisie de manière heureuse. À peine ouvert, je n'ai plus lâché Sid Ahmed Ghozali, Question d'Etat entretien avec Mohamed Chafik Mesbah. J'ai rarement, très rarement ressenti un tel choc à la lecture d'un ouvrage. Tout y est ! J'ai d'abord compris pourquoi Ghozali n'a jamais eu d'agrément à son parti. Le système rentier, de prébende et d'incompétence ne peut tolérer ce genre de pointure politique. Ensuite, Ghozali signe en… 2009, par anticipation géniale, la mort heureuse de l'horripilant slogan-raccourci « Yetnahaw Gaâ », né pourtant en 2019. Ghozali explique que l'Algérie et Sonatrach ne viennent pas de n'importe où et ne se sont pas faites n'importe comment, au départ. Des Algériennes et des Algériens à la citoyenneté embryonnaire ont construit cette entreprise et en ont fait une major crainte et respectée par ses plus grands concurrents. Sous le feu roulant de l'excellent Mesbah, Sid Ahmed Ghozali décortique avec un brio rarement atteint, un esprit de synthèse implacable et des raisonnements de mathématicien hors pair comment le processus de désintégration de Sonatrach a été entamé et poursuivi par à-coups après la disparition de Boumediène et la « déboumédianisation » forcenée de l'Algérie. Et pas que ! Dans cet ouvrage sorti en 2009 — il y a onze années ! — ce passage, ces propos terriblement prémonitoires de l'ancien P-dg de Sonatrach et Premier ministre au sujet des enjeux à venir dans la région et des menaces qui pourraient peser sur l'Algérie et sur son intégrité territoriale (page 158) : « Bien plus fort que vous ne pourriez le penser. C'est au-delà de toutes les conséquences négatives possibles, celle que je redoute le plus pour notre pays. C'est au sud du pays, et non point au Nord que se situe la menace potentielle. » Voilà ! Le Sud ! Et on y est ! Avec notre armée stationnée en force là-bas, mobilisée en permanence face au danger réel, et non plus potentiel. Non Monsieur l'actuel Ministre de l'Energie. Les changements à la tête de Sonatrach, ce n'est ni la sortie d'un album de raï, ni la valse des entraîneurs en Ligue Une de foot, encore moins de la cosmétique politique. Si nous sommes là, pas encore tombés en poussière, malgré cette menace au Sud annoncée par Ghozali en… 2009 et réelle en 2020, c'est aussi et surtout parce que des pionniers ont bâti cette société. Qu'en avons-nous fait après la « déboumédianisation » ? Cette question, ne la posons pas à Ghozali. Soumettons-là plutôt à des liquidateurs comme Chakib Khelil ! Dont personne n'évoque encore l'extradition. Une bizarrerie, encore une qui m'oblige à fumer du thé pour rester éveillé à ce cauchemar qui continue. H. L. Sid Ahmed Ghozali, Question d'Etat, entretien avec Mohamed Chafik Mesbah. Casbah Editions, 2009.