Le quatrième jour du procès de l'automobile et du financement occulte de la campagne pour le cinquième mandat a été en grande partie consacré aux auditions des témoins de la partie civile. Parmi eux, des hommes d'affaires qui affirment avoir été ruinés par Bouchouareb. L'avocat du Trésor public a, quant à lui, révélé le montant des pertes occasionnées par les indus avantages accordés aux hommes d'affaires jugés dans ce dossier. Abla Chérif - Alger (Le Soir) - Abderrahmane Achaïbou et son frère n'ont pas fait dans la modération. Comme en décembre dernier, les représentants de la marque KIA ont laissé exploser leur colère en racontant leurs déboires au juge. «Nous sommes heureux de pouvoir enfin dévoiler les dessous de nos malheurs devant la justice», lance le premier en ajoutant : «Abdeslam Bouchouareb a détruit huit de nos sociétés. Cela a conduit au renvoi de 1 500 employés. Dès son arrivée au ministère de l'Industrie, il a bloqué tous mes projets, j'ai tout tenté, tous les recours légaux, mais il n'y avait rien à faire, je ne savais plus vers qui me tourner.» L'homme d'affaires fait ensuite savoir que l'ancien Premier ministre Abdelmalek Sellal a avoué être dans l'incapacité d'agir contre Bouchouareb : «Il a dit qu'il ne pouvait rien face à lui. Sellal est le seul ministre qui nous a répondu par lettre.» Abderrahmane Achaïbou va plus loin. Il dévoile l'incroyable chantage exercé par l'ancien ministre de l'Industrie : «Il m'a demandé quinze milliards en échange de l'agrément (…) Lorsque je me suis déplacé au ministère de l'Industrie, on m'a dit que mon dossier était complet, mais que le ministre refusait de me donner l'agrément. Après son départ, j'ai été reçu par Mahdjoub Bedda et lui ai dit qu'il ne pourra rien faire dans ce ministère , car c'est un nid à scorpions.» Avant l'homme d'affaires Achaïbou, le juge avait procédé à l'audition du représentant de Emin Auto, société multimarque algérienne, détenue par un Turc. Il déclare que sa société est la première à avoir déposé un dossier pour un projet de montage automobile mais qu' il a été refusé. «Tous ces faits, dit-il, se sont déroulés à l'époque où Abdelmalek Sellal était chef de gouvernement. Nous avons appris que le refus venait de lui. Nous avons aussi adressé dix-huit lettres à Youcef Yousfi mais rien n'a été entrepris.» L'homme d'affaires rappelle qu'il était «sur le terrain depuis 2000 et qu'il est spécialisé dans l'importation de véhicules et de camions et les services après-vente à travers 38 wilayas». Puis, dit-il, «nous avons déposé un dossier complet pour un projet de montage automobile pour les marques Jack et GMC. Nous avons investi 100 millions de dollars des capitaux privés dans l'usine de montage de Mostaganem, mais toutes ces demandes sont restées sans suite». Omar Rebrab, représentant de Cevital, a été lui aussi auditionné. Dans ces déclarations, il s'en est pris à son tour à Abdeslam Bouchouareb qui, dit-il, «nous a bloqués. J'ignore s'il avait reçu des instructions ou s'il agissait seul ,mais il a entravé un bon nombre de nos projets (…) On nous a retiré la marque Hyundai et je demande à ce qu'elle nous soit restituée à présent». Il ajoute : «Nous avons trois tonnes de matériel bloqué, et des familles entières souffrent de cette situation.» Face à la cour, Omar Rebrab révèle enfin l'existence d'une correspondance adressée par Bouchouareb aux Coréens auxquels il demande de travailler uniquement avec les hommes d'affaires Arbaoui et Tahkout… Il faut savoir aussi que cette journée a été marquée par l'intervention d'avocats de la partie civile et du Trésor public. Les révélations de ce dernier ont toute leur importance. Il présente à la cour un document révélant les pertes causées par les indus avantages accordés à trois concessionnaires autos jugés dans cette affaire : 128 983 650 708 DA. A. C.