Une ambiance de «prohibition», sans Al Capone, ni Eliot Ness. Pour accéder au «club», il faut d'abord être invité et «garanti» par un habitué. On y entre par une entrée que seuls les initiés connaissent. La porte n'est ouverte qu'après avoir tapé sur le bois un code secret. La lumière est tamisée et il n'y a pas de musique, ni télé allumée, sans doute pour ne pas attirer l'attention. Quelques clients sirotent leur boisson préférée avec l'air d'en savourer chaque joughma (gorgée). Par contre, un tout-nouveau, visiblement en état de manque, vide son verre en trois grosses gorgées, avant d'en demander un autre. Coronavirus oblige, les tables sont espacées. Ces bonnes gens ne sont pas venues ici boire un whiskey ou un verre de vin rouge, mais tout juste une bonne tasse de «café presse». Habitués à ce genre de «café bien serré», ils disent que le café maison est insuffisant pour leur enlever eddoukha (fatigue ou somnolence). Une odeur de café emplit les lieux. El maâlem (le boss) reconnaît qu'il n'applique pas la loi harfiyyane (à la lettre), mais qu'il applique «l'esprit de la loi» du moment, que toutes les précautions anti- coronavirus sont «de vigueur et de rigueur», selon sa formule. D'ailleurs, fait-il remarquer, la plupart des gens ne consomment pas sur place mais repartent avec leur «verre jetable» à la main. Dans ce café, on se croirait à Chicago, au temps de la prohibition, dans les années 1920-30, pas à Alger en juin 2020. K. B. [email protected]