Sans doute par épuisement des programmes dû au « confinement culturel » imposé par la pandémie, France 5 a entrepris, depuis quelques jours, de rediffuser à plusieurs reprises un vieux numéro de son émission « Echappées Belles » consacré à l'Algérie. Histoire de rêver un peu, beaucoup, énormément, faisons alors comme France 5. Regardons l'émission, selon le concept du programme : tout est beau, tout le monde il est intelligent, tout le monde il est gentil. La vie est agréable dans notre grand et merveilleux pays. Après tout, on peut très bien croire ce que dit de nous en bien une chaîne publique d'un pays que nous n'avons pas toujours vu comme un exemple de bienveillance-complaisance. Regardons juste pour rêver, regardons juste pour oublier, regardons juste pour nous mentir un peu, le temps d'un instant-télé bien fait et attendrissant. De toute façon, du temps, on n'en manque pas. Le coronavirus a considérablement revu à la hausse notre ratio-canapé, il fait horriblement chaud dehors et toutes les autres télés sont dans le dur. Ne boudons donc pas notre bonheur et savourons ces images et ces paroles qui nous sont consacrées. Elle est belle l'Algérie, elle est belle notre vie. La Casbah est nickel, les éboueurs veillent avec leur troupeau d'ânes. Il y a de nouveaux habitants passionnés par les vieilles maisons à patios, il y a des balcons pour une vue imprenable sur la baie et il y a des artisans émouvants de savoir-faire, de passion et d'authenticité. Quelque part à l'ouest d'Alger, il y a une femme qui tient une maison d'hôtes et prépare à son invité en caméra et micro une succulente dolma-dalia avec des feuilles de vigne cueillies dans sa cour-jardin. À Tipaza, il y a un Français fou de la Méditerranée qui apprend à des jeunes Algériens des deux sexes la plongée sous-marine et le respect de la mer. Sur le mont Chenoua surplombant la mer, il y a un compatriote épris de la nature et de la splendeur des lieux. C'est fou, ce que les compatriotes parlent bien quand il y a quelqu'un qui les fait parler. Sur une autre hauteur du Chenoua, il y a un groupe qui chante sur un air du terroir pendant que le journaliste de France 5 goûtait au miel qu'un producteur en cagoule lui servait après l'avoir fraîchement extrait de la ruche. Comme décor, on pouvait voir un emblème amazigh accroché à un arbre. À Tlemcen, il y avait un mariage. La fête est réservée aux femmes mais on a fait une exception pour les hommes de France 5. Pas loin, le marié recevait ses amis masculin pluriel avant d'embarquer sur un cheval au milieu d'un cortège de... motos. Elle est belle, la vie en mode surréaliste. France 5 — et nous avec — a même eu droit au bisou des mariés. Sur la joue, il ne faut quand même pas exagérer, même dans le bonheur. Dans la forêt de Bouchaoui, de belles filles font du sport et quelque part ailleurs, des enfants émerveillés écoutent l'histoire d'un conteur inspiré. Clap de fin. Il doit bien avoir d'autres images ici oubliées mais comme vous avez déjà tout vu, votre bonheur est intact. S. L.