Depuis des semaines, nombreux sont ceux qui ont décidé de profiter un peu du soleil et de faire bronzette, même durant cette période de pandémie. Et les formules pullulent sur la toile. Depuis le mois de juillet, c'est la location de piscines auprès de particuliers qui retient l'attention. Pour plus de discrétion, moins de personnes et surtout la promesse de respect des mesures barrières, les chercheurs de fraîcheur y ont recours. Pour patauger, barboter et se rafraîchir, mais aussi fêter un anniversaire, des fiançailles ou un mariage, la location d'une piscine auprès de particuliers a fait des émules depuis quelques années déjà. Mais pour cette saison estivale, le recours à cette formule a connu un succès sans borne auprès de tous ceux qui veulent passer quelques moments de détente et de rafraîchissement. «C'est une amie qui m'en a parlé et m'a poussée à accepter. J'avais au départ vraiment peur, mais elle m'a assuré qu'il n'y aurait pas de monde. Nous étions au final pas plus de dix personnes, surtout qu'à la fin du mois de juin, la psychose et la frayeur régnaient encore au sein de la population. Les gens n'avaient pas encore ce besoin de sortir et de s'aérer», confie Djamila, la trentaine. Et de préciser : «Il y avait deux couples, dont l'un avec deux enfants, deux jeunes hommes et nous. Nous étions réellement dans une ambiance sereine et chacun tentait tant bien que mal de respecter tous les gestes de protection sanitaire.» Des prix en hausse L'an dernier déjà, cette formule a trouvé écho auprès de nombreuses familles, notamment les femmes. «L'été passé, avec des copines, nous avons contacté une propriétaire qui proposait la location de sa maison pour la journée. De ce fait, nous avions accès à la piscine mais également aux douches qui étaient au rez-de-chaussée et on nous autorisait même à apporter notre repas et à utiliser certains ustensiles de cuisine et autres équipements, comme le réfrigérateur et le four à micro-ondes. Mais cette année, les prix ont flambé. Les propriétaires sont en train de profiter de la situation pour se remplir les poches au maximum», raconte Amina, cadre dans une entreprise privée, obligée de recourir au télétravail. «Je voulais réellement profiter d'une journée en faisant un peu d'exercice dans l'eau et en me disant que, de cette façon, les mesures barrières pourront être respectées ; mais en constatant que pour le même tarif que celui de l'année dernière, soit 2 500 dinars, je n'aurai accès qu'à la piscine et peut-être à un transat, j'ai d'emblée refusé, c'est de l'arnaque.» En effet, en considérant la pandémie de Covid-19, plusieurs propriétaires de ces «bassins» veulent profiter de l'aubaine et font en sorte de jouer sur la rareté du produit. Nawel, maman de deux enfants, raconte : «Mes petits en avaient vraiment assez du confinement. Les plages étant fermées et les parcs aussi, je me suis dit que c'est la meilleure formule. La dame chargée de la gestion m'a expliqué, tout de go, que c'était complet jusqu'au mois de septembre et que les réservations se faisaient déjà depuis le mois de juin. C'est avec une certaine appréhension qu'ils ont décidé d'ouvrir leur maison au mois de juillet. De plus, les personnes qui louent la piscine doivent s'organiser entre elles pour être au nombre de 12. En somme, il s'agit d'une location pour un groupe de 12 personnes à raison de 2 000 dinars chacune. Ce groupe aura droit à l'accès à la piscine, à un transat et un parasol. Avec mes deux enfants, le nombre demandé ne sera pas atteint. Je contacte alors une autre dame qui propose une piscine exclusivement féminine. Elle explique que le prix pour les enfants est de 1 000 dinars, pour les adultes deux formules sont proposées : l'une à 2 000 dinars, l'autre à 3 000 dinars avec déjeuner. Le nombre maximal est de 10 personnes. Mais j'ai été surprise de savoir qu'elle ouvre à 11h30 et ferme à 16 heures. J'ai trouvé que cela était vraiment peu en termes de volume horaire et de plus, pas d'accès aux douches. Ce qui est pour moi vraiment nécessaire, durant cette pandémie. Au final, nous avons acheté une petite piscine et les enfants s'amusent au balcon, sans risque.» Respect des règles d'hygiène et de distanciation Cependant, nombreux sont ceux qui sont sceptiques quant au respect des règles d'hygiène et des gestes barrières. Pour eux, les risques sanitaires persistent. Même si les scientifiques ont confirmé que les doses de chlore dans les piscines éliminent le virus. Les propriétaires contactés assurent qu'ils font en sorte de faire respecter des règles d'hygiène et de distanciation. «Pour ma part, je n'accueille pas plus de 12 personnes simultanément. Je désinfecte tous les équipements après chaque baignade et je mets à la disposition des baigneurs du gel hydroalcoolique», assure une propriétaire qui affiche, dit-elle, complet pour cette saison. Interrogés sur le respect du dosage du chlore ou du sel, les propriétaires étaient étonnés de notre question. Honnête, l'une d'elles répond : «J'essaye de suivre sur internet ce qui se fait à l'étranger et je tente de faire la même chose. Juste pour avoir la conscience tranquille. Mais je ne pense pas que tout le monde procède de cette manière.» Et pour ce qui est du système de filtration de l'eau, tous ceux contactés n'ont pas été en mesure d'expliquer le type de moteur choisi. «La couleur de l'eau est claire et il n'y a pas d'odeur. Donc, de ce fait, tout va bien. En plus, si la personne n'est pas contente, elle n'a qu'à repartir», répond un gestionnaire d'un «bassin» excédé par nos questions. Pourtant, comme expliqué par le Dr Didiche, « déjà en temps normal, la qualité de l'eau doit être optimale et l'obligation de se doucher avant et après la nage doit être respectée. Alors que dire durant cette pandémie où l'hygiène corporelle est vitale?» Aucun contrôle Plus ou moins satisfaite, une cliente ayant utilisé cette formule relève le manque de contrôle : «Je ne suis pas contre le fait que les gens tentent d'arrondir leurs fins de mois. De plus, il y a une forte demande et cela répond à un besoin du marché. Mais il n'y a aucun contrôle, pas de factures ni bons. Aucune assurance n'est contractée en cas de noyade, de chute ou autre accident. Il n'y a pas de surveillant de baignade. Rien de tout cela. Je considère qu'il devrait y avoir un minimum d'investissement à faire pour contenter et rassurer la clientèle et ne pas rester dans une logique du purement commercial et pratiquement de jungle.» Sarah Raymouche