Aujourd'hui, j'avais envie de lever le pied sur la corruption, la pandémie, le vaccin, les populations auxquelles les doses importées sont destinées, mais, surtout, à qui elles profitent en vérité. Un peu de légèreté pour oublier les contraintes qui pèsent sur le moral. Je ne savais plus dans quel dossier j'avais rangé ce courrier que je me souviens m'être promis de partager un matin. Je pensais l'avoir égaré dans une mauvaise manipulation et voilà que je retombe dessus. Il remonte à cette année où j'avais parlé de restaurants dignes du nom en regrettant qu'au cœur de la capitale, à Alger-Centre, les gargotes aient enterré le plaisir d'aller déjeuner ou dîner à pied et même d'avoir l'embarras du choix. Le billet où je décrivais ce malaise que nous sommes pas mal nombreuses et nombreux à ressentir portait pour titre «Gargotes et chawarma». Voici l'un des nombreux courriers reçus en réaction à la chronique d'alors. L'anecdote qu'il partage ne manque pas de saveur ! «C'est un soulagement que l'on ressent quand on a la même vision des choses et de la vie avec autrui. ''Gargotes et chawarma'' m'a fait remonter le temps de cet Alger d'avant l'indépendance, alors que j'étais lycéen. Alger la Blanche méritait bien son nom et à ce propos, je me souviens d'une discussion, qui m'a été rapportée, entre deux personnalités, aujourd'hui défuntes, que la paix soit sur elles. Il s'agit du Professeur en médecine Bachir Mentouri et de l'ex- ministre M. Boualem Bessaih alors ambassadeur au Caire. C'était tout juste après l'indépendance de notre pays. M. Mentouri visitait Le Caire pour la première fois aux côtés de M. Bessaih, et à mesure que le véhicule se faufilait à travers les ruelles de la capitale égyptienne, M. Mentouri était de plus en plus abasourdi. Il finit par exprimer son grand étonnement : ''C'est ça le Caire ?'' Et B. Bessaih de répondre : ''Eh oui ! Oh ! dans quelques années, Alger ressemblera beaucoup au Caire.'' B. Mentouri : ''Ah non !'' B. Bessaih : ''Mais si, Bachir ! Dis-moi qui est maire d'Alger aujourd'hui ?'' B. Mentouri : ''Mais tu le sais. C'est moi !'' B. Bessaih : ''Et dans quelques années, qui le sera ?''» M. B.