Les tribus bédouines arabes s'adonnaient à un sport cruel et destructif des plus inhumains, « el ghezou », ou dans sa traduction latine, razzia. Le coup est bien préparé et le butin de guerre connu par anticipation : comme butin de guerre, l'on prend les femmes et les enfants des vaincus, les plus belles filles pour les chefs, les chevaux et les chameaux. Ibn Khaldoun avait quantifié le nombre de nos belles vierges, prises des villages, pour être envoyées dans les palais des princes du Proche-Orient en même temps qu'un grand nombre de chevaux de race, de fastueux présents en or et pierres précieuses de toute sorte. Il n'est pas difficile d'imaginer qu'une campagne de « ghezou », en cas de succès, signifie la fin de la tribu victime. Cette loi de la guerre était inscrite dans les mœurs du moyen-âge, voire même avant. Elle n'était pas le propre des chameliers arabes. Cette pratique, que réprouvent certes les consciences et la morale, avait lieu partout et en tous temps. Malheur aux vaincus ! Tamerlan (1336-1405), le génial stratège militaire - boiteux à la suite d'une blessure (on le faisait monter à cheval), avait hérité de son ancêtre Genghis Khan (souverain universel en mongole), un empire unique dans l'Histoire. Il s'étendait de la Méditerranée au Pacifique, de la Sibérie à l'Inde et à l'Indochine. Tout n'était plus que cendres après le passage de ses cavaliers et de ses redoutables archers. Tamerlan, qui est né et a grandi sous la tente, ne concevait pas la vie dans la ville qu'il réduisait allégrement en cendres. Comme un pied de nez à l'Histoire, le phénomène razzia n'allait pas disparaître avec les multiples et diverses évolutions que procure la civilisation. Plus proche de nous, en Méditerranée, le phénomène de la course était légion. C'est ainsi que Miguel Cervantès (Don Quichotte) et son frère ont été faits prisonniers par les raïs ottomans. A l'heure de la nanotechnologie, de la conquête de l'espace, les razzias menées par les puissants de ce monde se poursuivent sous d'autres formes, avec la même cruauté : s'emparer des biens d'un pays, admis et reconnu par tous comme partenaire souverain. Nous le constatons avec effarement et impuissance, parce qu'au XXIe siècle, l'humanité s'est publiquement donné les outils qui la préserveraient de tous les dépassements dont sont capables les plus forts contre les plus faibles. Deux guerres mondiales et de nombreuses guerres coloniales n'ont su conjurer les démons de l'agression et la volonté de s'accaparer des biens des autres. La vie des autres ! Avec cette différence, qu'aujourd'hui, cette pratique médiévale se fait légalement dans le cadre d'une coalition, et l'on prend soin de l'enjoliver avec de bien grands mots comme la défense des libertés, la protection des populations contre les tyrans de leur propre pays. D'où l'accès, justifié avec le fracas des armes, aux richesses du pays ciblé : pour leur pétrole, l'Irak, la Libye, l'Iran sont des cas d'espèce qui incitent à la relecture de l'Histoire d'un passé pas trop éloigné. Jours heureux pour les apôtres de la globalisation. B. T. [email protected]