Retour des équipes nationales paralympiques. Les bus de la honte ! Avanci l'arrière ! Les bonnes âmes qui nous invitent, souvent vigoureusement, parfois en accompagnant leur invite de tombereaux d'insultes à «arrêter avec le Maroc et Israël et à revenir à nos problèmes internes», me font penser à lui. Oui ! À lui ! Personnage épique. Devenu culte par la force des choses et par le cocasse des situations dans lesquelles il s'était mis. Cocasse ? Non ! Dramatique plutôt. Souvenez-vous, camarades. Allez, je vais vous aider. Debout, au milieu d'une foule au début compacte. Fier. Le port altier. Le verbe haut. Puis, au fur et à mesure qu'il parlait, égrenait les victoires, la foule se faisait plus clairsemée. Pour se réduire à zéro ou presque. Par un phénomène étrange, tous ceux qui l'écoutaient dans cette rue de Baghdad s'en étaient allés, sans demander leur reste. Et, moment intense, moment indescriptible, mais que je vais vous narrer quand même : l'homme se raidit. Il se fige, même. Des gouttes de sueur commencent à perler sur ses joues, pour finir absorbées ou presque par sa vareuse militaire chargée de médailles clinquantes. Il sent bien le bougre un souffle dans son dos, tout près de son cou. Il se retourne enfin. Deux Marines. Deux soldats américains aux allures de déménageurs de foire et qui lui sourient, avant de lui passer des menottes. Ah ! Mohammed Saïd Al-Sahaf ! Le bien nommé ministre de l'Information de Saddam Hussein. Le troubadour des victoires éclatantes des troupes irakiennes sur les soldats US et sur l'Amérique tout entière. Impayable Al-Sahaf ! C'est à lui, et à lui surtout, que me font penser les oublieux volontaires ou juste engourdis des neurones. Ceux qui, aujourd'hui, nous demandent de cesser de parler d'Israël, déjà à nos portes, après avoir posé les rangers sur le marchepied marocain. Ben voyons ! Il faudrait que nous arrêtions, nous les vieux grigous, d'alerter et d'alerter encore. Ces chers compatriotes, soudain vachement préoccupés par les problèmes internes, alors qu'ils ont roupillé pendant les 22 années de règne de Abdekka souhaitent donc que nous donnions le dos à cette menace, que nous n'abordions que les problèmes de robinet et de sardine à 800 dinars, jusqu'à... Jusqu'à ce que la foule se fasse moins compacte. De plus en plus clairsemée pour disparaître complètement. Parce que dans nos cous ridés par l'expérience des nations écrasées, nous sentirons le souffle des soldats de l'entité sioniste, puis sur nos poignets le contact froid du métal des menottes. C'est ça, les Cocos ? Désolé, mais perso, je n'ai franchement pas vocation à faire du Al-Sahaf. Par déformation professionnelle, et par nature, j'ai toujours eu un regard panoramique et circulaire sur ce qui m'entoure. De face. Comme dans mon dos ! Tout en fumant du thé pour rester éveillé à ce cauchemar qui continue. H. L.