Remake des scènes de jeudi dernier devant le siège national du parti du Front de libération nationale, avec, il est vrai, hier dimanche, une absence totale de violences physiques auxquelles se sont substitués, cette fois-ci, des échanges d'«amabilités» entre les membres des deux camps, partisans et adversaires du secrétaire général du Front. M.Kebci - Alger (Le Soir) - Le secrétaire général du parti du Front de libération nationale a organisé sa riposte, hier dimanche, contre ses adversaires qui ont, jeudi dernier, pris d'assaut le siège national du parti où ils ont tenu une session ordinaire du comité central à l'issue de laquelle sa mise à l'écart a été entérinée. Des dizaines de partisans de Abou el Fadhl Baâdji, venus plusieurs wilayas du pays, Alger, Tizi-Ouzou, Bouira, El Bayadh, Tissemsilt, Sétif, Saïda, El Maghaïr, Oum-el-Bouaghi, Djelfa, M'sila se sont retrouvés, hier dimanche, dès neuf heures du matin, devant le siège national du vieux front. Avec pour ce beau monde, l'intention de manifester un soutien au secrétaire général du parti et à son bureau politique qui ont fait, deux jours auparavant, l'objet d'un retrait de confiance de la part de leurs pairs du comité central. Banderoles accrochées sur la devanture de l'immense bâtisse servant de siège national à Hydra, sur les hauteurs de la capitale et pancartes entre les mains, les présents ont bruyamment manifesté des heures durant, rendant difficile la circulation automobile que des membres des forces de sécurité présentes en force sur les lieux, ont pu réguler non sans désagréments. Une militante, ancienne députée et ex-membre du bureau politique, explique son soutien à Baâdji par le fait, dit-elle, qu'il «ne badine pas avec la discipline puisqu'il n'hésite pas, contrairement à ses prédécesseurs, à appliquer le règlement intérieur et les statuts du parti à l'encontre de tous ceux qui ont osé les piétiner». Et de citer en exemple les cas de ces cadres et militants qui se sont présentés lors des élections législatives anticipées du 12 juin écoulé sous d'autres chapelles partisanes, quand d'autres ont candidaté en indépendants. Un écart de conduite que le secrétaire général a vite fait de sanctionner en prononçant à leur encontre la radiation des rangs du parti». Au fil de l'égrènement des minutes, les adversaires du secrétaire général pointaient le nez avant de se faire plus visibles, vers dix heures, au vu de leur nombre sans cesse grandissant pour égaler, ou presque, la foule compacte qui les a précédés. Cantonnés dans un premier temps du côté bas du siège, ils ont fini par occuper la partie supérieure de la rue, avec des membres des forces de sécurité qui se sont installés entre les deux camps rivaux, filtrant avec les allers-retours des présents. Deux camps qui ont alors échangé, un bon moment, bien d'amabilités. Aux : «Nous sommes tous avec Baâdji», «Baâdji et son bureau politique sont légitimes». Ou encore «dégage la îssaba» repris à tue-tête par les partisans du secrétaire général du vieux front, leurs adversaires répliquaient en même temps en reprenant, de leur côté, des slogans comme : «Comité central, comité central», ou encore «Baâdji dégage» et «îssaba dégage». À maintes reprises, des prises de bec ont été enregistrées, notamment quand une des figures connues d'un camp traversait l'espace de l'autre camp. Vers onze heures, une scène était improvisée par les partisans de Baâdji en face du siège du parti, où une déclaration de soutien des mouhafadhas et kasmas présentes à ce sit-in était lue. Selon Mohammed Issaâd, coordinateur de l'instance de coordination du FLN, présent sur les lieux, l'objectif de cette manifestation était de signifier, une fois de plus, à Baâdji, sa «fin de mission à la tête du parti», estimant que tous les «supposés soutiens qu'il a mobilisés aujourd'hui, ne sont pas des militants du parti, mais des baltaguis qu'il a rémunérés à 3 000 DA chacun». «C'est une vaine riposte de la part de Baâdji», ajoute notre interlocuteur qui se vante du fait que ses pairs de la contestation sont pour leur quasi-majorité des membres du comité central dont nombre d'entre eux, n'hésitaient pas à brandir la carte prouvant ce statut. «Qu'il (Baâdji, ndlr) ait l'audace de convoquer une réunion du comité central», soutient une ancienne députée d'Oum-el-Bouaghi qui reproche au secrétaire général du vieux front ses «velléités de vider le parti de sa crème pour pouvoir ensuite asseoir son hégémonie». Selon Issaâd, le dossier portant résolutions de la session ordinaire du comité central tenue jeudi dernier au siège national du parti a été «déposé la matinée même au niveau du ministère de l'Intérieur et des Collectivités locales». Une session à laquelle ont pris part 230 membres du comité central en plus de trente autres membres qui ont voté par procuration. Une session, précise encore notre interlocuteur, «appuyée par 297 membres de ladite instance, soit 3 membres de plus que le quorum requis par les statuts du parti qui parlent de l'obligation de réunir un minimum des deux tiers des membres du comité central pour tenir une session ordinaire. Et quand on sait que le comité central est actuellement composé de 453 membres après le décès, la démission et la radiation d'une cinquante membres, le seuil des deux tiers est de 227 membres». Ceci dit, le sit-in n'a pris fin qu'en début d'après-midi, vers 14h, avec les derniers contestataires, pour la plupart des adversaires de Baâdji, les partisans de ce dernier ayant quitté les lieux bien avant. Réunion avec les députés du parti Pour sa part, le secrétaire général du parti FLN s'est réuni dans l'après-midi, au siège de l'Assemblée populaire nationale, avec les nouveaux députés du parti. Avec au menu, la discussion autour du plan d'action du gouvernement que le Premier ministre et ministre des Finances présentera ce matin à la Chambre basse du Parlement. Ceci pour l'ordre du jour officiel. Alors qu'en parallèle, Baâdji chercherait à travers ce conclave, à avoir le soutien des nouveaux députés du parti dans ce bras de fer avec ses détracteurs, surtout que, dit-on, le gros des membres du Conseil de la Nation dont certains étaient, présents au sit-in d'hier, lui sont hostiles. À propos de cette réunion avec les députés du parti, les membres du comité central ont, dans une correspondance, demandé au président de l'Assemblée populaire nationale de ne pas permettre cette réunion. «Nous demandons à Votre Excellence de prendre une décision que vous jugerez appropriée pour empêcher ces manœuvres afin d'assurer le fonctionnement serein de l'institution et de l'éloigner des conflits partisans, et nous sommes certains que Votre Excellence partage avec nous la même préoccupation quant à la stabilité de l'assemblée et celle des institutions de l'Etat», écrivaient-ils dans leur requête à Brahim Boughali. M. K.