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A fonds perdus
Nouvelle vague de féminisme islamique
Publié dans Le Soir d'Algérie le 10 - 02 - 2015


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Le préjugé occidental a figé la femme musulmane et l'a reléguée à un rang inférieur pour ne voir d'autre alternative à sa condition qu'une mise à distance du religieux, une désacralisation des «normes religieuses» au nom d'une «modernisation» censée faire triompher la Raison. L'image qui prévaut aujourd'hui, y compris dans certains milieux musulmans, est celle d'une religion étrangère à toute idée d'émancipation des femmes, voire de toute émancipation «tout court». Le cliché colporte une double contre-vérité, celle d'une religion patriarcale et totalisante — en fait «totalitaire».
Il y a tout lieu de croire à un retour du discours colonial sous un emballage moderne, celui d'une construction de l'Autre musulman «archaïque», «patriarcale», «obscurantiste», face à un Occident qui serait le modèle et la bonne mesure de modernité et de progrès. Ce qui exclut naturellement toute idée de sécularisation de l'Islam.
De retour du Maroc où nombre d'universitaires s'appliquent à tordre le cou à ces préjugés, j'ai rapporté aux lecteurs deux expériences qui vont à l'opposé de ces idées reçues. Il s'exprime aujourd'hui chez nos voisins des féminismes islamiques qui témoignent d'une autre manière d'appréhender et de vivre l'Islam, d'exprimer l'égalité et l'émancipation à l'intérieur du cadre religieux musulman, dans une société où l'Islam est un référent à la fois spirituel, mais aussi culturel et identitaire majeur.
Ce féminisme militant, actif, novateur, n'a pas succédé, encore moins suivi le féminisme européen, comme on l'a souvent écrit par mimétisme.
On doit à Fadma Aït Mous, de l'Université de Rabat, une récente enquête anthropologique sur le mouvement des soulaliyates (*), mouvement qui a émergé au-devant de l'actualité en 2007, suite à une collaboration de femmes issues de milieux semi-urbain et rural, habituellement exclues, revendiquant le droit de percevoir des indemnisations en cas de cessions de terres collectives. Pour rappel, les terres collectives sont régies au Maroc par un dhahir datant du protectorat français, de 1919. Elles obéissent à un statut, aussi opaque qu'ambigu, avec une mise sous tutelle du ministère de l'Intérieur (elles relèvent de la Direction des affaires rurales) qui les encadre par des délégations territoriales. Une liste d'ayants droit mâles a été établie, sur la base de textes de lois et de règles coutumières. Elle porte sur une superficie de 11 à 21 millions d'ha qui font souvent l'objet de transferts, ventes et locations formelles et informelles, en échange d'indemnisations matérielles — argent ou lopins de terre en compensation — dont sont exclues les femmes. Promoteurs et autres investisseurs privés profitent de ces transactions.
Les femmes ont développé des argumentaires ingénieux contre leur exclusion
Ciblant la coutume comme prétexte à leur exclusion, elles mettent en avant son caractère rétrograde, contraire à la Constitution, aux droits de l'Homme et aux traités et conventions ratifiés par le Maroc. Tout en étant critiquées, les normes et pratiques coutumières restent toutefois un référentiel de poids comme en témoigne l'action marquante de l'association Ech-chourouk des femmes de Mahdia, au sud-ouest de la ville de Kenitra.
Légalité et généalogie sont les deux grands piliers de leur argumentaire
La ligne de défense légale est semée d'embûches. Par moments texte de référence, parce qu'il n'exclut pas explicitement les femmes du bénéfice de l'indemnisation, le dhahir de 1919 est stigmatisé comme étant d'essence coloniale, dépassé, injuste. Passent également au feu de la critique les normes et pratiques coutumières (‘orf) jugées comme étant antéislamiques, contraires à l'égalité devant la loi dans un Etat de droit et à la modernité. L'Etat est alors interpellé pour promulguer une loi spécifique et une pétition citoyenne commence à circuler dès juin 2012 sous le nom de «droit des femmes soulaliyates aux terres collectives». Sur le terrain, la revendication d'égalité se pare et s'empare tantôt du droit (el'haq), tantôt de la volonté du prince (sidna a'tana).
La ligne de défense généalogique s'attaque à la «partialité du patriarcat». Elle s'appuie sur le lien de sang qui unit ces femmes au père et, au-delà, à la collectivité et aux terres collectives (l'être et l'avoir), une descendance patrilinéaire commune censée garantir une égalité dans le bénéfice des indemnisations. «Pourquoi pas nous, puisque nous sommes tous les enfants d'un même père ?» L'argumentaire généalogique renvoie à trois déclinaisons : le nom de famille, le lien biologique partagé avec le frère et le livret de famille.
Au passage, les soulaliyates mettent en exergue les souffrances qu'elles endurent au service de la famille et de la collectivité, partagées qu'elles sont entre le ménage et le travail de la terre. Enfin, elles développent l'argument de leur vulnérabilité, soutenant que les frères ont failli à leur devoir de protecteurs. Dans le même ordre d'idées, mais sur un tout autre sujet, un autre universitaire marocain, Mohamed Mouaqit, examine une règle de droit coutumier comme levier de la revendication d'égalité des femmes : «kad wa si'aya» (**). «Kad» au sens d'effort et «si'aya» au sens de possession. La traduction moderne de cette règle pourrait être : «tout travail mérite salaire». Il s'agit de rendre leur dû (hak ech'ka) aux femmes qui ont contribué à la richesse de l'époux décédé. Le cas n'est pas spécifique au Maroc. On retrouve le même sentiment chez nombre de nos femmes injustement abandonnées après tant d'années d'efforts et de labeur pour construire le patrimoine du mari décédé ou remarié.
Toutes ces femmes sont attachées à leur islamité
Ainsi, des individus peuvent rester «religieux» tout en vivant et en luttant dans un cadre institutionnel et normatif qui, pour l'essentiel — en dehors des questions de statut personnel — n'est pas structuré par le religieux, ce qui est le cas dans la plupart des sociétés maghrébines héritières de lois pour l'essentiel inspirées de l'ancienne puissance coloniale.La vulgarisation du savoir religieux et son expression dans d'autres termes que ceux des écoles islamiques traditionnelles ou des discours islamistes obscurantistes a rendu possible une forme de réappropriation du savoir religieux par les femmes.
A. B.
(*) Fadma Aït Mous, «Le mouvement des soulaliyates : lignes argumentatives et référentiels», Atelier Anthropologie du droit et propriété en contexte musulman, Centre Jacques Berque, Rabat, 28 janvier 2015.
(**) Mohamed Mouaqit «Le droit de «kad wa si'aya», anthropologie d'une règle coutumière au Maroc», Atelier Anthropologie du droit et propriété en contexte musulman, Centre Jacques Berque, Rabat, 26 janvier 2015.


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