Des musiciens, entre amateurs, professionnels et des étudiants en musique, se sont rassemblés, hier matin, à la Grande-Poste d'Alger, pour revendiquer, à leur manière, le départ du système et les changements pour l'avenir du pays. Ils étaient une cinquantaine à investir l'esplanade la Grande-Poste, hier matin, pour soutenir, à leur manière, le soulèvement populaire et pacifique que vit le pays depuis plus d'un mois. Eux, ce sont les artistes algériens, amateurs ou professionnels, jeunes pour la plupart, qui se sont donné rendez-vous en ce lieu, désormais symbole de la contestation pour le changement et l'espoir. Saxophonistes, accordéonistes, percussionnistes, et chanteurs, dont Amine Chibane, Djam, Abdou L'gnawi, ont repris, sous la houlette du musicien Mehdi Djama, l'hymne national et des chants entonnés lors des manifestations : La casa d'el-Mouradia, inspirée de la série Netflix La casa de papel, Libérez l'Algérie, ou encore Bella ciao. Organisé depuis trois jours par un collectif d'artistes, ce rassemblement est en fait une autre manière de soutenir les manifestations citoyennes. Bien que le rassemblement reste festif et plein d'espoir pour cette Algérie qui est sur le point d'opérer un changement historique, il n'en demeure pas moins que la colère reste fortement présente. À ce propos, le chanteur Djam, ancien leader des Djmawi Africa, qui veillait sur les moindres détails de l'événement, dira que "la musique est le moyen le plus pertinent pour faire passer des messages, parce que l'art se traduit et se transmet avec émotion. Ce que nous avons fait aujourd'hui est, certes, festif, mais c'est une colère festive, j'insiste sur cela. La smile revolution (La révolution du sourire, ndlr) a toujours été un outil pour le changement". Près du siège du RND, où a été arraché le portrait géant d'Abdelaziz Bouteflika, lors de la première manifestation, le 22 février, des slogans anti-pouvoir scandés lors des marches fusaient parmi la foule compacte qui s'était massée autour des musiciens. "Jibou el BRI zidou essaiqa" (Ramenez la BRI et les forces spéciales), "Yetnahaw gaâ" (Ils doivent tous partir), scandés durant tout le rassemblement, rythmaient les pauses entre ces quatre chants de la matinée. Parmi eux Libérez l'Algérie, l'un des hymnes de la révolte citoyenne, chanté par un collectif d'artistes, de comédiens et d'humoristes, sera repris en chœur par les présents. Sourire dessiné sur les visages et communion entre spectateurs et musiciens, la chanson résonne dans toute la placette et les ruelles mitoyennes, pourtant très animées en ce samedi matin. Un autre chant, tout droit venu des tribunes des stades cette-fois ci, en l'occurrence La casa d'el-Mouradia, entérinera le caractère festif et revendicatif de cette assemblée. "Louwla nqoulou jazet, hchawhalna bel ouchria, wa tania lehkaya banet, el-casa d'el-Mouradia" (Le premier mandat est passé, ils ont trouvé l'excuse de la décennie rouge. Au deuxième mandat, la vérité a éclaté). À noter que "le collectif compte organiser chaque samedi un rassemblement de ce genre, avec d'autres concepts", dira Mehdi Djama. Yasmine Azzouz