Des manifestants québécois ont investi la rue, dimanche, à Montréal pour dénoncer un projet de loi du gouvernement du Québec qui préconise d'interdire le port des signes religieux ostentatoires dans la fonction publique, notamment pour les personnels en position d'autorité comme les juges, les policiers, les enseignants, les directeurs d'école, etc. Le projet de loi 21 qui vise à consacrer la laïcité de l'Etat dans le cadre législatif a été déposé le 28 mars dernier à l'Assemblée nationale par le ministre québécois de l'Immigration, Simon Jolin-Barette, et prévoit d'"interdire le port d'un signe religieux à certaines personnes dans l'exercice de leurs fonctions", comme précisé dans le préambule du projet de loi. Celui-ci modifie, en outre, "la Charte des droits et libertés de la personne afin d'y inscrire que les libertés et droits fondamentaux doivent s'exercer dans le respect de la laïcité de l'Etat". C'est donc pour dénoncer ce projet de loi que des milliers de personnes ont organisé une marche dimanche à Montréal. Plusieurs organisations citoyennes sikhe, musulmane, juive et chinoise qui ont répondu à l'appel ont jugé le projet de loi "liberticide et discriminatoire". Des blessés de l'attentat de la mosquée de Québec ont participé à la manifestation. "Le Québec n'est pas la France", scande-t-on. Le président du Collectif canadien anti-islamophobie, l'islamiste Adil Charkaoui, a harangué la foule qui criait son rejet du projet gouvernemental. "À la poubelle !", s'est-il exclamé. "Personne ne va dicter aux femmes comment s'habiller ou bien où travailler", a martelé cet imam d'origine marocaine, avant le début de la marche. La veille, des élus se sont ligués dans une coalition citoyenne pour inciter le gouvernement de François Legault à faire marche arrière. Ce regroupement d'élus, dont des députés et des maires, a qualifié le projet de loi de "raciste" et envisage de contester devant les tribunaux la loi, une fois adoptée. Des universitaires se sont également positionnés contre le projet législatif de Québec. "Ce projet de loi constitue en soi un dérapage politique tant il rendra acceptables l'atteinte aux droits fondamentaux et la discrimination des groupes déjà minorisés", ont dénoncé ces universitaires dans une lettre ouverte parue dans le journal Le Devoir. "Nous sommes particulièrement inquiets des conséquences de ce type de loi", ont souligné les signataires qui demandent "le retrait de ce projet de loi discriminatoire". Devant la levée de boucliers suscitée par le dépôt du projet de loi 21, le premier ministre du Québec, François Legault, est intervenu pour défendre le projet qu'il juge "modéré". Dans un court discours diffusé la semaine passée, M. Legault a affirmé que "la laïcité ne va pas à l'encontre de la liberté de religion", et, de ce fait, il fallait, selon lui, légiférer pour fixer les règles. "Il est temps de fixer des règles, parce qu'au Québec, c'est comme ça que l'on vit", a conclu le premier ministre son message. Y. A.