Se cachant derrière un vœu de politiques évoluant à contre-courant des aspirations du peuple égyptien, Al-Sissi ne fera que renforcer le pouvoir militaire qui avait perdu quelque peu le contrôle de la situation en 2011. Les députés égyptiens se réuniront aujourd'hui et demain pour discuter du projet de la réforme constitutionnelle, qui ouvrira la voie à une présidence à vie de l'ancien maréchal Abdel-Fattah al-Sissi, selon l'annonce faite dimanche soir par le président du Parlement Ali Abdel-Al. Cela fait des mois que l'entourage d'al-Sissi manœuvre pour lui permettre de prolonger son mandat actuel, en sautant le verrou de la limitation des mandats présidentiels à deux, comme inscrit dans l'actuelle Constitution que lui-même avait fait adopter, pour éviter toute dérive autoritaire à la Moubarak. L'actuelle première loi du pays, le second et dernier mandat de quatre ans d'Abdel-Fattah al-Sissi s'achève en 2022. Mais le Parlement, quasiment acquis au pouvoir, veut prolonger ce règne jusqu'en 2034. Selon la copie définitive qui sera soumise en vote, le mandat en cours se terminera d'ici deux ans, a rapporté Reuters qui a consulté le document en question. Ensuite, Al-Sissi aura le droit de présenter sa candidature à une nouvelle élection qui lui permettra, d'après les amendements proposés, de prétendre à un nouveau mandat de six ans, au lieu de quatre ans actuellement. Le chef de l'Etat aura le droit de briguer un deuxième mandat de six ans. "La commission des affaires constitutionnelles de la Chambre des représentants a approuvé l'amendement dimanche soir", a rapporté encore l'agence Reuters, citant la télévision d'Etat. "La session de mardi est une réunion importante (...) pour étudier et discuter des amendements constitutionnels", a déclaré Abdel-Al lors de la séance plénière du conseil de dimanche, au cours de laquelle il a requis une forte présence de députés. Mais ce n'est pas encore gagné pour Abel-Fattah al-Sissi et ses partisans. Outre l'obligation d'obtenir l'accord de deux tiers des voix, la nouvelle Constitution doit passer par la voie référendaire. Mais selon les médias égyptiens indépendants, citant des sources juridiques, l'on ignore encore qui a le droit de convoquer le référendum populaire. Qui du président de la République ou de la Commission électorale indépendante a les prérogatives d'appeler les Egyptiens à voter en faveur d'une nouvelle Constitution qui renforcera le pouvoir d'Al-Sissi et mettra fin de fait au rêve d'instauration d'un Etat de droit en Egypte et d'un pouvoir civil, comme l'ont réclamé des millions d'Egyptiens de la place Tahrir ? La question reste posée, mais cela reste un détail face à la volonté d'Al-Sissi de renforcer le pouvoir de l'armée, comme le stipule un des amendements qui seront proposés au vote aujourd'hui. En effet, les amendements prévoient un rôle prépondérant des forces armées, qui auront la tâche de "préserver la Constitution et la démocratie et de préserver les éléments fondamentaux de l'Etat et de sa civilisation", tout en renforçant le rôle de l'armée dans la vie civile, selon Reuters.