Même si la tutelle a enfreint les lois régissant le libre commerce en Algérie, elle n'a pas réussi pour autant à éviter la hausse devenue classique des tarifs du mois de jeûne. À la veille du mois sacré, la mercuriale entame d'ores et déjà sa traditionnelle flambée. Ainsi, le Ramadhan 2019 ne déroge pas à la règle, malgré les assurances du gouvernement. Les prix des fruits et légumes et des autres produits de grande consommation ont franchi le seuil du tolérable à travers les principaux marchés de la capitale. La hausse est estimée à plus de 20, voire 30 DA, par rapport aux journées précédentes. Au marché Ferhat-Boussaâd (ex-Meissonier), paradoxalement, aucun marchand n'affiche ses tarifs. Ce qui constitue une infraction flagrante à la réglementation en vigueur. Cette attitude, qui a visiblement fait consensus chez l'ensemble des commerçants, se veut une réponse directe au ministère du Commerce qui a pris la décision, il y a quelques jours, d'imposer des prix de référence pour certains produits dans le but de les rendre accessibles aux petites bourses. Le moins que l'on puisse dire, c'est que cette mesure n'a pas été appliquée par les détaillants. Pour en avoir la preuve, il faut s'adresser à ces derniers. Et les prix qu'ils ont annoncés dépassent de loin ceux fixés préalablement par la tutelle. C'est le cas de la pomme de terre qui est vendue dans ce marché à 65 DA/kg, alors que la fourchette arrêtée par le département de M. Djellab se situe entre 45 et 50 DA maximum. Si l'oignon est plafonné par le ministère à 60 DA, ici, il est cédé à 100 DA ! Soit une différence de 40 DA/kg. La tomate, qui devrait avoisiner les 90 DA, selon le référentiel officiel, est commercialisée à 160 DA dans ce marché. Le poivron, qui a connu déjà une hausse depuis plusieurs jours, est proposé à 200 DA. La viande rouge vendue dans ce marché issue de la production locale est cédée à 1 500 DA. Or, le prix de référence des pouvoirs publics est dans la fourchette de 950-1 000 DA (meilleure qualité). Le poulet a grimpé pour atteindre les 300 DA/kg, alors qu'il était à 230 DA il y a à peine une semaine. À de tels niveaux de tarification, il est quasiment impossible aux citoyens de s'offrir de la viande durant le mois sacré. La déception se lisait sur le visage des clients rencontrés hier sur les lieux. "Il n'y a vraiment pas de quoi remplir les couffins avec une telle hausse des prix", avoue un citoyen, venu faire ses achats en prévision du mois de Ramadhan. Au marché de Birkhadem, la mercuriale s'est également enflammée. La différence dans la tarification est d'environ 10 DA comparée au marché Ferhat-Boussaâd. Mais les tarifs pratiqués demeurent inabordables pour les couches moyennes. Un tel constat montre clairement l'incapacité du ministère du Commerce à concrétiser son objectif primordial pour le mois sacré, à savoir une offre suffisante et à des prix abordables pour toutes les franges de la société. Même si la tutelle a enfreint les lois régissant le libre commerce en Algérie, elle n'a pas réussi pour autant à éviter la hausse, devenue classique, des tarifs du mois de jeûne. Ce qui prouve que ces décisions revêtent un caractère populiste et politique, notamment en cette période de révolte du peuple qui, pour cette fois-ci, ne cherche pas à remplir son tube digestif mais réclame plutôt sa dignité, son honneur, sa liberté et tous ses droits. Il faut dire que cette fixation des prix de référence pour des produits de consommation fait partie d'une batterie de mesures destinées à améliorer ses conditions socioéconomiques, prises récemment par le gouvernement. Par cet acte désespéré, faut-il le préciser, l'Exécutif a voulu s'attirer la sympathie de la population. En vain. Le peuple est déterminé à aller au bout de son combat jusqu'à la totale satisfaction de ses revendications légitimes. B. K.