Les Iraniens estiment avoir accordé assez de temps à Bruxelles pour mettre en place un système d'échanges économiques et financiers pour contourner les sanctions américaines, mais aussi rester dans l'accord de Vienne de 2015. Téhéran a annoncé encore hier avoir déjà produit de l'uranium enrichi à 4,5%, dépassant de fait la limité des 3,67% autorisées dans le cadre de l'accord sur le nucléaire, duquel Washington s'est unilatéralement retiré. L'annonce d'hier est un troisième pas dans le renoncement des Iraniens à leurs engagements, face à des Européens pris de panique et que Téhéran met en garde contre tout propos ou action hostile. "Si les pays restant dans l'accord multilatéral de 2015, en particulier la partie européenne, continuent à honorer leurs engagements par des discours sans passer à des actions concrètes, l'Iran se réserve le droit de franchir son troisième pas "encore plus fermement"", a averti hier le porte-parole de la diplomatie iranienne, Abbas Moussavi, lors d'un point de presse, a rapporté l'agence de presse officielle Irna. "L'Iran n'épingle son espoir sur personne, ni sur les Européens ni même sur les alliés russe et chinois", a-t-il précisé, lit-on encore sur Irna. Téhéran a donné dimanche 60 jours aux partenaires de l'accord de Vienne pour répondre à ses demandes sous peine de voir l'Iran s'affranchir d'autres engagements pris à Vienne. Au bout de ces 60 jours, "toutes les options" seront sur la table, a dit M. Moussavi, y compris une sortie de l'accord de Vienne et du Traité de non-prolifération nucléaire (TNP), ont rapporté les agences de presse. "Toutes les options, y compris celle-ci, sont possibles à l'avenir, mais aucune décision n'a été prise", a-t-il répondu aux journalistes. Le chef de la diplomatie iranienne Mohamed Jawad Zarif s'est montré ferme avec les Européens à ce propos. "Nous exhortons fortement l'Iran à cesser et à revenir sur ses activités qui sont contraires aux engagements pris dans le cadre" de l'accord sur le nucléaire, a déclaré Maja Kocijancic, porte-parole de la diplomatie européenne, ajoutant que l'UE était "très préoccupée" par les annonces iraniennes. Dans des communiqués distincts, Londres et Berlin avaient exhorté dimanche Téhéran à revenir sur sa décision, Paris faisant part de sa "grande inquiétude" et demandant à l'Iran de cesser toute activité "non conforme" à l'accord. Mais dans les faits, il reste peu d'espoir à ce que cet accord tienne, alors qu'il a été arraché après des années d'âpres négociations à Vienne. Hier après-midi, la Russie est revenue à la charge en imputant la responsabilité de cette dangereuse escalade des tensions aux Etats-Unis. "La Russie et le président Vladimir Poutine avaient averti des conséquences qui viendraient inévitablement si l'un des Etats faisant partie de l'accord venait à mettre fin à ses obligations en se retirant. Nous constatons aujourd'hui avec regret ces conséquences", a déclaré le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.