Une mobilisation parmi les plus grandioses et une détermination intacte : ce 24e vendredi aura été l'un des plus mobilisateurs depuis le 22 février dernier, date qui a marqué un historique retournement de situation contre le régime Bouteflika. Ce nouveau vendredi, illustrant la persistance d'un mouvement qui a su déjouer toutes les manœuvres, met à mal la capacité du régime à imposer ses solutions. Des millions d'Algériens ont marché dans toutes les villes du pays ; une mobilisation digne des premiers vendredis post-5e candidature d'Abdelaziz Bouteflika, appuyée et promue, faut-il le rappeler, par certains des tenants actuels du pouvoir. Depuis le début du mouvement, né de la colère des Algériens contre le 5e mandat d'Abdelaziz Bouteflika et de ceux qui ont fait sa promotion parmi les partis politiques et les ministres, la mobilisation est restée intacte malgré les tentatives de division et de dénigrement menées par le régime à la fois contre la révolution et les personnalités consensuelles portées par les Algériens. Loin d'éprouver un quelconque sentiment d'usure ou de lassitude, les Algériens ont assuré, ce vendredi, qu'ils sont plus que jamais mobilisés autour de leurs revendications, se rapportant essentiellement au départ des tenants actuels du pouvoir, figurant de surcroît dans les tablettes du président déchu, au transfert du pouvoir au peuple et au refus de dialoguer avec ceux qui furent les promoteurs d'un 5e mandat, perçu comme l'humiliation de trop. Infatigables, depuis 24 vendredis déjà, les Algériens, par l'unité et le caractère pacifique de leur mouvement, ont su désamorcer toutes les bombes de fragilisation et de la division, dont le spectre de la décennie noire que l'on a brandi dès les premiers vendredis, la répression, les arrestations, les menaces, la stigmatisation des régions et des individus, la fermeture des accès à la capitale et aux lieux emblématiques du mouvement, les atteintes aux libertés... Résultat : même après 24 semaines de mobilisation et de tentatives de casse ininterrompues, la détermination des Algériens reste intacte. Pas convaincus par ce simulacre de dialogue béni par Abdelkader Bensalah, un des premiers personnages à avoir appelé Abdelaziz Bouteflika à briguer un 5e mandat, les Algériens étaient encore plus nombreux à marcher ce vendredi. Le mécontentement n'est pas retombé après le discours du vice-ministre de la Défense prononcé mardi, où il a rejeté en bloc les préalables du panel, conduit par Karim Younès, encarté FLN, fustigeant une "méthode imposant des préalables allant jusqu'aux diktats". "De telles méthodes et thèses sont catégoriquement rejetées", a déclaré le chef d'état-major. Depuis, les panélistes semblent avoir révisé leurs ambitions à la baisse, réduisant les préalables au dialogue à une monnaie d'échange sur la table des négociations. Autant d'ingrédients qui ont fait monter la mobilisation d'un cran dans toutes les villes du pays, malgré la canicule qui sévit dans plusieurs wilayas du Nord et du Sud. Comme ce fut le cas durant le mois de Ramadhan, où la privation était combinée à la chaleur, les Algériens n'ont pas faibli ce premier vendredi du mois d'août, défiant à la fois la chaleur et tous les dangers qui guettent leur révolution. Un avant-goût d'un septembre prometteur au plan de la mobilisation. Le régime politique, très impopulaire, sous la pression de ce mouvement, soutenu par l'élite et la diaspora, peine à convaincre par son élection peu soucieuse des revendications du peuple. Le fossé qui sépare les gouvernants des gouvernés ne fait que s'élargir, rendant vaines les tentatives de dialogue et de sortie de crise.