Cette exposition qui réunit les artistes Bensaïd Amel et Moussaoui Zoubida autour de l'art africain se poursuit jusqu'au 29 du mois en cours à Alger. Qui de nous n'a pas à l'esprit l'évocation d'un pan d'étoffe que l'on appelait communément la "farachia" de tendre grand-mère ? Et qui de nous ne s'est pas assoupi sur ce "khelal" ou ce haïk en laine rapiécé en divers endroits jusqu'à obtenir une "farachia" diversement panachée. D'ailleurs, à la Casbah, la lune n'en compte plus les "ya ouled" du "menzah" qui dormaient à la belle étoile du stah (terrasse) sur une "farachia" matelassée d'une "hidoura" (toison) et reprisée d'agréables et d'indistincts morceaux de tissus. Et c'est ainsi que la "farachia" d'Alger ou "el-hifa" ce diminutif de "l'hif" (misère), le "bsat" de Sétif et la "jariyette" d'Oran sont nés de la débrouillardise de nos aïeux "pour se vêtir et se réchauffer", a certifié Bouaouina Salima, la fondatrice et animatrice du club de l'atelier Patchwork. Si beaux que les ouvrages de labeur ont accosté le pays de l'Oncle Sam qui s'est approprié le concept de nos aïeux né de la nécessité d'apaiser le dénuement, a-t-on su de notre guide, Mme Bouaouina. Et depuis, la farachia de grand-mère n'a pas cessé de s'embellir davantage, eu égard à l'art d'allier une variété de fragments d'inégales dimensions et bigarrés pour confectionner une gamme de différents modèles de labeur, dont des couvre-lits taillés dans le tissu africain et matelassés d'une couche de molleton et des nappes de Ghomchi Rosemarie. "Il est vrai que les Américains ont hissé le patchwork au rang de l'art, dont nous revendiquons notre quote-part de paternité, au motif que le premier patchwork est un suaire découvert dans l'Egypte antique", a indiqué notre interlocutrice. C'est dire qu'à l'inverse de ce qui symbolisait naguère la misère à la Casbah et dans l'arrière-pays de la Berbérie, de nos jours les gens ne s'en cachent plus d'enjoliver leur intérieur du patchwork contemporain. En témoignent le "renouveau" des signes berbères de Bousmaha Saliha et de la poterie de Batata Louisa. S'il en est une preuve, celle-ci s'illustre au Palais des raïs où les "quilteuses", ces passionnées du patchwork, ont amarré depuis le 19 septembre le chebek "l'atelier" "en ce jour de fête" de Lalouci Karima aux "Vagues océanes" de Fernani Linda et de Zeroug Khedidja, où il fait bon de cueillir "le coquillage" sur le rivage de R'mila (la sablette). La brise est d'autant fraîche du côté du siège de l'"Amirauté" qu'a esquissée la dame Bouaouina Salima. L'objectif de ces dames est d'enjoliver les gh'rof (chambres) du Bastion 23 du chant de "L'oiseau du paradis" de Bensalem Fatiha. Mieux, "L'ananas" de Terkmane Amel coule à flots dans l'ouast-eddar du Bastion 23 en guise de bienvenue au visiteur. "Notre première exposition date de 1998 à la Bibliothèque nationale d'El-Hamma qui s'est auréolée de l'adhésion d'autres talentueuses fées du logis. Et depuis, nous nous efforçons à vulgariser au mieux les techniques du patchwork, dont le paysage Crazy de Bensalem Fatiha, la miniature, le Bargelo, le vitrail, celtique, l'imbrication, le Baltimore, la mosaïque, le hawaïen, et l'art textile libre", a conclu notre interlocutrice, qui excelle également dans l'art du cartonnage et l'art plastique. Donc, autant aller au Palais des raïs où l'art africain du duo Bensaïd Amel et Moussaoui Zoubida vous attend jusqu'au 29 du mois en cours. Nourreddine Louhal