Le prince héritier Mohamed Ben Salmane a nié avoir donné l'ordre d'assassiner le journaliste opposant, mais il refuse aussi l'ouverture d'une enquête internationale indépendante. L'affaire de l'assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi, dans le consulat d'Arabie Saoudite à Istanbul (Turquie), bouclera un an demain, mais la vérité reste encore à établir sur les véritables responsables de ce crime d'Etat. Chroniqueur au journal américain The Washington Post et opposant farouche au prince héritier Mohamed Ben Salmane, M. Khashoggi a été sauvagement exécuté à l'intérieur du consulat saoudien d'Istanbul par un commando de 15 personnes, le 2 octobre 2018. Son corps, décapité, est toujours introuvable. Selon la presse turque, se basant sur des éléments d'enquête des services turcs, les assassins de Khashoggi ont dispersé des morceaux de son corps dans plusieurs endroits d'Istanbul, alors que des informations font état de sa dissolution dans le puits de la résidence de l'ancien consul, rentré précipitamment en Arabie Saoudite au lendemain de l'éclatement de cette affaire. Dimanche, le président turc Recep Tayyip Erdogan a affirmé qu'"un an après (l'assassinat du journaliste saoudien, ndlr), la communauté internationale n'en sait toujours que très peu sur ce qui s'est passé" dans cette affaire qui demeure, selon lui, "un grave sujet de préoccupation", lit-on dans une longue tribune qu'il a publiée sur les colonnes du journal américain The Washington Post. "Notre longue amitié (avec l'Arabie Saoudite, ndlr) n'implique cependant pas nécessairement le silence" sur une affaire qui a ramené le monde à la réalité du royaume wahhabite et de son prince héritier, un va-t-en-guerre qui ne tolère aucune opposition. Accusé d'être le principal commanditaire de ce crime, Mohamed Ben Salmane a toujours nié d'être impliqué. Pourtant, tous les chemins mènent vers sa responsabilité directe dans l'élimination physique de Jamal Khashoggi, à commencer par l'enquête des services turcs et des conclusions d'un rapport de l'agence de renseignement américaine, la CIA, qui estime en effet que l'assassinat a probablement été commandité par le prince héritier lui-même, se basant sur plusieurs éléments de preuves fournis aussi bien par ses agents sur le terrain, par les écoutes téléphoniques et les enregistrements qu'Ankara a fait écouter à plusieurs parties. De son côté, une experte de l'ONU, Agnès Callamard, a conclu en juin dernier qu'il existait des preuves suffisantes pour ouvrir une enquête sur la responsabilité du prince héritier dans l'affaire Khashoggi. Mme Callamard a demandé de se rendre en Arabie Saoudite pour faire la lumière sur cette affaire, mais elle s'est vu opposer un refus catégorique de la part des autorités saoudiennes. La demande d'enquête indépendante voulue par l'ONU et réclamée aussi par la Turquie est restée, jusqu'ici, lettre morte. La communauté internationale, quant à elle, semble avoir complètement oublié ce crime qui a ému le monde durant des semaines.