Considérant que le verdict est dicté, les avocats envisagent de boycotter le procès. Ils ont décidé d'entonner l'hymne national et de quitter la salle. La stratégie de défense peut changer au cours de l'audience. Le collectif de défense des détenus d'opinion s'est réuni, jusque tard dans la journée d'hier, au siège du bâtonnat d'Alger. À l'ordre du jour de la rencontre, qui a regroupé une centaine d'avocats, la mise au point d'une stratégie à suivre lors du procès de 18 manifestants, sous mandat de dépôt pour port de l'emblème amazigh, une pancarte ou confection de pin's, qui s'ouvre aujourd'hui au tribunal de Sidi M'hamed. Après plusieurs heures de discussions, le collectif a convenu, selon Mes Boubaker Hemaïli et Djamel Benyoub, qui ont donné instantanément l'information sur leurs comptes sur des réseaux sociaux, de ne pas plaider dans les affaires d'opinion, traitées au niveau de l'instance judiciaire d'Alger-Centre, à cause de "la violation du principe de droit devant la justice". En termes clairs, il ne convient pas de donner, selon la défense, du crédit à un procès dont le verdict est connu d'avance, car dicté par des références autres que celles consignées dans le code pénal. Les robes noires ont entrepris une démarche similaire, à plusieurs reprises, lors des présentations devant les juges d'instruction au tribunal de première instance et des audiences portant examen de libération des détenus d'opinion devant la cour d'Alger, au motif que les affaires sont instruites sans fondement juridique et qu'elles relèvent, par conséquent, de considérations politiques. C'est une manière aussi de s'insurger contre les lourdes peines infligées, la semaine dernière, à 27 prisonniers pour port de l'emblème amazigh (une année de prison dont six mois fermes et une amende de 30 000 DA et six mois de réclusion assortis de 20 000 DA d'amende), tandis que d'autres juridictions (Annaba, Mostaganem, Jijel et Bab El-Oued) ont prononcé la relaxe pour des chefs d'inculpation identiques. Il n'en demeure pas moins que cette décision n'a pas fait l'unanimité au sein du collectif. Des avocats ont estimé plus judicieux de continuer à battre en brèche l'accusation par des plaidoiries solides et argumentées. Des sources concordantes indiquent que la stratégie de la défense peut changer, au cours du procès. "Toutes les options restent envisageables", nous dit-on. Nos interlocuteurs n'ont, d'ailleurs, pas voulu épiloguer sur la réunion du jour. Il est possible, en outre, que les détenus refusent de répondre aux questions du juge. Une certitude néanmoins, la mobilisation sera forte à l'intérieur et à l'extérieur du tribunal sis à la rue Abane-Ramdane.