En sus de l'attachement viscéral aux traditions ancestrales, la célébration du nouvel an amazigh dans la région du M'zab obéit à une tradition liée aux activités agricoles et aux ressources essentielles à la vie paysanne. Il marque le début de la saison hivernale et l'année agraire dans la région au climat aride. Pour les habitants des oasis, Ikhef n usegwass amaynut qui coïncide avec la fin de la cueillette de la production phœnicicole, constitue une étape cruciale pour passer en revue la situation des palmeraies et annoncer le début de l'opération de soins et de toilettage des palmiers dattiers productifs, selon une propriétaire d'une palmeraie à Melika (Ghardaïa). À l'occasion de cet événement, symbole d'attachement des habitants de la région aux traditions ancestrales puisées dans notre histoire pluriséculaire, une ambiance festive rythme la journée des familles qui se regroupent autour de bons mets traditionnels, avec pour priorité, d'entourer les personnes âgées. Les enfants se parent de leurs plus beaux vêtements et des activités associatives animent la vie publique. Du témoignage d'un habitant de Bounoura, "le nouvel an amazigh, c'est surtout le début d'une année agraire qu'on espère prospère, notamment dans cette zone aride". Même témoignage d'un habitant de la ville de Béni Izguen. Chaque année, Yennayer est célébré à la manière des ancêtres avec la même ferveur et tout le cérémonial habituel autour de plats spéciaux minutieusement préparés la soirée du nouvel an amazigh pour augurer d'une nouvelle année de paix et de bonheur. "Arfis", incontournable lors de la célébration de Yennayer, est le plat du terroir que les familles berbérophones de Ghardaïa préparent pour l'accueillir. Réalisé à base de semoule, de sucre, de lait et d'œufs, ce "arfis" que la maîtresse de maison fait cuire puis effrite avant de le passer à la vapeur puis imbibe de smen avant de décorer le plat de raisins secs et d'œufs durs, réunit toute la famille, la nuit du 6 au 7 janvier de chaque année marquant Yennayer (le début de l'année). Cette différence de date (Yennayer est célébré ailleurs le 12 janvier) reste encore mystérieuse et aucune source n'a pu éclairer sur cette énigmatique date pour marquer Yennayer dans le M'zab. Cependant, tout le monde s'accorde à dire que le nouvel an amazigh renvoie au calendrier agricole. Les réunions des familles, pendant cette nuit autour de ce délicieux mets accompagné d'un thé, permettent de renforcer les liens familiaux et de rapprocher les membres de la famille, a-t-on souligné. Côté nord de la vallée du M'zab, "charchem", un autre plat traditionnel, est préparé à l'occasion. Il est composé de blé fumé avec des ingrédients et des épices lui donnant une saveur spécifique. Par ailleurs, plusieurs cérémonies festives marquant l'événement ont été concoctées durant trois jours par de nombreux acteurs de la société civile dans les différents ksour de la Pentapole (El-Ateuf, Bounoura, Melika, Ghardaïa et Beni Izguen), notamment des activités culturelles, artistiques et gastronomiques. Des séances de lecture de poésies amazighes mettant en relief l'historicité et la mystique de cette tradition millénaire, ainsi que ses rites, ont eu lieu vendredi dans le ksar de Bounoura devant un parterre d'enfants revêtus de tenues traditionnelles de la région de Ghardaïa et des environs. Comme interlude, des sketchs amazighs préparés par des membres d'associations culturelles ont été joués devant des adultes.